Sa gorge se serra à l’idée même d’imaginer ce qu’elle aurait pu subir en échouant l’épreuve de Winglece. Ses prétendants n’avaient pas survécu à leur échec et c’était là sans doute la seule chose auxquels ils pensèrent lorsque la mort les accompagna dans son antre. Sont-ils morts rapidement ou à la suite de longues heures d’agonies ? Elle ne souhaitait pas y penser. Pas plus qu’elle ne voulait songer à ce que Winglece pouvait être. Tout être était armé de bonté et de méchanceté, prêt à découvrir le monde. Elle ne pouvait rien faire pour les malheureux morts en tentant les épreuves de l’invocation. Elle se consolait d’avoir survécu et d’avoir éviter d’autres pertes humaines. Le plus étonnant était sans doute le fait qu’elle seule ait réussi là où tout le monde avait échoué. Cela pouvait n’être que flatteur, et pourtant, si un fin sourire étirait son visage de poupée elle pensait qu’il était mauvais de penser de telles choses alors que tant de familles avaient dû être déchirées.
« Je tâcherai d’être digne de vos attentes. » répondit-elle simplement.
Elle-même n’était pas comme l’avait décrit Winglece, peut être était-ce pour cette raison qu’il avait accepté de faire d’elle son invocatrice. Bien d’autres l’étaient cependant et elle repensa aux raisons de sa décision quand l’opportunité de ne plus revenir à Calameth lui était présenté. Les inégalités, la soif de pouvoir, les lois du marché, tout ce qui était discutable voire naturel dans les villages de l’Ile d’Arcane était pour Luce une véritable malédiction. Elle était loin l’utopie que Pétronille lui contait avant de s’endormir. Elle était loin la prairie verdoyante dont la rosée, comme mille perles scintillaient au soleil. Elle était loin la population bienheureuse de vivre de ses propres moyens. Elle était bien plus loin l’alliance des Invocations et des Hommes comme des frères d’âmes. Sans doute trop loin des yeux de l’enfant pour paraître réelle.
Au loin, bien que le jour semblait tomber pour laisser place à l’obscure nuit des derniers temps d’hiver, ils virent les traits d’un village. Calameth n’était plus bien loin à présent.
« Là-bas, Winglece. Il s’agit de notre destination, nous ne devrions plus tarder à présent, nous pourrons nous reposer au manoir. N’oublie pas de prendre une forme plus petite dès que nous franchirons les portes, il te sera difficile de traverser les quartiers sous ton apparence originelle. »
A ces mots, les deux compagnons suivirent la route les menant vers leur destination.
[RP A SUIVRE]