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L'avantage de vivre avec sa famille était le moment du réveil. Qu'il y avait-il de plus beau que de s'éveiller de bon matin avec les chuchotements d'une sœur aimante, et le parfum d'un petit déjeuner sortant tout juste du four? Merveilles et voluptés que tout cela, dommage que chez les Torn, la norme était bien différente. Il eut tout juste le temps d'entendre le cliquetis des volets avant que ceux-ci ne s'ouvrent brutalement, invitant le jour et tout ses enfants lumineux dans la chambre du pauvre endormi. Pas la moindre explication, pas même un bisous sur la joue, sa petite sœur l'avait réveillé d'une façon horriblement cruelle, sans aucun remord. Au contraire, son visage d'ange portait l'épanouissement du malfaiteur : le sourire narquois du criminel.

M'enfin, si ce n'était pas la meilleure façon de commencer une journée, notre héros fit contre mauvaise fortune bon cœur, d'autant que lui même avait déjà fait le coup plus d'une fois à sa frangine. Et d'ailleurs cet acte n'était pas totalement gratuit, puisqu'une lettre marquée du sceau de l'Ordre l'attendait sur le comptoir de l'auberge. En général, les Chasseurs se procuraient eux-même leurs missions, mais cela ne signifiaient pas qu'ils étaient totalement individualistes. Une organisation fédérait tout ceux désireux de titiller la faune d'arcane. Celle-ci étant déjà suffisamment coriace, inutile de la nourrir avec quelques chasseurs imprudents non? Aussi, malgré la relative indépendance qu'offrait ce corps de métier, cet organisme s'assurait tant bien que mal qu'aucune chasse ne reste trop longtemps irrésolue.
Arold avait déjà entendu parlé de ces fameux Mucors, et comme beaucoup de ces collègues, il avait refusé net de se frotter à ces crapauds malodorants. Hélas quelqu'un devait y faire face, et il s'avérait que notre héros était plus jeune dans la profession. Il avait autant besoin de Tsuris que de reconnaissance, et répondre à un appel de l'Ordre était sans doute une bonne solution. Oui, il allait le faire, mais ça ne sera pas sans prendre un copieux petit-déjeuner, et un très long bain.

Quelques heures plus tard, notre aventurier en herbe s'approchait de la taverne. Pour le remercier de son effort, l'ordre lui avait fourni une monture, et quelques vivres pour assurer sa mission. En vérité le tout devrait être résolu en quelques heures, mais même à dos de Variquan, un voyage hors des murs n'était jamais chose aisée. Toute sorte d'imprévue pouvait frapper, et c'est pourquoi Arold ajouta à son équipement un nécessaire de camping, une corde, et une trousse de premier secours.
Sécurisant autant sa monture que son matériel à un anneau, il entra lui aussi dans la taverne. Comme toujours, celle-ci ne désemplissait pas, et même de bon matin on pouvait entendre le bruit des choppes, et capter l'odeur de bière fraîche. Le Torn avançait directement vers le comptoir à mission, cherchant des yeux l'intriguant partenaire pour sa mission du jour. En général il se serait contenter de beugler son nom, mais pour le coup, il avait un partenaire de marque. Oui, ce n'était pas tous les jours qu'on faisait équipe avec un membre de la garde dorée, et il fallait se comporter en conséquence.

"Hum, je présume donc que vous êtes la Garde dorée envoyée à notre secours."

Non seulement il l'avait reconnu par ses habits, mais en plus Arold avait surpris les questions de la demoiselle. Ainsi donc elle sera sa partenaire, et alors qu'il contemplait à la fois l'équipement et la prestance d'une guerrière de cet ordre glorieux, il eut une pensée pour son propre équipement. Le mélange de cuir et de métal lui servant d'armure faisait sûrement bonne impression auprès d'autres chasseurs, mais il se sentait presque grotesque aux côtés de la jeune femme. Non, ce n'était pas le moment de douter. Tentant de chasser son embarras, notre bellâtre repris la parole.

"Arold Torn, enchanté. Vous n'avez peut-être pas eu l'information, mais je suis le Chasseur qui vous accompagnera pour cette mission. Je suis bien conscient que la Garde doré a sans doute mieux à faire, mais nous apprécions humblement votre aide. D'ailleurs ne vous inquiétez pas, ces Mucors ne devraient pas poser trop de problème pour des guerriers tels que vous."

Ce léchage de bottes était plutôt inhabituel, mais pour sa défense, Arold venait de rencontré un des héros de son enfance. Depuis, son engouement pour la Garde Doré avait diminué, mais un profond respect pour cet ordre n'était pas moins ancré en lui. Alors évidemment, maintenant qu'il devait prêter main forte à l'un d'entre eux, on pouvait lui pardonner son verbiage enjolivé. D'ailleurs il se rendit rapidement compte qu'il parlait un peu trop, et son regard se tourna rapidement vers le tenancier. Sa voix se fit plus calme, l'excitation enfantine laissant place à l'assurance du Chasseur.

"Pardonnez mon interruption. Vous disiez?"