Enfin ! Après toutes ces années passées à se morfondre dans son village natal, Elfazelle avait trouvé le courage de partir vers la capitale où elle espérait prendre un nouveau départ.
Là-bas, personne ne la connaissait ; elle pouvait devenir qui elle voulait en faisant fi des qu'en dira-t-on.
Le voyage avait été assez court, son village se trouvant à moins de 50 km de Lüh, le long de la rivière blanche, et se passa fort heureusement sans heurt.
Une fois dans la ville, Elfazelle ne savait où donner de la tête ; TOUT était impressionnant : jamais elle n'avait croisé autant de personnes, vu de bâtiments aussi hauts et ouvragés, et tous ces commerces... Lüh était encore plus belle que dans son imagination !

Elle prit quelques instants pour vagabonder dans les rues avant de se rappeler son objectif : trouver un mentor qui lui apprendrait la chasse.
Quoi de plus logique que de se diriger vers le panneau d'affichage de la taverne, il y aurait forcément quelques chasseurs cherchant leur prochaine mission !
La taverne ne fut pas difficile à trouver : elle se trouvait vers la rue commerçante et était repérable au bruit et à l'odeur d'alcool.
Elfazelle essaya de discerner le tableau d'affichage à travers les fenêtres.
« Si je rentre là dedans et que ce n'est pas le bon endroit, j'aurais l'air maligne... » songea-t-elle.
Mais le dernier lavage des vitres ne semblait pas dater d'hier, et Elfazelle ne distinguait rien qui ressemblait à un panneau d'affichage.
« Tant pis... Il va bien falloir rentrer, je n'ai aucune autre piste. Avec l'agitation ambiante, on ne devrait pas me remarquer de toute façon. » se dit-elle pour se donner du courage.

Elfazelle se décida à pousser la lourde porte en chêne de la taverne.
Toutefois, elle n'aimait pas ce genre d'endroit : c'était bruyant, agité et, par dessus tout, elle détestait l'odeur omniprésente de l'alcool ; cela lui rappelait de mauvais souvenirs des fêtes organisées dans son village se terminant toujours sur des échanges de coups. Elle prit donc ses cheveux pour les placer devant son nez et masquer cette odeur.
« Alors, où est ce fichu tableau ? » murmura-t-elle dans ses cheveux en scrutant vivement la salle.

« Ah ! Le voilà ! »
Elle se dirigea vers le panneau en évitant les gestes brusques des rustres attablés trinquant avec leurs choppes.
Quelques personnes se trouvaient autour du panneau, mais l'une d'entre elles attira particulièrement son attention.
Il s'agissait d'une jeune femme à la chevelure de feu, assez grande et aux muscles dessinés.
« Avec cette cuirasse, elle doit sûrement être chasseuse. »
Elfazelle se rapprocha de ce modèle auquel elle aspirait devenir, et s'arrêta derrière elle.
C'était décidé, elle ferait un parfait mentor !
« Il faut que je lui demande si elle accepterait de m'entraîner. Oh si je pouvais devenir comme elle... Mais comment l'aborder sans avoir l'air ridicule ? ».

Alors qu'Elfazelle réfléchissait à la meilleure manière d'aborder la jeune femme, cette dernière recula brusquement vers elle, trop absorbée dans ses pensées pour l'éviter. Elle étouffa un « Ouch ! » en se tenant le bras suite au choc.
« Et voilà, j'ai l'air d'une idiote maintenant... »
Elfazelle était encore plus impressionnée par la mystérieuse inconnue après avoir croisé son regard déterminé.
« Pardonnez-moi, j'étais perdue dans mes réflexions et je n'ai pas vu que vous reculiez. » balbutia-t-elle.
« Je... J'ai vu que vous regardiez le tableau d'affichage, et je me demandais si... vous êtes chasseuse ? En fait, ça va sûrement vous surprendre, mais j'aimerais moi aussi me lancer sauf que euh... vous voyez, je n'ai pas pas vraiment le physique de l'emploi... » soupira-t-elle en regardant ses pieds.
Elfazelle releva les yeux et, en tortillant le bout de ses cheveux pour se donner du courage, se décida à poser la question qui était la raison de son arrivée à Lüh de sa petite voix douce :
« Du coup, je cherche quelqu'un qui pourrait m'aider à débuter, m'apprendre les bases, me donner quelques leçons d'entraînement... Une sorte de mentor. Est-ce vous pensez pouvoir m'aider ? »
Elfazelle adressa un sourire timide à la jeune femme en scrutant ses réactions.

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Arrivée à Lüh
Un coeur sauvage pour une âme en quête de savoirs

Rymaïn & Elfazelle ⟐ Lüh ⟐ Ignis 59

L'ombre des remparts de la capitale vient engloutir la silhouette momentanément stoppée devant l'entrée. La caravane approvisionnant diverses tavernes en liqueurs, dépasse la rouquine pour pénétrer dans la cité. Des prunelles olives s'arrachent à leur contemplation dépitée. Le regard sombre évite les hommes d'armes, sans leur adresser le moindre salut Rymaïn passe les grandes portes à son tour. Seule la nécessite pécuniaire la force à remettre les pieds en ce lieu si tôt. Qu'importe. La femme qui s'avance d'un pas déterminé dans le dédale des rues, n'est plus celle qui a quitté Lüh la dernière fois.

La chevelure toujours si ardente, repose sur un cuir épais, nouvellement acquis. Il recouvre un tissu de corps, qui se décline dans un vert bouteille profond. La blouse, dépourvue de manches en cette chaleur, ainsi que le retrait temporaire de ses brassards, laissent paraître des bras finement musclés et... Nus. Au même titre que la base de ses joues, la peau hâlée n'arbore plus la moindre trace des marques peintes, caractéristiques de la nordienne. L'absence de regards jetés dans sa direction ne l'interpelle pas rapidement. Elle s'en souciait peu, alors habituée. Pourtant, lorsque le constat s'immisce doucement en elle, son esprit s'allège étonnement.

Personne ne sait qui elle est ainsi. Extrêmement rares sont les individus ayant connaissance de la nature des dessins qu'elle portait. Tous les autres n'ont jamais perçu que des tatouages. Or, des tatouages, cela ne s'enlève guère. Ce ne peut donc être la même. Un fin sourire ourle brièvement le coin de ses lèvres roses. C'en est presque agréable. Mais son esprit se tourne vers des préoccupations plus actuelles et évince le reste rapidement. Son pas vif l'amène à la taverne la plus reconnue de Lüh. Où figurent davantage de contrats intéressants.

D'une poussée d'épaule, elle ouvre le panneau boisé et se faufile à l'intérieur. Ses sens se retrouvent rapidement saturés par un écœurement familier. Trop plein d'êtres humains, de bruits, d'odeurs âcres... Heureusement, sa cible se situe non loin de l'entrée. Un bref coup d'oeil et puis elle partira. Difficile de faire plus rapide, il n'y a strictement rien d'alléchant. Une moue de dégoût crispe son visage alors qu'elle penche le fief vers un placard représentant un Sanza Roux. Ce qui lui inspire tel rejet tient en deux lettres « Lù » et un commentaire exécutif. Madame la troisième fille veut une peau intacte pour parader parmi ses semblables, hein? Par les Quatre, qu'est-ce qu'elle peut bien lui trou...

Son corps heurte quelque chose lorsqu'elle se détourne, perdue dans ses pensées. Quelqu'un, plus exactement. La rouquine maugrée vaguement, s'assurant que l'autre reste sur ses jambes. Son regard accroche le visage qui s'adresse à elle. Et ne semble pas en finir. Des excuses, d'accord, très bien. Pas de temps à perdre... Mais pourquoi continue-t-elle de lui parler? Qu'est-ce que?

Rymaïn, une expression fermée sur le faciès, la dévisage de la tête aux pieds. La jeune femme semble loin de ses aspirations. Tant sur le plan physique que théorique, au vu de sa requête. La nordienne lui octroie à peine quelques secondes de son temps, pour lui répondre de son timbre froid habituel.

"Il y a une guilde de chasseurs dans la cité. Nul doute que vous y trouverez des réponses." La femme se détourne, elle lui aura au moins fourni un renseignement utile. Ce n'est pas comme si elle était en mesure de lui donner des noms, ou entretenait le désir d'y réfléchir. Son geste est écourté par une voix fluette et chantante. Qui la stoppe net. Elle en connaît la propriétaire.


« Je crois que la demande t'était personnellement adressée! »
La rouquine arque un sourcil. Les mots résonnent étrangement dans son crâne. Ils chassent le questionnement quant à la présence de Sol, sous une métamorphose inconnue. La petite créature ailée vient batifoler autour de sa tête, puis de celle de la jeune femme qui se trouve nettement plus bas. Elle sifflote gaiement et innocemment.

L'olive de ses prunelles se fixe à nouveau sur la personne qu'elle a heurté. La brève surprise fait place à la morsure de sa réponse. "Certainement pas!" La seconde suivante, une simple traînée flamboyante marque sa disparition.

Sol lève les yeux et vient se poser doucement sur l'épaule de la demoiselle à la longue chevelure brune. Bienveillante et enjouée, sa voix tinte comme la mélodie d'une flûte singulière. « Ne baissez pas les bras. En insistant un tout petit peu, elle finira pas céder. Je la connais. Allons la rejoindre! » 'Et avec un peu de mon aide', songea-t-elle silencieusement, avant de reprendre son envol et de s'éclipser par une fenêtre entrouverte.


D'un battement d'ailes, elle rejoint la silhouette aux cheveux flamboyants. Reprenant sa danse autour de cette dernière sans jamais trop l'approcher. Histoire de la ralentir et la distraire un peu. Juste assez pour que la brunette puisse les rattraper. En espérant qu'elle vienne, évidemment.


« Tu devrais accepter. Cela t'apporterait plus que tu ne le crois... Et! Je suis certaine qu'elle serait du même avis, héhé! »
'Elle' ? Le visage de la baronne de Blanchecime se forme doucement dans son esprit, alors que la guerrière ralentit son pas. Puis s'arrête complètement en observant l'enfant divin. "Elle... Me fait suivre?" Hésitante. Irritée. Un peu perdue, la rouquine ne sait que penser. « Du tout! Elle est au Marché des Saveurs, j'en profite juste pour me balader. Lorsque j'ai perçu un éclair enflammé pénétrer dans la taverne, je n'ai pas résisté. Tu sais comme je suis. »

Bien sûr. La légère tension dans ses épaules s'évanouit, alors qu'elle demeure un rien pensive. Quelle entreprise stupide ce serait là. Pourquoi la divinité lui suggère-t-elle une chose de la sorte?

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La réponse de la grande rousse n'était pas celle qu'elle espérait, mais elle s'y attendait.
Il faudrait être très altruiste pour accepter d'entraîner quelqu'un aussi loin d'être chasseuse que le Soleil de la Terre.
Ou bien aimer relever des défis a priori insurmontables...
En revanche, elle ne s'attendait certainement pas à l'apparition de la petite chose ailée, qui ne ressemblait à rien de ce qu'elle connaissait.
La créature semblait être un rongeur pourvu d'ailes et doué de parole.

« Se pourrait-il qu'il s'agisse d'un demi-dieu ? Très probablement, il est vrai que les chasseurs sont connus pour en posséder, et elles semblaient se connaître. »
Elfazelle resta donc plantée là quelques secondes, le temps de se remettre de la surprise et comprendre ce qu'il s'était passé.
« Oh ! Mais je viens donc de rencontrer une semi-divinité pour la première fois ! Et elle m'a parlé directement ! »
Sans l'intervention de la petite chose, elle aurait très certainement suivi le conseil donné par la jeune femme, et se serait mise en quête d'une âme charitable à la guilde des chasseurs.
Mais... le petit être s'était adressé directement à elle, et lui avait même recommandé de ne pas baisser les bras.
« Cette rencontre, la présence de la semi-divinité... c'est forcément un signe ! »

Encouragée par les paroles mélodieuses qui résonnaient encore dans sa tête, Elfazelle reprit ses esprits et s'élança à la sortie de la taverne.
Elle était bien décidée à rattraper la lueur orangée qu'elle apercevait au loin due aux reflets du soleil sur la chevelure rousse.
Si Elfazelle ne disposait pas de grandes capacités physiques, sa petite taille et son poids léger faisaient d'elle une coureuse assez rapide et très agile, ce qui lui permit de rattraper les reflets roux en évitant la foule environnante.

« La voilà avec la demi-déesse ! Tiens, elle s'est arrêtée... »

Cette fois-ci, il allait falloir être convaincante, elle n'aurait probablement pas d'autre chance.
Elfazelle prit une grande inspiration avant de faire mine de se racler la gorge.

« C'est encore moi ! Je me suis peut-être mal exprimée. Laissez-moi être plus claire. »

Elfazelle attendit tout juste assez de temps pour avoir l'attention de la jeune femme mais avant que cette dernière ne puisse l'interrompre.
Elle continua d'une voix calme, afin de prendre le temps de bien choisir ses mots.

« Je me doute que vous pensez que je ne suis pas à la hauteur, mais je suis très persévérante une fois que je me suis fixé un objectif ; sinon je ne vous aurais pas rattrapée... »

Une pensée lui traversa l'esprit sur cette dernière partie de la phrase :
« Surtout quand une semi-divinité me fait comprendre que ma prochaine étape est d'insister pour atteindre mon but. »

« Si vous acceptez de me donner une chance, je suivrai toutes vos instructions à la lettre et m'entraînerai sans relâche aussi longtemps qu'il faudra... Ne souhaitez vous pas relever un nouveau défi ? A moins que la difficulté ne vous semble trop élevée ? »

Elfazelle lui adressa un sourire d'un coin de la bouche en relevant un sourcil. Elle espérait bien attiser l'esprit compétitif de son interlocutrice avec sa question. Après tout, un chasseur ne refuserait pas un défi ?

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Arrivée à Lüh
Un coeur sauvage pour une âme en quête de savoirs

Rymaïn & Elfazelle ⟐ Lüh ⟐ Ignis 59

Bien que perdue dans ses pensées, Rymaïn reconnaît aisément le timbre de voix entendu précédemment. Elle fait volte-face, son regard tombe à nouveau plus bas, sur le visage encadré d'une chevelure brune. Plus claire? Rien ne semble aussi clair aux yeux de la nordienne, mais la jeune femme, la voix calme et semblant gonflée d'une assurance nouvelle, poursuit aussitôt.

Ses bras toujours croisés sur sa poitrine, la rousse daigne l'écouter davantage. Haussant un sourcil à l'entente de certains propos. Pourquoi une inconnue s'entête-t-elle de la sorte? Se faire rabrouer dissuade généralement le plupart des gens. Quoique... Non, en général elle n'a pas besoin d'aller jusque là. Personne ne lui demanderait une chose pareille.

Les mots qui lui sont adressé résonnent étrangement, familiers. Elle se pince les lèvres brièvement avant de pouvoir en placer une. Son ton ne varie pas plus qu'auparavant, soufflant toujours le froid d'Aer. Le contenu diffère néanmoins.

"Nul n'est davantage à la hauteur qu'un autre. Cesse de te douter de ce que je peux penser sans me connaître et fie toi à ta propre opinion de toi-même." Lentement, ses épaules se relâchent, Rymaïn vient saisir son menton d'une main, pensive, gardant l'autre contre sa hanche. Elle se fiche bien de relever un défi quel qu'il soit. Ses préoccupations se trouvent ailleurs. La seule chose qui la retient ici, est ancrée en d'autres lieux de sa psyché...

Sans ajouter un mot, elle commence à tourner autour de la jeune femme. Ses pas se confondent avec le souvenir de ceux d'un homme aux habilités martiales impressionnantes. "Est-ce que tu sais seulement te servir d'une arme?" La vivacité des prunelles olive détaille chaque courbe du corps qui se présente sous son regard. Ne lui laissant pas plus de temps pour répondre, elle continue.

"Un arc serait sans doute le plus adéquat. Inutile d'envisager d'aller au contact... Pour l'instant." Avec cette corpulence, à l'heure actuelle, elle se ferait littéralement déchiqueter. Mais ce type de morphologie offre plusieurs autres formes d'intérêts. "Ne déconsidères pas ton physique. Tu es petite, légère, probablement souple... Avec de l'entraînement, tu pourrais développer une grande mobilité sur laquelle compter à chaque instant."

Son mouvement la ramène aux devants de la demoiselle. Qu'est-ce qu'il lui prend? A déjà imaginer comment structurer la formation de cette jeune fille dont elle ignore tout, même le nom? Et Sol, qui papillonne en sifflotant gaiement autour d'elles. D'un geste exaspéré de la main elle fait mine de la chasser. C'est entièrement sa faute si elle se retrouve coincée dans une telle situation. La créature divine lui lance un clin d’œil avant de s'éclipser totalement. Ses yeux se lèvent vers le ciel clair avec un certain désabusement. "Rhaaa! Chat stupide." L'allusion à l'apparence réelle du divin doit sembler sortir de nulle part. Cela n'a pas d'importance, le regard dur s’est allégé à son départ et vient croiser les prunelles silencieuses devant elle.

"Soit. Cependant, évite de faire ce que je te demande sans réfléchir. L'erreur est profondément humaine, l'instinct revête une grande importance. Surtout dans le feu de l'action. Ne suis pas bêtement ce qu'on te dit, si jamais tu penses que tes idées peuvent impacter différemment les choses. C'est clair?" N'attendant pas réellement son assentiment, elle l'observe une dernière fois de bas en faut.

"Si tu n'as pas d'équipement, j'espère que tu as de l'or? Et du temps, surtout... Car tu vas devoir consacrer à ton apprentissage la majeure partie de ton temps." Et elle? A-t-elle seulement le temps pour ça? ... Plus qu'elle ne veut bien le reconnaître, sans doute. Rymaïn se détourne, puis reprend sa route, supposant naturellement que la jeune fille va la suivre.

"Les bases ne nécessitent pas de réelles dépenses. Il te faut juste un arc et des flèches, si tu n'en a pas. Tu dois commencer à pratiquer le tir le plus tôt possible." Elle avance d'un bon pas, avec l'habitude qu'autrui se bouge pour la laisser passer et sans prêter vraiment attention à ce qui l'entoure. "Ton nom?"

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Elfazelle ne savait pas du tout à quoi s'attendre après son petit monologue. Durant les quelques secondes précédant la réponse de son interlocutrice, divers scénarios se bousculaient dans son esprit :
«  Peut-être que la perspective de défi va faire mouche et que la jeune femme intéressée se présentera sous un jour sympathique et enjoué, comme l'invocation à côté ? Non, il ne faut pas rêver non plus...
Ou bien elle va simplement décliner et partir comme elle l'avait fait à la taverne ?
Et si... elle se mettait à m'insulter devant tout le monde ? »

Devant cette dernière éventualité, Elfazelle déglutit et son estomac commença à se serrer.
Heureusement, l'angoisse fût brève.

"Nul n'est davantage à la hauteur qu'un autre. Cesse de te douter de ce que je peux penser sans me connaître et fie toi à ta propre opinion de toi-même."  

Elfazelle n'avait absolument pas envisagé recevoir des conseils sur la confiance en soi. Visiblement, la rouquine n'appréciait pas les personnes qui se dévalorisent.

« Note plus tard : essayer d'avoir plus d'assurance. Ou au moins faire semblant. »

C'était un peu stressant de se faire tourner autour en étant jugée, mais Elfazelle tenta tant bien que mal de faire bonne figure. Elle parvint tout de même à retenir sa main de venir tournicoter dans le bout de ses cheveux.

"Est-ce que tu sais seulement te servir d'une arme?"  

Sa tête se baissa instinctivement quand elle entendit cette question. Bien sûr que non elle ne savait pas se servir d'une arme. Elle aurait bien aimé que quelqu'un lui apprenne au village, mais on lui riait au nez dès qu'elle commençait à parler des aventures qui la faisaient vibrer dans ses livres.
Toutefois, la jeune femme n'attendit pas de réponse et lui conseilla un arc.
Elfazelle releva la tête. Elle était bien évidemment arrivée à cette conclusion elle aussi, sauf qu'un arc était beaucoup plus difficile à dissimuler dans la chambre de sa maison familiale, en attendant le moment opportun pour partir. Au moins, elle avait pu emporter une dague.

« Comment a-t-elle pu deviner que je suis souple ? Et à quoi ça me sert de toucher mes doigts de pieds en combat ? »

Elfazelle sourit un bref instant à cette idée. Le ton de la conversion était trop sérieux pour qu'elle ose poser cette question.
La petite semi-divinité qui virevoltait autour d'elles semblait agacer l'inconnue, qui la chassa d'un revers de la main.

« Ce n'est peut-être pas son invocation après tout. Dommage, je l'aimais bien... Et je n'ai même pas eu le temps de la remercier pour m'avoir poussée. Chat ? Sha ? Ça doit être son nom, car elle n'a rien d'un chat. »

La créature partie, voilà qu'Elfazelle recevait un nouveau conseil, ou plutôt un ordre.

« Vais-je un jour oser la contester ? Moi qui n'ai jamais manié une arme alors qu'elle a dû vaincre de nombreux monstres ? »

Elfazelle opina tout de même de la tête. Elle verrait plus tard quand l'occasion se présenterait.

« J'ai prévu de consacrer tous mes après-midis et mes soirées s'il le faut à m'entraîner. »

« Cela ne va sûrement pas l'intéresser que je lui parle de mon projet de bibliothécaire à mi-temps. »

La jeune femme commençait à partir, et Elfazelle ne savait pas trop si elle devait la suivre jusqu'à ce qu'elle reprenne la conversation.
Elfazelle le prit comme une invitation et marchait rapidement tantôt à ses côtés, tantôt derrière elle pour éviter les passants.

« Très bien, je m'en procurerai un dès que possible. »

« Il va falloir que je me fasse vite engager à la bibliothèque pour pouvoir m'offrir l'équipement adéquat ! »
Son nom ? Il est vrai que la rencontre ayant été assez différente de ce qu'Elfazelle avait imaginé, elle n'avait pas démarré par une présentation en bonne et due forme.
« Oh oui ! Exc... » Elle se racla la gorge pour étouffer son début d'excuse en se rappelant qu'elle devait avoir l'air sûre d'elle. Avec le bruit ambiant, son commencement de mot passerait sûrement inaperçu. « Elfazelle ! Et vous ? » lança-t-elle d'une voix plus forte.

Elle avait hésité à la tutoyer, mais elle préféra attendre d'y être autorisé. Mieux valait éviter de froisser l’impressionnante jeune femme.

Pour s'assurer qu'elle pouvait bien continuer à marcher à ses côtés, Elfazelle posa une question : « Et où allez vous maintenant ? ».

« L'archerie ? Parfait ! Autant commencer dès que possible !  »

« C'est un peu plus rapide que ce que j'avais imaginé, mais c'est ce que je voulais après tout. Allez, il faut bien que je me lance si je veux réaliser mon rêve un jour. »

Elfazelle souhaitait en connaître un peu plus sur sa nouvelle rencontre, comme elle seraient amenées à passer beaucoup de temps ensemble. « Vous avez l'air de bien connaître la ville, vous habitez ici ? »

Après avoir obtenu la réponse, elle attendit un instant avant de demander sur un ton intéressé « Et depuis combien de temps vous pratiquez le maniement des armes ? »

En réalité, elle essayait de déterminer combien de temps elle aurait besoin pour arriver à un bon niveau.

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Sans se préoccuper du désagrément que peut occasionner son observation -Rymaïn étant incapable d'en prendre conscience- elle avait continué de la jauger du regard. Attentive à ses propos, révélateurs. Effectivement, la jeune chasseuse ne devait pas disposer de beaucoup d'or. Au moins, elle faisait montre de volonté, c'est ce qui était essentiel. Allouer le temps nécessaire à son entraînement serait crucial.

"Bien."


En route vers le quartier marchand, sa question trouve un écho. Elle hésite, une seconde. Puis opère un choix. La fin de sa réponse se délie sur un timbre sans équivoque. Qui vise à brider tout questionnement ou demande de détails supplémentaires. "Je... Rym." Inutile de déployer son identité complètement. Surtout ici. Surtout... Maintenant. Trop de choses ont changé. Son prénom n'est pas courant après tout. Si elle doit demeurer plus longtemps que prévu en ces lieux, autant apporter à cette situation le plus de confort possible. A sa demande, la guerrière précise son intention.

"À l'archerie. Si tu n'as pas de quoi te faire confectionner un arc pour le moment, il en existe néanmoins de facture relativement correcte et peu coûteux pour débuter. Je t'avancerai de l'or au besoin, et prélèverai un pourcentage sur ta part lorsque nous entameront tes premières chasses."

Le silence a à peine le temps de s'installer entres elles, qu'il disparaît aussitôt. Elle fronce les sourcils, retient un soupir. Comment peut-on être si bavard?? Oui, elle connaît bien la ville. Un souvenir fugace empreinte le tracé de son esprit. Une nuit éclairée par une lune d'un rouge chaleureux et étonnant. Un regard duel... La nordienne chasse l'amer réminiscence. Là encore, inutile de s'attarder sur les détails. Tout ça ne concerne nullement la petite brune. Elle ne vit plus ici. "Non."

Et la Capitale l'indispose au plus haut point. Si cela ne tenait qu'à elle, la formation de la jeune femme aurait lieu à Trare. Cependant, Elfazelle doit avoir une vie sur Lüh, un emploi, peut-être. Tel déplacement ne contribuerait pas à son projet. Leur projet... Cette pensée demeure étrange. Pourquoi fait-elle ça? Pourquoi s'implique-t-elle dans ce genre d'entreprise? L'image de la baronne ne suffit guère à expliquer ce choix. Les raisons semblent ancrées plus profondément. La rouquine n'a jamais aimé s'attarder sur elle-même. L'introspection poussée, ce n'est pas son fort. Tant pis. Elle laisse ce flou de côté, pour l'heure.

Son pas ralenti un instant. Tandis que son esprit se projette désagréablement vers le passé. Elle prends quelques secondes pour répondre, brièvement. "Longtemps. J'avais peut-être 7... ou 8 ans, lorsque j'ai commencé." Le clan des Crocs-Noirs forgeaient ses guerriers dès leur plus jeune âge. Les habilités et dons révélés ainsi rapidement, octroyaient aux jeunes une orientation avisée dans une voie qui leur correspondait.


L'enseigne qui se découpe par dessus la foule l'arrache à sa mémoire avec un soulagement certain. Elle pousse le panneau, un bruit tinte délicatement pour avertir de leur présence. La future chasseresse dans son dos, Rymaïn s'avance vers les arcs exposés. D'un bref signe à la vendeuse, elle signale n'avoir pas besoin d'aide.

Le choix est assez restreint malheureusement, mais les armes demeurent de qualité moyenne à correcte. L'inconvénient se situe plus dans les compétences et la carrure actuelles de son... Élève. D'un geste, elle saisit une confection en bois de noyer, la soupèse un instant, puis tend une des cordes mise à disposition dessus. Elle bande l'arc en douceur, sa propre force étant assez conséquente, puis relâche la tension dans ses muscles et se tourne vers Elfazelle pour lui donner l'arme.

"Il te faut quelque chose de léger. Facile à bander en fonction de ta puissance. Peu importe la force de frappe pour l'instant. Toucher la cible est un objectif prioritaire." L'arc Loko qu'elle vient de lui tendre, afin qu'elle puisse en éprouver le poids et la maniabilité par elle-même, semble le plus adéquat pour débuter. Elle ne compte pas lui imposer ce choix pour autant, et attend de voir ses réactions comme sa propre analyse de l'arme.

Ses bras se croisent à nouveau sur sa poitrine alors qu'elle observe la jeune femme. Ne sachant qu'ajouter de plus. Légèrement mal à l'aise dans les échanges humains de façon générale. Ce n'est pas nécessaire de parler, non?

Cependant, elle se laisse finalement porter par les perspectives à venir dans le jours prochains. Son ton est moins froid, calme. "Nous irons à l'arène plusieurs fois par semaine, afin que tu t'exerces." Sa voix s'interrompt, songeuse, puis... "Je t'indiquerais également où je loge. Nous serons plus au calme là bas afin que je t'enseigne des éléments plus théoriques."

Elle ajoute, curieuse malgré elle, mais surtout par nécessité pratique. "Est-ce que tu as un emploi? Tu vis avec ta famille?" Ses lèvres se pincent subitement, brièvement. La seconde question est sortie d'elle-même, aussi étrange à ses oreilles que dans sa propre voix.

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En retournant la question de son nom à son interlocutrice, Elfazelle fut quelque peu surprise de la voir hésiter ; jusqu'à maintenant son ton avait très assuré.
La jeune femme lui lâcha un « Rym » rapide, comme pour clore au plus vite cette conversation.

« Etrange, il n'y a pas à hésiter sur son propre nom normalement...  Ceci dit, une chasseuse ne doit pas avoir que des amis, elle doit sûrement se méfier des inconnus. En tout cas, Rym sera facile à retenir. »

Toutefois, elle fit comme si elle n'avait rien remarqué. Il valait mieux éviter de mettre mal à l'aise son mentor dès le début de leur relation si elle ne voulait pas la faire fuir.

Lorsque Rym lui proposa de lui avancer de l'or pour l'achat d'un arc, Elfazelle se sentit un peu gênée. Elle aurait pu attendre plus longtemps pour en amasser un peu plus avant de partir, mais le passage des caravanes était très aléatoire et elle ne supportait plus de vivre dans ce village où elle ne se trouvait pas à sa place.
Cependant, la perspective de participer à sa première chasse réveilla son ambition.

« Elle se projette déjà à ma première chasse, c'est bon signe ! Enfin, je crois. »

Immédiatement après avoir demandé à la belle rousse si elle habitait ici, cette dernière fronça les sourcils et lui répondit sèchement par la négative.

« Bon très bien, pas de questions sur la ville. Tout le monde n'apprécie pas l'air urbain. »

Dans les romans qu'elle lisait, les chasseurs n'étaient pratiquement jamais dans une ville, trop occupés à traquer des monstres dans des forêts, des déserts, voire des grottes. Elfazelle trouva donc cela assez normal que son mentor fraîchement rencontré ne vive pas à la capitale.
Il est vrai que si l'on sait se défendre, il n'y a pas vraiment d'intérêt à se retrouver emprisonné avec une foule d'autres personnes au sein de murs d'enceinte. Autant profiter pleinement de sa liberté de pouvoir vivre au calme dans la nature.

L'interrogation d'Elfazelle sur la durée d'entraînement perturbait visiblement Rym, alors qu'elle pensait que sa question était tout à fait innocente.

« En fait, il faut que j'arrête mes questions, point. »

Ce n'est pas que le silence dérangeait Elfazelle, mais d'habitude elle n'avait même pas besoin de demander pour que les gens lui racontent des tas de choses personnelles. Elle pouvait alors s'adapter suivant ce qu'elle apprenait, et surtout éviter les sujets qui fâchent.
Mais sans base pour s'appuyer, il lui était difficile d'évaluer la situation.
En prenant connaissance de l'âge auquel Rym avait débuté, Elfazelle leva les sourcils en signe d'étonnement et aurait ouvert grand la bouche si elle ne s'était pas retenue.

« Elle a commencé si jeune ? Au village, même ceux qui se destinent à un métier de combat ne commencent pas si tôt. Elle devait habiter dans une région particulièrement hostile ou bien être issue d'une famille de combattants. »

Elfazelle commença à douter de sa capacité à réaliser son rêve, puis secoua rapidement la tête pour chasser cette mauvaise pensée.

« Avec de la volonté, on peut accomplir ce qu'on veut. Le point positif c'est qu'elle a beaucoup d'expérience, je ne pouvais pas tomber mieux pour débuter. Ce semi-divin a bien fait de m'encourager, j'espère que je le recroiserai un jour pour le remercier. »

Les voilà désormais arrivées à l'archerie. Rym fit signe à la vendeuse de s'éloigner, tandis qu'Elfazelle lui adressa un timide « bonjour » avant de suivre son mentor parti bille en tête vers l'étalage.
Elfazelle l'observa attentivement saisir d'un geste sûr l'un des arcs et évaluer ses caractéristiques d'une manière expérimentée.
Son examen terminé, elle tendit l'arc à Elfazelle, en lui conseillant une arme légère et précise, la puissance n'étant pas capitale pour débuter.
Elfazelle le prit comme une invitation à exprimer son ressenti sur cet objet.
Tenant l'arc posé à l'horizontale entre ses deux mains, elle fût assez surprise de la relative légèreté de l'objet. Elle le retourna ensuite à la verticale et reproduisit la position qu'elle avait vu nombre d'archers utiliser : la main gauche sur la poignée et les doigts de la main droite sur la corde.
Elle tendit le bras gauche et s'apprêtait à tirer de toutes ses forces avec sa main droite sur la corde pour pouvoir bander l'arc.
A son grand étonnement, elle n'eût pas besoin de forcer outre-mesure pour réussir à tirer la corde.
Rassurée, elle arrêta la pression sur la corde et plaça l'arc devant ses yeux pour le regarder d'un air satisfait.

« Cet arc pourrait effectivement me convenir. »

Selon l'affichage, il s'agissait de l'arc « Loko ».
Un autre attira son attention, car il était nommé « Sage ».

« S'il s'appelle comme cela, il doit sûrement être plein de qualités. »

Elfazelle reposa donc doucement le Loko sur son support et se dirigea vers le Sage.
Une fois entre ses mains, elle se rendit compte qu'il était un peu plus lourd que l'autre. Elle reproduisit les mêmes gestes que précédemment, mais dû forcer cette fois-ci pour réussir à le bander. Il allait lui falloir se muscler un peu plus pour pouvoir l'utiliser sans trop de difficultés.

« Je ne pourrai jamais viser correctement si j'ai du mal à tirer sur la corde. »

Elle reposa l'arme avec un air un peu déçu. Elle aurait bien aimé pouvoir dire que son arc était sage.
Elle regarda un peu les autres armes, mais aucune ne semblait aussi légère que la première qu'elle avait eu entre les mains.
De toute façon, elle n'allait pas toutes les essayer et son essai raté venait de la convaincre de suivre l'avis de Rym, qui venait de prouver son expérience en la matière.
Elle reprit le Loko, tira plusieurs fois de suite sur la corde et leva la tête vers la grande rouquine qui croisait les bras silencieusement.

« Je suis d'accord, cet arc semble m'être adapté. Et puis, cela n'a pas d'intérêt d'avoir un arc puissant si je n'arrive pas à viser avec. »

Elfazelle reprit la contemplation de sa future arme ; elle avançait vers son objectif et cet objet le rendait plus concret.
Cette fois-ci, ce fût Rym qui brisa le silence et le cours de ses pensées en l'informant du programme des jours à venir.
Elfazelle n'était pas certaine que parler de son logement soit une proposition à y rester, ou bien simplement l'indication d'un lieu pour qu'elle puisse lui enseigner la théorie au calme.
Elle profita donc des questions de Rym pour éclaircir ce point.

« Et bien, il était prévu que je sois bibliothécaire dans le village d'où je viens. Je comptais donc aller voir s'il était possible d'avoir un emploi à mi-temps à la bibliothèque de Lüh ; histoire d'avoir de quoi vivre en attendant d'achever mon entraînement, car je suis venue seule ici. Si ma famille avait eu connaissance de mon projet, elle m'aurait probablement enfermée à double tour en espérant que l'idée me passe. »

Elfazelle le dit sur un ton amusé, mais elle n'avait aucun doute que l'histoire se serait déroulée plus ou moins de cette manière.
Elle sentit tout de même le besoin de se justifier auprès de celle qui allait désormais lui consacrer une bonne partie de son temps, comme pour lui montrer que, non, devenir chasseuse n'était pas qu'une passade.

« J'aime beaucoup les livres, mais j'ai envie de vivre mes propres aventures plutôt que par procuration. Ma famille ne comprendrait pas, leur esprit est trop étroit pour envisager faire autre chose que ce qu'ils ont toujours fait. »

Le sourire sur son visage s'était maintenant effacé pour laisser place à des traits figés et inexpressifs, les yeux un instant perdus dans le vague.

Elle reprit d'une voix posée : « Bref, je n'ai pas encore entrepris de chercher un logement - au pire, il y a toujours la taverne – mais ce serait peut-être plus simple que j'habite pas loin du vôtre ; vous savez s'il en reste de disponible ? ».

Elle essaya de rester la plus neutre possible ; elle ne voulait pas que Rym se sente obligée de l'inviter chez elle, ni de l'aider à trouver un endroit où dormir. Elle se trouvait déjà assez redevable comme ça, et arriverait bien à se dénicher un coin vu le nombre d'habitations dans la capitale.

« Au fait, ce n'est pas grand chose, mais je tiens à payer la moitié du prix de cet arc, comme gage de ma bonne volonté. J'irai vendre cette dague à l'armurerie en sortant ; de toute façon, à part couper la viande, elle ne me servirait à rien... » dit-elle en souriant. Elle le pensait vraiment et, même après un entraînement, la dague constituait une arme de combat bien trop rapproché pour qu'elle puisse espérer se défendre avec.

N'attendant pas de réponse, Elfazelle continua assez enjouée :
« Vous avez vu, il y a une promotion en plus ! Un carquois de bois et 10 flèches simples offertes ! Ce devrait être suffisant pour commencer. »

Se dirigeant vers la vendeuse, Elfazelle demanda d'abord l'approbation de Rym :« Donc, un arc Loko, 10 flèches simples et un carquois de bois ? »

Elle commença ensuite à préparer ses 180 Tsuris, correspondant à la moitié de la somme qu'elle avait l'intention de payer.

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Un coeur sauvage pour une âme en quête de savoirs

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La jeune femme soupèse l'arme, avant de bander la corde avec une certaine facilité. Elle est droitière, tandis que Rym tiens son arme de façon inverse. Mais cela importe peu la rouquine dotée d'une ambidextrie naturelle. Bien qu'apparemment satisfaite, Elfazelle repose néanmoins l'arc pour se saisir d'un autre. Possède-t-elle un instinct particulier ou est-ce là pur hasard? La voix de la nordienne se délie calmement en l'observant bander l'arme avec plus d'efforts.

"C'est probablement l'arc le plus équilibré et intéressant qu'ils vendent." Ses prunelles suivent les mouvements de son vis-à-vis, qui repose l'objet avec, semble-t-il, une pointe de déception. "Avec de l'entraînement tu pourrais envisager d'en acquérir un de ce genre. Mais si tu possèdes plus d'or d'ici-là, je te suggère d'en faire réaliser un qui te soit personnellement adapté... Faire vraiment corps avec son arme porte autrement nos capacités."

Étrange. Les mots lui viennent, sans lui appartenir, pourtant elle se les approprie naturellement. Le maître d'arme du clan l'a forgée aussi bien dans la pratique que la théorie, au fond... Cette dernière relevant davantage d'expériences propres que de livres inutiles cependant. Distraite un instant, elle revient aussitôt à la jeune femme devant elle.

Chercher un emploi est une bonne chose. Mais un travail à temps partiel de ce genre, pour vivre à la capitale, ne suffira amplement pas. Soudain submergée par les informations personnelles qui s'égrainent, elle regrette presque d'avoir posé des questions et se fustige intérieurement. Mais est-ce réellement cet étalage qui l'indispose? Ou l'écho qui résonne au travers de ses propos? '...leur esprit est trop étroit pour envisager faire autre chose que ce qu'ils ont toujours fait.'

L'image de sa mère en train de s'escrimer à lui faire manier une épée aussi parfaitement qu'elle vient chatouiller désagréablement sa mémoire. Cette pensée ramène d'autres souvenirs, plus récents. Un duel sous une chaleur grandissante. Est-ce cela qui la pousse? Inconsciemment... Comme un aimant, vers une totale inconnue, les résonances qui se multiplient au fur et à mesure, sans qu'elle ait pu les voir venir? Rymaïn fronce les sourcils pour se dégager de son esprit et revenir à la situation présente.

Enfin. Partiellement. Cette histoire de livres et d'aventures lui arrache un pincement de lèvres. Puis un soupir, à sa propre encontre. Il y a quelques semaines encore, ce détail aurait suffit à lui faire tourner les talons. Mais elle s'est bien trop laissée piéger par ce genre de niaiseries, d'une toute autre façon, et dans d'autres domaines, pour se permettre d'apposer un jugement quelconque. D'autant que le sourire éteint et les traits figés de la future chasseuse paraissent indiquer qu'il vaut mieux ne rien dire. Quoi qu'il en soit, Rymaïn n'est pas douée pour ce genre de situation, elle fera nettement moins de dégâts en gardant le silence.


...Dormir à l'auberge ou trouver un logement à Lùh? La rousse ferme les yeux l'espace d'une seconde en secouant doucement le fief. Puis recentre son regard olive sur la brune. Celle-ci ne lui laisse pas le temps de réagir, enchaînant. Chaque donnée énoncée s'infiltre dans sa mémoire, elle décide de les y stocker afin de faire le tri progressivement et se laisse porter pour l'heure.

Ses doigts glissent dans son sac sans fond, à la recherche d'une petite bourse d'or. D'un geste de la tête, elle acquiesce à la proposition d'Elfazelle et retire vingt tsuris du contenant, avant de lui donner celui-ci, qui en compte maintenant la moitié du prix à payer. Son enthousiasme débordant vient la bousculer, sans qu'elle n'en laisse paraître la moindre trace. C'est là une forme d'énergie dans laquelle certains puisent aisément, mais dont elle n'est pas coutumière. Jusqu'à peu, la rage et la colère constituaient ses principaux moteurs.

Elle hoche vaguement en réponse à ses dires et la laisse approcher la vendeuse. Certes la dague n'est guère utile pour l'instant, mais une arme de poing deviendra vite nécessaire. Il y a tant de choses à penser... La rouquine souhaite néanmoins en régler deux qui lui paraissent urgentes. Et lorsqu'elles sortent de l'archerie, elle s'adresse à la jeune femme tout en l'incitant à la suivre.

"Tu ne trouveras aucun logement accessible avec si peu d'or en poche ou un travail partiel. J'ai peut-être une alternative à te proposer pour dormir, mais d'abord, quittons cette foule." Le timbre se durcit vers la fin. Davantage à l'égard du bruit et du monde, qui l'irritent et l'épuisent. Les deux jeunes femmes s'éloignent, dans un silence relatif.

La nordienne n'est pas fermée à la discussion, même si son non-verbal laisse souvent entendre le contraire. Simplement, elle n'aime pas prendre la parole et parler d'elle-même. Pour dire quoi? La communication demeure un vaste domaine social encore trop compliqué et hermétique à ses yeux, malgré une nette amélioration depuis ces derniers temps.


Le quartier populaire se dessine à l'horizon de la large rue pavée qu'elles arpentent. La guerrière aux masses oblique vers la gauche et emprunte une ruelle qui débouche sur un parc de taille modeste, au coeur du quartier. Sans trop se soucier qu'elle mène un peu la petite brune où bon lui semble depuis un moment. Sans trop y penser, en réalité. Un peu perdue, dans ses propres démarches. Son pas se stoppe devant un banc de pierre, où elle ne s'assied pas. Son corps pivote vers Elfazelle, ses bras se croisent, son visage penche un rien sur le côté avec un sérieux qui lui donne rarement l'air rassurant. Contre son gré, cependant.

"Les livres et la réalités sont bien souvent séparés par un abîme." Le sujet revient, non pas pour la critique, mais davantage pour s'assurer de certaines choses. Peu importe le domaine, le réel n'est jamais aussi agréable et aisé.

"As-tu déjà vu ou subit l'attaque de créatures de l'île? Ton village ou ses chasseurs ne sont probablement pas à l'abri de tels écueils, as-tu conscience du danger que représente l'extérieur? Plus particulièrement pour les chasseurs?"

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Après avoir reposé l'arc Sage, Rym lui indiqua qu'il serait préférable de s'en faire confectionner un sur mesure quand elle aurait un peu plus d'or. Nul doute qu'il s'agissait d'un conseil très pertinent qu'Elfazelle ne manquerait pas de suivre quand elle le pourrait.

« A moins que mes recherches ne permettent de mettre au point une arme encore plus adaptée qu'un arc... »

La grande rouquine reste ensuite silencieuse et ne réagit pas à sa question sur les potentiels logements disponibles.
Elfazelle n'attendait pas spécialement une invitation, mais était un peu contrariée de parler à un mur.

« Je vais prendre ça pour un non. »

Toutefois, malgré son mutisme, Rym sortit tout de même une bourse de son sac lorsqu'Elfazelle lui proposa de partager les frais, ce qui lui procura un grand soulagement. Même si elle n'avait pas les moyens de s'offrir cet arc, elle pouvait a minima avoir l'honneur sauf en payant une partie.
Elle n'en laissa rien paraître et déposa l'or sur le comptoir.

« Voilà pour un arc Loko, un carquois de bois et 10 flèches simples. »

Il n'était pas vraiment nécessaire de le répéter car la boutique n'était pas très grande ; d'autant plus que la vendeuse les observait depuis qu'elles avaient passé le seuil de la porte. Mais Elfazelle souhaitait être certaine qu'il n'y ait pas de malentendu.
La commerçante semblait ne pas très bien comprendre le manège qui se déroulait sous ses yeux avec ces deux femmes qui ne paraissaient pas très proches mais partageaient le prix d'une arme. Elle afficha néanmoins un sourire de façade et pris les Tsuris devant elle en remerciant Elfazelle.
Elfazelle ramassa donc la marchandise, fourrant les flèches la tête en bas dans le carquois, qui semblait le plus logique, et tenant l'arc à la main, ne voulant pas perdre de temps à essayer de le faire tenir dans son dos.

« Je ressemble déjà un peu plus à quelque chose ! »

Un sourire de satisfaction s'afficha sur son visage.

« Merci madame, passez une bonne journée. »

Rym n'avait toujours pas pris la peine d'ouvrir la bouche.

« Je n'ai jamais rencontré quelqu'un d'aussi silencieux ; difficile de la cerner... Elle n'a même pas dit au revoir à la dame... Si ! Je sais qu'elle n'aime pas les questions, c'est déjà ça. »

Une fois sorties de la boutique, Elfazelle avait prévu d'aller vendre sa dague, comme  annoncé dans la boutique. Cependant, contre toute attente, sa mentor se décida à parler et lui indiqua, avec un peu de retard, qu'elle aurait peut-être une solution pour se loger à moindre coût, car un travail partiel ne suffirait pas.
Sur ce, la brunette eût à peine le temps de comprendre sa proposition qu'elle se trouvait déjà entraînée en dehors des rues mouvementées.
« Elle exagère, il doit bien y avoir des chambres avec le confort minimum qui soient abordables, non ? »
La perspective de ne pas gagner les fonds nécessaires pour rester à Lüh commençait à l'inquiéter.
« Pas question que je retourne là-bas ! »

Suivant inconsciemment les pas de Rym, elle murmura à elle-même « Mais... et ma dague... »
Elle tourna la tête pour estimer la distance de l'armurerie, mais n'arrivait pas à la distinguer.

« Tant pis, je reviendrai plus tard. En plus, Rym a l'air d'avoir un plan, je ne vais pas l'interrompre avant d'en savoir plus ; elle pourrait changer d'avis sinon. »

Elfazelle continua donc à suivre la chevelure flamboyante devant elle, et attendit patiemment qu'elle lui donne plus d'informations.
Elle n'avait aucune idée de l'endroit où elle était emportée. Après quelques instants de marche, elle se mit à apercevoir un parc au loin.
Elle échappa un soupir de soulagement :
« Enfin un peu de calme... »

Le bourdonnement dû à l'agitation de la rue commerçante était assez loin maintenant. Elle ferma les yeux un instant une fois à l'intérieur du parc en inspirant profondément, profitant de ce moment de quiétude.
En les rouvrant, Rym avait fait volte face et elle se retrouva face à une posture fermée, voire un peu inquiétante.
Celle-ci lui annonça que les livres et la réalité étaient séparés par une abîme.

« Ah, je comprends... C'est vrai que je dois avoir l'air un peu trop optimiste. En même temps, c'est elle qui a dit qu'il fallait avoir confiance en soi. »

Avant qu'Elfazelle n'ait eu le temps de formuler sa pensée pour donner son point de vue, elle se retrouva en plein interrogatoire, comme pour vérifier qu'elle avait bien conscience que chasseuse était un métier dangereux.
Cela l'agaça légèrement ; ses sourcils commencèrent à se froncer et ses muscles s'étaient quelque peu tendus.

« Bien sûr que je le sais ! C'est justement pour ne plus être obligée de me cacher sous mon lit comme une petite fille que je veux devenir chasseuse ! »

En effet, lorsqu'elle avait environ 10 ans, un monstre conséquent avait réussi à pénétrer dans l'enceinte du village. Elle n'avait pas vraiment compris comment c'était arrivé, les monstres de ce type étant facilement repérables de loin par les chasseurs, qui leur réglaient leur compte bien avant qu'ils ne puissent s'approcher de la muraille du village.
Il faisait nuit et elle n'avait pas bien vu de quoi il s'agissait, mais elle se souvenait très bien de la sensation de peur qui l'avait envahie une fois la source des agitations identifiée.
Terrorisée, elle se réfugia tremblante sous son lit en attendant que la menace soit écartée.
Elle ne voulait plus jamais se sentir aussi faible et inutile ; peut-être était-ce cet événement qui l'avait poussée à dévorer tous ces récits sur les chasseurs ?
Les images de cette nuit lui revinrent à l'esprit alors qu'elle cherchait ce qui l'avait poussée sur cette voie.

« Que vais-je bien pouvoir lui répondre ? Je ne peux pas lui raconter mon piètre comportement lors de cette rencontre, j'ai tellement honte... »

Elle se détendit un peu en observant le sol avant de fixer le regard olive posé sur elle. Puis, sentant la pression monter car cela faisait un moment que le silence régnait, les mots sortirent sans qu'elle n'y ait vraiment réfléchi :

« Je... ne veux plus avoir peur ! »

Si le début de sa phrase était assez hésitant, la fin avait été prononcée sur un ton déterminé.
Au fond, ce n'était pas la seule raison, mais ce fût la première qui lui vint à l'esprit quand elle se revoyait paralysée sous son lit.
Elle reprit de façon moins intense, mais en gardant son sérieux :

« Bien évidemment, la mort est toujours possible, et elle nous rattrapera tous un jour, mais j'aimerais être suffisamment préparée pour l'éviter encore quelques dizaines d'années... et rester en un seul morceau aussi. Peu importe si des cicatrices sont à la clé, tant que je pourrai goûter un peu à la liberté. »

La liberté d'aller où bon lui semble ? De ne plus être prisonnière de ce corps frêle et inutile ? Elle ne savait pas exactement...
La seule évidence à ses yeux était qu'elle ne pouvait plus vivre comme elle l'avait toujours fait, elle avait besoin d'autre chose.


« Inventaire : 300-180= 180 Tsuris, + 1 arc Loko + 10 flèches simples + 1 carquois de bois »

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Arrivée à Lüh
Un coeur sauvage pour une âme en quête de savoirs

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Un silence accueille ses propos. Le visage de la jeune femme affiche des sourcils froncés, bien que la nordienne n'y accorde aucune réelle attention. Elle décode avec peu d'aisance le non verbal, surtout en terme de subtilités. Seules les agressions relativement perceptibles aiguisent ses sens comme ses réactions. Par ailleurs, son questionnement s'avère des plus pragmatiques, tout comme elle. Le souhait d'évaluer la situation, l'état d'esprit et de lucidité de sa future disciple, prime sur une quelconque forme de critique ou d'à priori. Seuls les faits l'intéressent, elle cherche à mieux cerner ce qui va devenir un partage quotidien.

Les prunelles qui balaient le sol depuis un court instant reviennent s'ancrer aux siennes. Comme après un moment de réflexion, que la rouquine à laissé planer avec patience. Malgré une voix hésitante au départ, le désir est clair. Imprimé. Probablement déjà profondément ancré à un passif auquel Rymaïn ne possède nul accès. Mais c'est sans importance.

Ses lèvres demeurent scellées, car son interlocutrice poursuit. Son ton sérieux ne laisse pas de doute, renforce l'intuition de la nordienne. Vient toucher du bout des doigts une corde de son esprit lorsque la quête de liberté éclot. Le regard olive fuit discrètement, un feuillage dense en devient l'écrin momentané, furtivement, avant qu'il ne se recentre sur la petite brune. Le timbre de la guerrière aux masses se délie avec fermeté, mais sans agressivité. Étrangement calme.

"Bien. Dans ce cas, je t'apprendrais à maîtriser ta peur."

Ses muscles se relâchent alors qu'elle décroise ses bras. Sa gestuelle s'adoucit, presque, du moins. D'un signe de la main elle l'incite à la suivre. Sans vraiment se retourner, elle ajoute. "Quant à la liberté... Garde à l'esprit que le moindre aspect de ta vie peut te la retirer." Elle s'interrompt, hésitante, avant d'exprimer un ressenti personnel. Une note mêlée de mélancolie et d'amertume dans la voix. "C'est une lutte permanente, parfois, face à des adversaires que nous n'avons pas toujours le désir de combattre ou de blesser..."

Des bribes de souvenirs encore très récents s'immiscent, mais elle les écarte aussitôt, tâchant de rester ouverte à la personne qui la suit. Ainsi qu'aux perspectives, peut-être imprévisibles, que leur collaboration annonce.

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Elfazelle n’avait pas réussi à exprimer aussi pleinement qu’elle l’aurait souhaité toutes les raisons qui l’avaient poussées à changer drastiquement de vie. Un court instant s’écoula, sûrement le temps d’assimiler ses paroles, avant que Rym ne lui réponde.
Néanmoins, nulle critique ne fût prononcée ; au contraire, sa mentor semblait commencer à se projeter dans son nouveau rôle.
Ses mots comme son attitude suggéraient un avis spontané ; cela rassura Elfazelle qui se détendit quelque peu.

« Est-ce que la peur s’en ira d’elle-même lorsque j’aurais atteint un niveau assez bon pour me défendre ? Ou bien aurais-je besoin d’un entraînement spécifique ? »

Cette question risquant de sembler idiote, elle attendrait un moment plus propice pour être posée. Peut-être après quelques séances d’entraînement, quand elle aurait plus confiance en elle.
Comme en miroir, Rym sembla également se détendre. Était-ce une synergie qui commençait imperceptiblement à se mettre en place ?
La rouquine l’arracha à ce sentiment fugace de calme en se mettant en mouvement et en lui disant, l’air de rien :

« Quant à la liberté... Garde à l'esprit que le moindre aspect de ta vie peut te la retirer. »

« Ces mots ont un sens en eux-mêmes, mais que veut-elle dire par là ? J’ai l’impression qu’elle a des idées bien spécifiques en tête. »

Les yeux couleur noisette se posèrent sur la chevelure de feu comme s’ils cherchaient une réponse dans les reflets orangés.
L’intuition sembla se confirmer lorsque, sans se retourner, la voix précisa ses pensées avec un ton plus… triste ?
Elfazelle se rapprocha dans l’optique avoir accès à son visage pour mieux décrypter ses émotions.
Rym n’a pas donné plus de détails le temps de ces quelques pas, ce qui décida la brunette à prendre la parole.
Elle prit un ton assez doux et pencha légèrement la tête sur le côté, les bras tombant sur ses mains jointes devant elle.

« Je suis désolée, je ne suis pas certaine de bien comprendre… Je conçois qu’une personne à qui on est attaché pourrait avoir des envies différentes, et qu’on doive faire des compromis pour la garder dans notre entourage, ce qui pourrait s’apparenter à une perte de liberté… Mais s’il s’agit d’un adversaire, pourquoi ne pas vouloir le blesser ? »

Semblant percevoir des yeux fuyants, Elfazelle ajouta immédiatement, en levant légèrement les mains et en parlant rapidement :

« Ne vous sentez pas obligée de répondre si c’est trop personnel, c’est simplement que je… »

Elle n’avait pas eu le temps de réfléchir à la fin de sa phrase qui s’évanouit dans l’air, et se retrouva donc sans savoir comment conclure. Elle détourna son regard et laissa passer un instant en espérant que Rym lui réponde, car elle n’était pas certaine des raisons qui l’avaient poussée à ce questionnement.

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Arrivée à Lüh
Un coeur sauvage pour une âme en quête de savoirs

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Les mots de la future chasseresse la percutent plus brutalement qu'elle ne l'aurait imaginé. C'est probablement... Un trop grand pas en avant. Qui vient déceler une réalité inconsciente. Dérangeante. Pointant avec précision une relation bien trop complexe. Et la rouquine rebrousse littéralement chemin en son esprit. Son corps s'en fait miroir, son pas stoppe net. Les prunelles olive s'aventurent, fugitives, vers un ciel clairsemé de nuages. Dotée de toute sa subtilité sociale, la nordienne pose une main sur son front, dissimulant son visage, alors qu'elle croise son autre bras sur sa poitrine dans une attitude manifestement fermée.

Une pointe de froideur teinte à nouveau le timbre de sa voix. A l'adresse de qui? Son vis-à-vis? Elle-même? Cela n'a pas réellement d'importance. Une réaction protectrice prend aussitôt le dessus de façon cassante. "Oublie cela. J'ignore même pourquoi je te dis ce genre de chose. Je... " Une brève hésitation. Un malaise. Rapidement dérobé au regard d'Elfazelle, qui ne perçoit plus qu'une façade déterminée, voire un rien indifférente. "...Je ne possède pas de réponse. Trouves donc les tiennes par toi-même." L'agressivité s'effrite partiellement vers la fin de son propos, tandis qu'elle reprend la route et dépasse d'un pas vif la jeune femme.


La rue qu'elles arpentent désormais monte légèrement. Sans le réaliser, la rousse met de la distance entre elles. La crainte de s'enliser dans ses pensées rôde aux abords de son esprit avec bien trop de netteté en cet instant. Un peu trop égarée par cette réflexion, son épaule percute le dos d'un homme qui s'affale maladroitement au sol suite au choc.

Ce dernier se relève en grommelant et en jurant. Il n'est pas grand. Plutôt trapu. Des petites billes d'un bronze délavé caractérisent son regard cerné. Se posent sur la silhouette plus haute et plus imposante que constitue la nordienne. Une marque violette sur son visage laisse sous-entendre ses origines nordiennes... Rymaïn oblique furtivement du fief pour avoir une idée de la position d'Elfazelle, avant de porter une main dans son dos. La poignée d'une dague ceinte à l'oblique de sa ceinture rencontre sa paume assurée.

L'homme lève instinctivement les bras en signe de paix. La voix un peu rapide, il débite quelques mots.


« How! Calme, calme. C'est vous que j'attendais m'dame. Sans aucune mauvaise intention. J'dois vous remettre ceci, en mains... Propres, si on peu dire, héhé. »
Il tend un parchemin scellé par un sceau que les iris méfiants ne reconnaissent guère. Sceptique, la guerrière ne le saisit pas et offre un regard mauvais à l'individu. Peu à ce jour connaissent sa réelle identité et cela ne lui plaît aucunement. Sa voix amère filtre de façon détachée, une grondeur latente accompagne cette dernière.

"Et à qui, précisément, dois-tu transmettre cette missive, l'homme?" Il se redresse un peu plus et fait un pas en avant, puis penche la tête sur le côté. Mimant la discrétion en voulant s'approcher de l'oreille de son interlocutrice, bien que son timbre se fait des plus audibles. Et tout aussi dédaigneux que sarcastique. Profitant de sa position, il jette furtivement un oeil curieux et intéressé à la jeune brunette qui se tient non loin d'eux.


« A l'héritière des Croc-Noirs... Ou du moins, de la cendre et des os pourrissant qu'il en reste, ah ah a...Argh! »
Son nez pété par le poing qui s'est refermé une seconde plus tôt sur le dit parchemin, le gaillard se plie en deux en gémissant. Le fiel qui s'égraine de la bouche de la nordienne est aussi glacial que la mort. Bas, mais clair.

"Hâte toi de partir petit homme, si tu ne veux mieux cerner la réalité des restes de ces Crocs pourrissant."

Sans le demander, son reste, il grogne, ose à peine un rictus, avant de déguerpir prestement. Rymaïn tâche de garder son sang-froid tout en brisant le sceau du parchemin froissé. Les premiers mots, ou plutôt, la fine écriture qui s'en délie, désagréablement familière, interrompt sa lecture. Le papier se froisse à nouveau dans sa main, pour ensuite rejoindre le fond de son sac. C'est déjà un miracle qu'elle ne le brûle ou ne le déchire pas purement et simplement.


La présence discrète d'Elfazelle se rappelle soudaine à elle. Son regard accroche brièvement le sien, s'en détache, et reprend sa course au même titre que ses bottes qui talonnent les pavés avec une brutalité presque perceptible. "Nous ne sommes plus très loin." Son ton neutre tâche d'opérer une scission entre les différents événements. Pas la peine d'inquiéter la jeune femme... Enfin. Rymaïn n'a pas vraiment grand chose à faire pour susciter naturellement de la perplexité et de la défiance chez autrui. Peut-être que cet accrochage aura raison de la motivation aveugle de sa disciple en devenir? Un fin soupir s'extirpe de ses lèvres désabusées.

Effectivement, après une dizaine de mètres supplémentaires, une bâtisse modeste mais d'excellent facture architecturale se présente à elles. Rymaïn s'arrête, puis se tourne vers la petite brune qui n'a pas soufflé un mot -pas osé, éventuellement? - depuis un petit moment.

"Si tu as toujours la volonté de me suivre, reste. Sinon, c'est maintenant qu'il faut partir." Autant lui accorder un nouveau moment de réflexion. Par ailleurs, elle ne souhaite pas entraîner une girouette qui se pose bien trop de questions et change d'avis d'un jour à l'autre en découvrant la personne qu'elle a décidé d'accompagner.

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