La gourmandise est un vilain pêché dit on, un vilain pêché qu'il faudra confesser disait une mère supérieure d'un ancien couvent. Laissez moi rire ! Néanmoins j'étais entièrement d'accord sur le fait que ce n'est pas forcément une bonne chose que de céder à la gourmandise. Manger sans avoir faim ou avoir besoin de faire du gras n'est en effet pas une bonne chose pour la nature : c'est du pur gâchis ! Tuer pour une raison aussi idiote que de satisfaire un individu gourmand est une forme d'insulte envers la nature. Vous l'aurez compris, je déteste ces humains qui gâchent de la nourriture.
Je vous accorde un petit détails : si je suis mes paroles je ne devrais pas manger puisque je n'en ai pas besoin pour survivre. Ce n'est pourtant pas parce que je suis immortelle que je ne ressens pas le plaisir de dévorer un sanglier roti au miel avec de jolies petites pommes de terre ou un délicat filet de sole pané façon meunière avec un risotto au fromage. Je vous mets au défi de résister à l'attrait d'un cochon sauvage bien gras offrant la promesse d'os croustillant, d'un sang chaud bien épais et d'une viande délicieusement salée après des centaines d'années d'enfermement sans aucune nourriture. Pfouah je me suis interdit de penser à ce genre de plat dans ma cellule pour ne pas baver rien que d'imaginer l'odeur d'un poulet dorant dans un four... Et croyez moi lorsque ce genre de réflexe pavlovien est déclenché chez un dragon de ma taille, la quantité de bave produite est suffisante pour noyer certains êtres vivants.
Je me fiche royalement de savoir combien de temps je passais au sein du temple de la terre occupée à son étude que ce soit du domaine de l'architecture ou de la magie. Je devais me rendre dans le nord pour répondre au rendez-vous avec cet homme étrange mais je n'étais pas pressée. C'est pourquoi je m'autorisais à céder à la gourmandise. Prenant mon envol j'atteignis facilement une grosse centaine de mètres d'altitude. Le soleil tombait à l'ouest, il se couchait, nous étions au crépuscule. Dans quelques dizaines de minutes je bénéficierai à la fois d'un avantage et d'un inconvénient : Je serait presque complètement invisible naturellement mais l'obscurité permettra aux proies de se camoufler.
Il me fallut quelques minutes pour repérer un famille de cochon sauvage grattant le sol au sein d'une prairie non loin de la route dissimulé par une cinquantaine de mètres de forêt. J'effectuai un large virage pour placer le vent de mon côté puis je descendis au ras des arbres, ignorant complètement les voyageurs humains sur le route. De ce point de vu, mon virage et mon choix de descendre fut bien sur un spectacle mais je disparu... Puis franchi la route à très basse altitude et haute vitesse provoquant ce que les anciens appelaient un tonnerre de dragon : c'est à dire le bruit et le déplacement d'air de mon vol. Ma proie n'eut pas le temps de comprendre ce qui lui arrivait : j’apparus soudainement. Ma proie, un gros mâle, mourut aussitôt après son sursaut. Je senti un choc sur ma queue et laissais le reste du groupe prendre la fuite. Savourant le moment ou l'énergie redescente après la tempête de la chasse, je jetais un coup d'oeil pour savoir ce qui avait percuté ma queue.
« Ai-je été maladroite ou te trouvais-tu simplement au mauvais endroit ? Que vais-je bien pouvoir faire de toi ?... Nous verrons plus tard. »
Le cadavre d'une femelle se trouvait au pied d'un arbre. Je suppose que ma queue l'a percuté lors de mon atterrissage. Quoi qu'il en soit, sous ma patte antérieure droite se trouvait celui qui allait me rendre coupable de gourmandise...
Passé ce petit "contre-temps", nous avions finalement décidé de camper durant la journée un peu avant de quitter la forêt de Zan. La forêt était dense et c'était un environnement dans lequel il était bien plus simple de se cacher. En parlant de ça, heureusement que la luminescence de Xion était contrôlable, parce que sinon toute notre discrétion serait perdue. Je ne lui en voulais pas de préférer son apparence divine après ce qui s'était passé, au contraire même. C'était juste moins pratique. En reprenant la route, à la naissance du crépuscule, j'avais dû attacher le variquan au licol de Gyllir avec la corde, ça rendait les déplacements un peu moins facile. Mais ce n'était pas ce qui m'importait le plus.
Elle était préoccupée, je le savais, je le voyais de mes quelques coup d’œil lancé vers elle. Je n'aimais pas ça mais je la comprenais. Ces contorsions incessante du coup me brulaient un peu et plusieurs fois je posais ma main au niveau de cette nouvelle cicatrice, recouverte par du pansement coagulant enroulé autour de mon coup. Elle n'était pas très profonde, simplement à un endroit pas très confortable. La nuit approchant, on se permettait de ne faire que longer la forêt de Zan à notre gauche, la rivière sur notre droite. Ce n'est que peu de temps après qu'une vision me pétrifiait. Un dragon nous survolait, mais si mon esprit avait pu vagabonder entre des possibilité de Croc-Rouge voir de Zan, que je pensais encore vivant, ce gabarit et cette couleur me fait pensé à autre chose. Quelqu'un d'autre.
Le variquan s'agite et me fait gronder alors que j'arrête Gyllir et la perds de vue. Je frappe un peu vivement mes talons sur les flancs de la jument pour essayer de poursuivre cette vision, mais c'est elle qui réapparait encore plus brusquement, coupant la route devant nous. Route que nous ferions d'ailleurs mieux de quitter. Je la vois atterrir lourdement bien plus loin, un peu en contre bas et la perds de nouveau. Un pensée furtive me traverse et elle concerne Xion. Mon regard la trouve alors qu'elle était sans doute interloquée par mes agissements. Qu'allait-elle penser de mes motivations ? Il serait sans doute temps de lui en toucher deux mots. Pour le moment, je devais en avoir le cœur net. Pas très sûre de ce que j'avançais, je l'informais quand même de mes intentions.
❝ Suis moi, je voudrais aller vérifier quelque chose. ❞
Après son consentement, j'indique à Gyllir de reprendre la route, partant dans la direction supposé du dragon sombre. Il ne fallut pas longtemps pour l'apercevoir au loin, couché tranquillement à déguster le butin d'une chasse. Je n'étais pas très sûr, la pénombre grandissante n'aidait vraiment pas et surtout, le dragon était détourné de nous. Nous avancions encore alors, réduisant les plusieurs centaines de mètres qui nous séparait, ralentissant l'allure quand ce n'en était plus que deux. Le dragon se redresse à notre venu, ayant certainement noté notre présence et je m'immobilise. Non, ce n'était pas elle et je ne savais vraiment pas ce que je ressentais à cet instant. De la déception, du soulagement, peut-être quelque chose d'encore plus différent.
Rang : Reflet Crédit Avatar : squidina Date d'inscription : 15/08/2018 Messages : 301Double Compte : Valion Lameblanche, Qilin Lù, Markus, Rao Liens vers la fiche : Qui j'étais Qui je suis Elément : Métier : Fléau Invocateur : Lagertha Inventaire :
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Au-delà de la rage évanescente, la peur. Celle éprouvée à la vue du sang de son humaine. Une étrange journée, trop pleine d'émotions. La paix ne dure qu'un temps. Des ennemis, il y en aura d'autres. Le visage de Xion s'est fermé. Sa carapace s'est durcie. Elle est restée silencieuse toute la journée, excepté pour répondre à Lagertha. L'or de ses iris scrute la forêt avec méfiance. Sa vision nocturne transperce les créatures hébergées parmi les feuillages, dans les herbes et entre les troncs. Celles à portée du moins.
C'est fini. Plus jamais elle ne prendra forme humaine en dehors des villes en compagnie de son élue. Chétive. Faible. Impuissante. Donc incapable de la défendre. Elle rumine ces pensées depuis leur petit "contre-temps". Si elle n'avait pas eu à se laver pour éviter d'attirer d'autres indésirables, elle porterait encore avec fierté l'odeur cadavérique de leurs assaillants. La fille des abysses passe distraitement sa langue entre ses crocs pour en déloger les résidus sanglants qui ont souillé ses babines la veille.
Son corps recommence à briller. Elle force son calme et sa concentration pour rester invisible. Xion secoue la tête pour chasser les racines de ses maux qui s'entortillent dans son esprit. Son regard s'accroche à la courbe des arbres alentours. Il n'y en a pas un seul droit. Leur croissance est chaotique. Comme elle, surtout en ce moment. Elle étouffe un grognement.
Une ombre draconique éclipse la lumière de la lune. Kuro gémit et Lagertha s'arrête. Puis accélère. La renarde écarquille des yeux. Elle adapte son rythme sur une trentaine de mètres avant de s'immobiliser brusquement, interrompue par le tonnerre divin. Tous ses muscles se tendent. Ses nageoires et sa crête se dressent. Elle dévoile ses crocs et gronde sourdement. L'engeance d'Aer.
Son humaine se tourne et accroche son regard. La tension se lit dans cette échange mais leur différente nature échappe aux deux cotés. Malgré sa bonne visibilité, Xion n'a pas le temps de déceler les intentions de son élue que celle-ci lui demande la suivre.
La fille d'Aqua ferme difficilement la gueule, la mâchoire crispée. Son humaine est-elle sérieuse ? Elles sortent avec peine d'une embuscade et maintenant elles doivent aller à l'encontre d'un demi-dieu étranger dix fois plus grand qu'elle ? Ses griffes grattent le sol de mécontentement. Elle ne dit rien. Et qui ne dit mot consent, n'est-ce pas ?
La créature marine s'élance derrière l'équidé. Les écailles sombres de l'autre être divin et son ravissement devant le dîner se dessinent avec clarté dans cette relative pénombre. L'odeur du sang imprégnant l'air a en effet quelque chose d'appétissant. Sur les derniers mètres qui les sépare, Xion ralentit inconsciemment l'allure. Ces yeux vifs la frappent avec familiarité. Sa colère s'efface brièvement et elle déclare, alors que la dragonne relève le fief.
« Je te connais. »
Sa voix manque d'assurance mais pas de certitude. Elle cherche, sans trouver. Comme d'habitude, elle a oublié. Mais cette fois, elle sait que cette figure appartient à son passé.
Il est des manques de politesse qui se font naturellement. J'entends par exemple déranger un individu en train de manger. Intraspecifiquement, cela ne ce fait pas, c'est malpoli et s'expose à un risque de réponse négative provoquant ainsi un début de conflit qui souvent, chez les humains du moins, ce termine par le départ bredouille et penaud du second individu. Or interspecifiquement cela ce fait souvent ! J'entends par là les hyènes qui cherchent à voler leur proie aux lions, les corbeaux qui s'invitent au sein du repas des loups, bien que la relation entre ces corvidés et ces canidés soit particulière. Dans tous les cas, les représailles sont négatives et l'arrivée de l'intru en plein milieu du repas est mal accueillis.
Au sein d'une communauté, il arrive fréquemment que l'intrusion ne soit pas sanctionné : un partage du repas pouvant ce produire. Êtes vous déjà arrivé chez votre oncle ou tout autre membre de vos relations proches en plein cœur du repas recevant un accueil chaleureux et invitation à rejoindre la table ? Pfff quand je pense qu'il y avait des biologistes assez crétins pour affirmer que l'humain était étrangé à tout ces mécanismes éthologiques. Pure preuve d'étroitesse d'esprit !
Ainsi que cette humaine, son cheval, son variquan et l'enfant d'Aqua s'approchèrent de moi en plein cœur de cette prairie j'aurais tout à fait été dans mes droits de les accueillir avec un rugissement. Réfléchissant un tout petit peu plus qu'un jeune lion ayant terrassé sa première proie avant d'agir, je me redressais et me retournais dès que je repérais les signaux trahissant l'arrivée des nouveaux venus. Je ne me sentis pas le moins du monde menacée. Premièrement parce qu'ils étaient bien trop bruyant pour me surprendre, ensuite parce que bien idiote serait la créature qui s'attaquerait à un dragon de ma taille en faisant celle proportionnel aux bruits trahissant sa présence.
L'humain s'immobilisa venant visiblement de me reconnaître. La suivant, j'eus la surprise de voir arriver une tête familière : Xion, gardienne des abysses de l'océan que j'avais rencontrée lors de l'une des mises à jour de mon encyclopédie. Cherchant à étudier les créatures des profondeurs, je m'étais fait agresser par un calamar colossal particulièrement... colossal pour m'avoir vaincue. Il m'aurait dévoré si Xion n'était pas intervenu. S'approchant de moi, elle dit :
« Je te connais. »
Comment décrire ma réaction ? Difficile de trouver les mots... Aucune marque de politesse, juste une constatation d'une indubitable évidence déposé ainsi, avec une neutralité presque insultante en me dérangeant sans s'annoncer en plein milieu de mon repas. Il se trouve que j'avais une reconnaissance éternelle envers Xion : elle m'avait sauvé et soignée de cette abominable mollusque géant. Si ç'avait été un parfait inconnu, imaginons un instant que l'humaine ce soit présentée seule, je n'aurais pas offert accueil agréable, bien loin de là.
Possédant une voix énergique typique de la bibliothécaire sévère et vive, je possédais néanmoins une note reconnaissable entre mille.
« Xion ! Quelle extraordinaire surprise ! Soit indulgente envers moi, j'espère que je ne te choque pas trop : voilà peut être deux milles ans que je n'ai plus mangé de la viande de porc... Ou peut être un peu plus, j'ai perdu le compte de mes années d'enfermement. Je me souviens de ce cochon au miel délicatement doré que nous cuisinait la mère Christiane, sa viande croustillante et délicieusement épicée accompagnée de ces petites pommes de terre cuites dans la sauce... »
Un détail venait gâcher ma fière allure de dragonne en effet : le cadavre de sanglier entre mes pattes ! Brisé en deux dans un angle en aucun cas naturel, un gros morceau de peau sur le sol arraché et jeté là, le ventre largement ouvert, les organes déjà à moitié consommés... J'avais les naseaux et les pattes couvertes de sang, sang qui dégoulinait quelque peu de ma gueule lorsque je me retournais pour leur faire face d'ailleurs...
« Ah mais j'en oublie la politesse la plus élémentaire ! Je suis bien heureuse de te voir en liberté et plus dans l'une de ces insultantes salle de pierre. Tu es venue avec une amie je vois. »
Mes yeux, brillant de vitalité, d'intelligence et de sévérité, se braquèrent sur l'humaine, agitant quelque peu ses deux montures. Il n'y avait aucune trace de menace ou d'intention négative de ma voix, mon regard ou mon comportement, bien que ma naturelle sévérité puisse être mal apprécié je vous l'accorde.
Je la contemplais de loin, sans un mot, en oubliant tout autour de nous. Je m'emplissais peu à peu du fait que ce n'était pas elle, je le voyais bien en observant la créature divine qui me faisait face. Le plus étrange c'est que je me heurtais à la réalité de ma réaction en l'apercevant dans le ciel noir : son abandon m'avait fait défaut, d'une manière ou d'une autre sinon je ne serais pas planté là, immobile et muette.
C'est finalement la voix de Xion qui m'extirpe de mes pensées, ma reprise de conscience secoue quelque peu mon corps avant que mon regard ne trouve la renarde. Le visage tiré par une courte incompréhension. Elle la connaissait. Pourquoi je m'en étonnait ? Après tout, la vie des Divins m'échappait complètement. En revanche, je savais que Xion avait plus ou moins des trous de mémoire. Il lui était arrivé la même chose avec Nagah. Inquiétée je dois l'avouer, je me tournais vers le dragon sombre qui nous faisait face, guettant sa réaction, serrant les rennes de Gyllir entre mes doigts.
Mes yeux suivaient ses mots, le dragon, Xion, puis le cochon ainsi que le deuxième avant de revenir sur l'enfant d'Aer. Sa petite histoire aurait pu être appétissante, si je m'en souciais. Son discours allait vite pourtant et en un rien de temps, elle me visait avec ses yeux. Je pensais « elle » mais je n'en savais rien après tout. Ce dont j'étais certaine, c'était du foudroyant frisson qui avait parcouru mon dos quand ses yeux perçant ont poignardé les mieux. « La politesse la plus élémentaire ». Bien sûr, quelle idiote. J'entrouvrais d'abord la bouche, légèrement hébétée.
❝ Euh... Excusez-nous, enfin... moi. De vous avoir dérangé. J'ai cru que... ❞
Que quoi Lagertha ? Qu'elle était Armalys et que tu avais soudainement eu envie d'en avoir le cœur net ? Pourquoi ? Ca ne devrait pas importer, tu as Galifey et Xion avec toi maintenant. Qu'Armalys ai décidé de te laisser n'a pas d'importance. Ça n'en a pas. Je secouais alors quelque peu mon crâne pour, une fois encore, reprendre mes esprits.
❝ Peu importe. Vraiment désolé, on va y aller. ❞
Je tirais sur les rennes de Gyllir pour qu'elle fasse demi-tour, mais sur le chemin, mon regard croisait celui de Xion et me fait m'arrêter dans mon élan. Elle ne devait certainement rien comprendre. Pourquoi nous étions revenu sur les terres, où nous allions et pourquoi j'avais soudainement voulu suivre ce dragon. Je ne lui disais rien, ou pas grand chose, parce que je croyais lui épargner bien des tracas. J'avais peu être tord.
❝ A moins que tu veuilles rester et vous retrouver. Vous avez l'air de vous connaître. ❞
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Beaucoup de mots. Curieusement, ça aussi lui rappelle un sentiment familier. Xion n'est guère surprise de voir la dragonne si volubile. Ce qu'elle ignore être un réflexe la distrait du récit culinaire. Elle a bel et bien oublié l'intérêt qu'elle y accordait autrefois, selon ses maigres capacités de concentration. Son corps se détend. Mais la tension qui agite son esprit l'empêche clairement de se souvenir.
La fille d'Aqua hésite, légèrement confuse. Le ton familier de l'enfant d'Aer temporise son aspect sanguinolent. Au moins, elle ne semble pas hostile. Son instinct méfiant se tait. Peut-être qu'une histoire de mémoire sensorielle encourage cette aisance en sa présence. Pas de danger pour Lagertha, le plus urgent est réglé.
Cet accueil chaleureux devrait l'enthousiasmer un minimum. Redécouvrir Nagah l'avait globalement enchantée sur le bateau. Aucune raison pour que ça soit différent ici. À moins que ressorte encore une part moins réjouissante de la Xion du passé. Son regard doré effleure le sol. Elle n'a pas envie de le découvrir. Mais l'accueil chaleureux de la dragonne fait son effet. La renarde redresse le museau pour l'observer et lui répondre avec un calme détaché.
« Oui, mon humaine. Je suis contente que tu sois sortie aussi. »
Elle reporte son attention sur la jeune femme. Au lieu de se présenter, celle-ci sonne la retraite. Ses iris dorés transpercent ceux plus foncés à la recherche d'une explication. La pénombre masque les maigres variations de son expression, rude en cet instant. Maintenant ça dépend d'elle ? Foncer au devant du danger ne requiert pas son avis. Les discussions triviales au clair de lune, oui. Ce n'est pas la première fois qu'elle la laisse ainsi de côté dans l'urgence.
Xion se retient de gronder. Elle ne comprend pas. Pourquoi Lagertha veut-elle partir ? Elle détourne la tête d'un mouvement vif. Le faciès draconique revient dans son champ de vision. Elle essaie de se focaliser dessus. En vain. Elle devrait se réjouir, mais s'en trouve incapable. L'intérêt pour la demi-déesse reste insaisissable malgré ses tentatives. Tout ça l'agace. Elle n'a plus envie de parler. Ses griffes se plantent lentement et profondément dans le sol. Sa queue remue nerveusement. Elle cherche une échappatoire. Là. La bête près de l'arbre.
« Tu ne le manges pas ? Je peux ? »
Son grommellement s'apparente plus à une annonce qu'une demande. Sans attendre de réponse, elle se dirige vers l'animal et enfouit ses crocs dans la chair. Le plaisir d'avoir quelque chose à mordre n'efface pas toute sa frustration. Mieux que rien, ceci dit. Et puisque Lagertha voulait tant aller à l'encontre de la dragonne, elle n'a qu'à faire la conversation.
Intimidation. Il n'est pas si facile de ce mettre à la place des autres, de comprendre leur point de vu. C'est un exercice que je devrais faire plus souvent. Il faut se mettre à la place des humains, petite créature faible se croyant forte et supérieure qui se retrouve soudain devant une semi-divinité sous la forme d'une dragonne de ma taille avec toute ma puissance physique et mentale et la force inimaginable de mon savoir pour un tel cerveau. Un homme sage a dit un jour : qu'est-ce qu'un humain sinon un dieu pour une fourmi mais qu'est-ce qu'une colonie de fourmi sinon un adversaire impressionnant pour un humain ? Un seul humain ne peu rien contre moi, je n'ai que la limite de mon imagination pour l'anéantir : un simple coup de queue, le dévorer, briser sa personnalité pour le pousser au suicide, manipuler le reste de sa communauté pour la retourner contre lui, le guider vers sa propre mort, faire chuter un arbre sur lui -quoi que ce serait désolant pour cette extraordinaire créature végétale- ou que sais-je encore !
Néanmoins j'eus un mal fou à ne pas lever les yeux au ciel lorsque l'humaine bafouilla de ridicules excuses qu'elle ne réussie même pas à terminer ni formuler correctement. Bien sur qu'elle m'avait déranger mais elle voyait bien qu'elles étaient parfaitement inutiles ! S'il y a une chose que je ne supporte pas c'est la bêtise, même quand elle est faites par respect. Elle ne se présenta pas, elle m'informa de son départ sans plus de cérémonie après s'être excusée une seconde fois... Je n'avais bien sur pas le droit de juger cette humaine avec si peu de données, après tout un jugement fiable ne se dépose pas après quelques minutes à peine passé avec une personne. Néanmoins je n'étais pas assez sotte pour ignorer qu'un jugement se forme immédiatement dès l'instant ou le regard se pose sur l'individu, c'est inconscient. J'ai appelé ceci le jugement primaire. Or l'intelligent saura accepter cette première forme de jugement et le faire évoluer au fur et à mesure de la récolte de données. Celle ci était mal partie mais avait encore toutes ses chances...
Le comportement de Xion m'interpella. J'avais bien sur remarquer son choix de dimorphisme sexuel et n'avait pas fait l'erreur de la considérer inchangée. Chaque être vivant est en évolution après tout, demi-dieu compris. Bien que nous soyons asexué, beaucoup d'entre nous penche vers un sexe ou l'autre : c'est mon cas. N'allez pas me considérer comme un mâle ou une asexuée si vous souhaitez éviter de m'irriter -ce qui est un sage conseil. Elle était beaucoup plus sombre que l'adorable, vif et joyeux individu que j'ai connu. Beaucoup plus tourmentée aussi dirait-on. Croyait-elle que je n'allais pas comprendre le comportement de détournement qu'était le sien ? Me poser poliment la question sur mon utilisation du deuxième cadavre et planter ses crocs dedans sans attendre ma réponse n'était pas du genre de l'ancienne Xion et démontrait un besoin de décharger une forme de pression.
Je me sentis pas offusquée pour autant : Xion m'avait rendue un immense service, je lui étais redevable et pouvais lui offrir ce petit écart. Mon regard le suivi jusqu'au deuxième gibier mais je ne commentais pas. Je me tournais de nouveau vers l'humaine :
« Oh ne vous excusez pas mon enfant, vous ne me dérangez pas. Je n'ai jamais aimée prendre mes repas seule. Peut être souhaiteriez vous le partager avec moi ? J'ai tuée ce second sanglier par accident et c'est l'occasion de revoir mon amie Xion qui m'a rendu un si grand service dans l'ancien temps. »
Je me relevais afin de me permettre d'avoir dans mon champ de vision Xion et l'humaine ce qui, dans le cas de ma taille non négligeable se remarque forcément et peu rapidement impressionner. Je pris donc grand soin de pivoter sur un axe centré autours du sanglier se trouvant devant moi. Je me ré-installais ensuite en position couchée plus détendu puis j'arrachais une large cuisse que je plaçais un peu plus loin en direction de l'humain tout en disant sur le ton de la conversation, comme si nous étions installés autours d'une table dans un confortable salon de thé :
« Je suis Pru'ha, maitresse du savoir et fondatrice de la Grande Bibliothèque de l'ancien monde. »
Ce fut comme si elle avait acceptée l'invitation, je n'ai pas attendu sa réponse. Je me suis installée, lui ai donnée sa part et ai débutée la conversation.
« Sans notre amie, je ne sais pas comment mon immortalité aurait pu me tirer du pétrin dans lequel je me suis mise toute seule. Elle m'a non seulement sauvée mais également rendu un service d'une valeurs inestimable à mes yeux. Vous pouvez être fière de l'avoir pour amie ! »
Je ne la forcerai pas à se présenter si elle ne le souhaitait pas. Je trouverais que c'est malpoli mais elle est libre de son choix. Ainsi je poursuivi la conversation comme si rien était et qu'elle n'avait commise aucune faute.
Que je veuille partir ne semblait pas enchanter Xion, mais que je lui donne la possibilité de rester non plus. Mon visage se raidit alors instantanément, fronçant les sourcils face à cette réaction que je ne comprenais absolument pas. En y réfléchissant, mes propres agissement n'avaient pas grande logique. Je dois bien avouer cependant que la manière dont elle s'était détournée de moi, aussi vivement, m'avait crispé. Les traits de mon visage tressaillent une seconde avant de la suivre du regard, lorsqu'elle se met à mordre dans l'autre proie morte.
La voix de la dragonne s'élève alors, appelant inévitablement mon attention et mon regard à elle, ce qui, de tout ces mouvements de tête, me fait grimacer. La blessure sur mon cou, bien que bandée, n'était en rien guérie ou confortable, mais là n'était qu'un sujet secondaire. Mes iris brunes fixaient la fille d'Aer, sans trop répondre dans un premier temps. Ma simple observation devient alors rapidement une contemplation quand celle-ci se lève et s'installe d'une autre manière. Elle me faisait penser à Armalys, à Zan et aussi au Diamentis des Landes que j'avais affronté. J'étais admirative oui, mais je le cachais bien. Cependant, jusqu'à ce qu'elle évoque Xion, j'étais resté silencieuse, mon attention se portant à ma fille d'Aqua. Instantanément alors et à l'évocation des mots de la dragonne, mon regard s'attendrit malgré les incompréhensions passées.
❝ J'en suis très fière. ❞
Un instant, je restais à la contempler elle aussi avant de revenir à cette fameuse Pru'ha, je restais cependant assez distante malgré son apparente invitation. J'avais beau être de ceux qui respectaient les divins, je n'en étais pas moins dans une situation qui ne me permettait pas d'être imprudente. Révéler mon nom était une mauvaise idée, tout comme rester ici, sur ce terrain un peu trop dégagé bien que loin des routes. Je ne pouvais ainsi pas m'empêcher d'observer l'endroit, d'un rapide coup d’œil circulaire.
❝ Je m'appelle Sybille. Simple humaine. ❞
A cette présentation, mon regard ne pouvait s'empêcher de pointer un instant vers Xion. Ce prénom allait certainement l'alerter, ou au moins l'étonner. Elle ne le connaissait pas, mais c'était le premier qui m'était venu à l'esprit quand mon besoin d'anonymat était irrémédiablement présent. J'espérais seulement qu'elle tairait ses doutes pour le moment et que mon regard vers elle serait suffirait pour le lui demander. Je notais ensuite cette cuisse qui m'était offerte et je n'étais vraiment pas sûre de vouloir rester ici.
❝ C'est à dire qu'on avait pas vraiment prévu de s'arrêter... ❞
J'avais l'air bête non ? J'étais venue moi même à sa rencontre, sans consulter Xion. Arriver là, j'ai voulu partir puis j'ai proposé à la renarde de rester si elle le souhaitais et maintenant que Pru'ha nous le proposait, je ne voulais plus. Tout ça parce que j'étais une fugitive recherchée ? Peut-être, peut-être pas. Je levais alors les yeux au ciel avant de soupirer longuement, puis d'un léger coup sur les flancs de Gyllir, je me rapprochais d'elles, tandis que le variquan suivait tranquillement. Après tout, elles se connaissaient et Pru'ha avait clairement énoncé son désir de retrouver Xion. Même si celle-ci n'avait pas vraiment fait de même, elle était là et rongeait son cochon, je ne pouvais plus me résoudre à le lui arracher.
Après quelques pas lents, je descendais de la jument et la laissait brouter l'herbe tranquillement tandis que je m'asseyais lourdement à côté de cette cuisse que m'avait offerte la fille d'Aer, après avoir déposé la fiole luminescente non loin. Je n'étais après tout qu'une humaine et la luminosité ne faisant que décroitre j'aurais besoin de cette source. Croisant alors une jambe pour laisser l'autre se tendre, je ramenais la viande suffisamment proche de moi avant de sortir la daguer fourrée dans mon dos. En vérité, je n'avais pas très faim et encore moins de viande crue. Cependant, je me savais aussi plutôt impolie aux yeux des autres et certainement aux siens aussi, alors j'essayais au moins d'arranger un peu les choses. Je la remerciais d'ailleurs d'un hochement de tête marqué avant de m'atteler à la dépecer pour en révéler la chair, commençant à tailler une première fine tranche. Et maintenant ? Qu'est ce qu'il fallait dire. Bon appétit ? Rah, sérieusement, pourquoi il fallait toujours que certains estiment avoir besoin de dire des choses aussi évidentes ?
❝ Merci... de nous laisser partager votre repas. ❞
Instinctivement, je guettais sa réaction comme si je voulais m'assurer qu'elle était satisfaite et qu'enfin, j'allais arrêter de sentir cette pression qui s'était installée. Je piquais ensuite la tranche que j'avais défaite de la chair pour y planter mes crocs et en arracher un premier morceau. Le goût du sang était très présent, j'avais pour habitude d'aimer ça, mais bizarrement plutôt le mien. Enfin, peu importe, je crois maintenant qu'il faut que je fasse la conversation. J'avoue être un peu tendue à cette idée, mais avais-je seulement le choix ?
❝ Alors, comment vous vous êtes rencontrez ? ❞
Mon regard se tourne alors vers Xion quelques secondes, avant de revenir rapidement sur Pru'ha puis revenir à son occupation, à savoir manger.
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Rang : Reflet Crédit Avatar : squidina Date d'inscription : 15/08/2018 Messages : 301Double Compte : Valion Lameblanche, Qilin Lù, Markus, Rao Liens vers la fiche : Qui j'étais Qui je suis Elément : Métier : Fléau Invocateur : Lagertha Inventaire :
Chaque coup de crocs alimente son énervement au lieu de l'étouffer. Xion s'arrête. La chair fraîche et sanguinolente n'a aucun goût entre ses papilles divines. Le reste prend trop de place. Sa tête bourdonne. Trop de questions. Trop de doutes. Pas étonnant, puisque Lagertha ne lui explique jamais rien. Sauf cette nuit, à Oagran. Une soirée lointaine restée givrée dans ces plaines glaciales et cette ville de rejetés. Devrait-elle poser plus de questions, comme alors ? Elle n'ose pas. Son élue ne l'a pas habitué à ça. Elle ne procède pas de la sorte avec son clan. Pourquoi Xion se le permettrait alors ?
Elle n'a toujours pas rencontré ce Démon. Elle ignore ce qui s'est passé précisément à Rorn. La fille d'Aqua ne sait pas pourquoi elles errent ici, mais n'est pas idiote. Elle a remarqué le sens du courant. Elles descendent la Blanche, au lieu de la remonter. Quel est le plan de sa cheffe ? Elle n'est pas censée l'ignorer non ? Comment peut-elle se battre et la protéger en nageant dans un tel flou ? Pire que la vase. Et maintenant elle se révèle à une semi-divinité étrangère. Puis décide de masquer son identité. Incompréhensible.
La renarde abyssale relève la tête. La conversation ne lui parvient que distraitement jusqu'à l'entente de ce prénom sibyllin. Elle redresse le museau et croise le regard sombre de son humaine. Elle n'a rien de simple, sa déclaration. La fille d'Aqua lève les yeux au ciel. Pru'ha n'est pas stupide. Le fait que Lagertha lui mente la dérange. À croire que la nature de leur lien, même vague, reste tangible. Ses mots sont doux. Ceux de Lagertha absents. Les efforts de la jeune femme tardent à pointer le bout de leur nez, mais ils sont là, c'est vrai.
Xion soupire bruyamment. La présence de la fille d'Aer la calme. Elle s'avance, traînant son cochon, puis s'installe aux côtés de Pru'ha pour essayer de le déguster. Sa gueule s'ouvre pour libérer une voix froide. Elle répond comme si la question lui est posée.
« Je ne m'en souviens pas. » Elle lève brusquement la tête vers la dragonne, prise d'un élan de considération. « Désolée. »
Contente. J'étais contente de retrouver mon amie que je pensais perdue en raison de l'enfermement au sein du temple. J'étais ravie que cette humaine semble respectueuse. Je notais néanmoins qu'il semblait s'agir d'une guerrière en observant son équipement. J’espérais qu'elle ne ferait pas prendre de risque à cette chère Xion. Elle déclara s’appeler Sybille, un nom intéressant et qu'elles n'avaient pas l'intention de s'arrêter. Ce fut d'autant plus intéressant que ces paroles semblèrent déranger la fille d'Aqua. Mon œil se tourna vers elle mais je ne dis rien. Est-ce que l'humaine venait de me mentir sur son identité ? Pourquoi s'étaient elles précipitées de la sorte à la rencontre de ce dragon qu'elle avait pris pour quelqu'un d'autre si elle n'avait pas l'intention de s'arrêter ?... Je notais ces interrogations dans un coin de mon esprit, je mènerais mon enquête au cours de la conversation.
« Enchantée de faire votre connaissances Sybille. »
Elle s'installa non loin de moi, déposant une fiole de lumière sur le sol. Je consacrais cette instant de silence à prendre une bouchée de sanglier tout en observant cette fiole. J'avais certes déjà vu ce genre d'objet dans l'ancien monde : il s'agissait de magie sans aucun doute. Quel dommage que je ne puisse pas récolter la substance à l’intérieur pour l'étudier... Xion nous rejoignit. Sybille demanda comment nous nous étions rencontrées mais la fille d'Aqua répondit qu'elle ne ce souvenait pas. Cet aveu me chagrina. Était-ce de l'amnésie ? Quel choc psychologique avait elle subit pour en être victime ?
« Oh ma chère Xion... Qu'est-ce que ces imbéciles d'humains ont bien pu te faire pour que tu m'en ais oubliée ? Je t'ai connu... Je dirais une trentaine de siècles avant le retour des Quatre. Nous étions dans l’hémisphère sud, a environ deux milles kilomètres au nord de l'archipel des Kergoluan et trois milles au sud-est des îles Zilando. J'avais fabriquée un harnais magique pour me permettre de voir dans les profondeurs de l'océan. J'étais en mission dans le but de mettre à jour mon encyclopédie lorsque je suis tombée sur toi à plusieurs kilomètres de la surface. Nous avons ensemble assisté à un combat fascinant entre un cachalot et un calamar colossal. Le premier a fuit et le second m'a attaqué. Il m'aurait réduit en bouilli si tu n'avais pas été là. Non seulement tu m'as sauvée du calamar mais tu m'as également ramené à la surface, soignée puis tu m'as aidée à effectuer mon travail durant les mois qui ont suivit. J'ai une dette envers toi ma chère Xion, je ne l'ai pas oubliée. »
Tel était le récit résumé de notre première rencontre, qui dura de longs mois. Ma réputation était solide dans l'ancien monde, suffisamment pour que chacun sache que je paye toujours mes dettes. Un jour, l'occasion se présentera. Je continuais d'un ton plus joyeux, comme si nous nous connaissions depuis toujours ce qui du point de vu humain était le cas. Je commençais par m'adresser à Sybille mais très vite c'est vers Xion que je me tournais :
« Figurez vous ma chère que nous nous sommes croisées de nouveau plusieurs fois au cours des siècles qui ont suivit ! Il est dommage que tu ais oubliée ce soir ou tu es arrivée sur une plage alors que je racontais à des humains l'histoire du triangle d'Aljimer. C'est un soir que je n'oublierai pas ! Il y a aussi ce jour ou nous avons travaillées ensemble au sauvetage et la remise à l'eau d'une gigantesque baleine à bosse. Je pense que nous n'y serions jamais arrivées l'une sans l'autre. Oh et comment oublier ce repas que nous avons partagées ensemble chez la mère Christiane ? »
J'éclatais de rire. Un rire bref mais franc et sincère. Un rire bien articulé et contagieux.
« Ha ha ha ha ha ha ! Ne te rappel tu donc pas dans quel état nous ont mit ces extraordinaires tonneaux d'hydromel que l'on nous a offert ? Cette pauvre mère Christiane ! Devoir nettoyer derrière deux demi-déesses à moitié saoulent qui ont tellement rit qu'elles en ont pissées de rire ! »
J'éclatais de rire à nouveau, laissant le souvenir remonter. Puis je repris finalement d'une voix plus calme, plus douce, avec une pointe de chagrin et beaucoup d'affection :
« Je regrette infiniment que tu ais oubliée ta visite de ma bibliothèque... Tu es l'une des seules à y être entrée sur la fin des temps. Toutes ces merveilles perdues à jamais, c'est dramatique... Tu étais une amie chère à l'époque Xion. Je suis en colère contre les Dieux pour de nombreuses raisons : m'avoir fait perdre ton amitié est une accusation majeure. Je suis heureuse de t'avoir retrouvée mais apprendre ton amnésique me chagrine. »
Lui laissant la parole, je me penchais pour grignoter mon sanglier le plus proprement et discrètement qu'un dragon de ma taille le peu.
Je plantais mes crocs sans grande conviction dans les morceaux de viande que je délogeais de ce morceau de carcasse sanguinolent. Avec des morsures un peu trop appuyé, quelque fois le sang coulait sur mon menton et je l'essuyais d'un revers de main évasif. Parce qu'en réalité, mon attention n'était pas du tout porté sur ça, mais sur Xion et quelque fois la dragonne. A Oagran j'avais amorcé un travail avec la renarde, une chose qui nous connectait davantage que la magie d'un pacte et cette chose, ce soir, m'informait clairement de son état nerveux et par extension, du mien. Je n'étais pas à l'aise et ça n'allait faire qu'empirer.
Elle ne se souvenait pas de la dragonne et comme première réaction, je doutais de la parole de cette dernière. Alors mon regard se tournait vers elle, en attente d'une explication, sans me montrer tout à fait méfiante. La dragonne enchainait alors avec ce qui me semblait être sincère et continuait sur le récit de leur relation. J'écoutais, d'abord un peu perplexe et tous les détails qu'elle évoquait passait par une oreille, pour ressortir par l'autre. Il y en avait beaucoup trop. Laissant de côté ma perplexité, j'essayais d'écouter avec plus d'attention, mais quelque chose m'en empêchait. L'aura de cette dragonne. Elle était comme une barrière entre elle et moi, crispait mes muscles à mesure que ses mots se déversaient et il y en avait beaucoup. J'avais toujours été mal à l'aise avec les mots, d'autant plus quand ils étaient aussi nombreux.
Plus j'écoutais et plus je me crispait, jusqu'à ce que son rire transperce mon esprit. Un mouvement de recul m'envahit, comme un instinct de défense. La dragonne était grande, imposante et son esprit était envahissant, bien plus conséquent que le mien et ce n'était pas simplement dû à sa nature. Je me savais idiote de réagir ainsi, elle semblait pleine d'une vivacité d'esprit qui m'était étrangère, que je ne comprenais tout simplement pas. Je me sentais amoindris, d'une certaine manière, en imaginant simplement nos esprits se confronter et le mien perdre à plate couture. Je savais étrange de penser ainsi, mais je n'y pouvais rien. C'était quelque chose qui m'arrivait souvent, avec les humains, mais face à eux je n'avais pas d'appréhension à rétorquer violemment. Ici, je ne pouvais m'y résoudre.
Je me contentais alors simplement d'écouter, d'observer. Après tout, la conversation ne m'était pas adressé, ou alors en de rare occasion, sans doute simplement pour s'assurer de mon attention d'ailleurs. Pourtant, quelque chose me tourmentait réellement : la perte de mémoire de Xion. Elle ne se rappelait plus de rien, de l'ancien monde, je pouvais élaborer toutes les théories que je voulais, je ne saisissait toujours pas l'étendue de son traumatisme, si il y en avait un que je sois capable de comprendre. Mais peut-être que... la dragonne en serait capable ? Après tout, leur essence, leur nature, leur naissance était bien plus liées que les notre. A cette simple pensée, d'être sans doute moins capable de la comprendre que la dragonne... un pic blessa mon être. C'était idiot, à nouveau, je ne pouvais définitivement pas me mesurer à ça. Mon regard tentait alors de trouver celui de Xion, comme pour y trouver le réconfort d'avoir tout de même un rôle importante dans cette quête, mais quand je le retrouvais, je prenais à nouveau conscience que ce ne serait sans doute jamais le cas. Alors je baissais les yeux, de dépit et les renvoyait distraitement vers Pru'ha.
❝ J'essaye de l'aider, mais peut-être que vous serez plus capable que moi, si vous la connaissez depuis si longtemps... ❞
Mes derniers mots avaient été plutôt bas, je ne doutais pas que l'une comme l'autre allait les entendre de toute façon, mais ils traduisaient un certain dépit et, m'en rendant compte, je préférais retourner à planter mes crocs dans mon dîner, distraitement toujours, les yeux dans le vague de mon esprit.
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Encore beaucoup de mots. Ses yeux dorés s’écarquillent devant le flot de paroles qui sort de la dragonne. Impossible de feindre l’amnésie. Elle se serait souvenue que c'est là caractéristique de l'enfant d'Aer. Xion fait son possible pour écouter. Les phrases s’enchaînent trop vite pour que les images s’esquissent dans son esprit. Trop nombreuses pour qu’elle réfléchisse et sollicite sa mémoire défaillante. Mais les émotions sont là. Le ressentiment, la joie, l’amusement, l’affection, la peine. La fille d’Aqua contemple sa cousine. Inaccessibles.
Son regard et son museau basculent vers l’herbe. La chose n'a pas semblé grave avec Nagah. Un peu d'inquiétude, vite tamisée par la présence de son élue. Mais la quantité de souvenirs évoqués par Pru'ha pèse sur sa conscience brumeuse. La renarde répond à ses dernières paroles d’une voix basse et lointaine.
« Oui, moi aussi. »
La réplique de Lagertha ne fait pas plus de bruit. Xion redresse doucement la tête. Elle l'observe mordre dans la chair. Son malaise effleure ses sens depuis le monologue de la dragonne. Étrange. Elle le sent. Elle a envie de se lever et de s'asseoir à côté d'elle. Mais elle n'en fait rien, incapable de faire abstraction de ce qui la dérange pour se concentrer sur son humaine. Pas comme à Oagran. Un faible et discret soupir traverse ses narines. Ses iris dorés tombent distraitement sur la carcasse à ses pattes. Elle glisse un coup d’œil à sa voisine avant de revenir dessus. Plus aucune envie.
L'idée du mensonge reste étranger à son esprit. La fille des abysses réalise, dans sa vision du nouveau monde, que la dragonne faisait partie de son clan, avant. Pourquoi elle ne se souvient pas ? Comment oublier un être aussi gros avec qui elle a partagé tant de choses et passé autant de temps ? Elle ne comprend pas. Ses yeux se plissent. Leur point de focalisation se trouble. Et si Hedda venait à disparaître de sa mémoire elle aussi ? Ses éclats de rire, ses longs cheveux blonds, sa petite respiration. Est-ce que quelqu'un comme Rym pourrait... partir également ? Ne plus lui offrir cet étrange et familier écho qui résonne dans cette âme flamboyante ? Et si...
Et si Lagertha meure ? La cellule, les méandres de son être, le tourbillon de sa rage, le tumulte de ses sens, le vide de ses émotions. Oui. Mais, ses souvenirs ? Est-ce qu'ils s'en iront ?
Xion se lève. Du sol, ses iris remontent sur la silhouette guerrière. Rien ne lui arrivera. Sa queue fouette l'air nerveusement. Mais elle courre au devant du danger. Elle ne lui parle pas. Parfois elle n'est même pas là. Une ombre est supposée la suivre partout, et tout savoir. Non ?
Son corps s'affaisse. La renarde reste là, immobile, entre une humaine qui se ferme dans le présent et une cousine qui s'ouvre dans le passé. Si seule. Sa Mère lui manque. Terriblement. Naturellement, elle redresse et tourne la tête pour humer les effluves marins. S'immerger complètement. Passer la nuit au fond de l'eau. L'illusion d'une étreinte qui n'existe plus.
Xion pose son regard sur la forme colossale, puis plonge dans l'ambre de ses vifs iris. Elle est désolée. À l'image de son élue, elle ne prend pas la peine de s'exprimer sur son départ. L'enfant divin pourra sentir sa présence, elle ne se masque pas. Ses pas lents l'entraînent loin du duo, parmi les arbres et enfin jusqu'à la Blanche.
Le malaise de Sybille et Xion se sentait clairement. L'humaine se crispait de plus en plus au fur et à mesure que je parlais tandis que mon amie semblait subir une tempête comme un arbre résistant aux vents. Tout ceci ne m'empêcha pas de m'exprimer naturellement. Je ne voulais aucun mal à ces deux êtres. L'une des deux étant une amie précieuse, l'autre sa compagne de vie. Je notais le petit mouvement de recul de Sybille lors de mon éclat de rire. Est-ce que je l'impressionnais ? Cela ne me surprendrais pas : que ce soit par mon physique, ma force mentale ou les deux, je dominais les humains avec beaucoup trop de facilité -quel terrible terme que dominer, voilà un sujet de réflexion intéressant n'est-il pas ?
D'une petite voix, Sybille dit qu'elle essayait de l'aider mais que je serais peut être plus capable qu'elle. Je lui adressais un regard silencieux plein de compassion : je comprenais ses difficultés. Un individu humain est un être complexe et les blessures mentales sont les plus difficiles à guérir. Mais la complexité et la difficulté sont colossalement plus fortes quand il s'agit d'un demi-dieu. L'humanité d'aujourd'hui pouvait elle comprendre la longueur de nos vies, la profondeur de nos mémoires et ce que les humains ont fait vivre à certains d'entre nous ?
Je gardais le silence tout en observant Xion. Je ne la jugeais pas, je ne lui demandais rien, je ne lui infligeais aucune pression. Je lui offrais simplement le temps dont elle avait besoin : une véritable tempête chamboulait son esprit, c'était très clairement visible, évident à mes yeux. Avec politesse, beaucoup de manières, je grignotais mon morceau de viande le plus discrètement que je le pouvais : je ne voulais pas déranger Xion. Elle se leva, sa queue fouetta l'air. Je reconnaissais ce geste nerveux. Que se passait-il dans son esprit ? Après quelques instants elle s'affaissa et resta là, immobile. Je restais silencieuse, respectueuse. Xion prendra la parole quand elle le décidera. Finalement elle chercha mon regard et s'y plongea. De quoi avais-tu besoin mon amie ? Que pouvais-je faire pour toi ? Quelques exemples de toute l'amitié, de tout le soutien que je lui envoyais avec cette échange de regard. J'y lisais de la désolation de sa part, une certaine forme de détresse aussi peut être.
Finalement la fille d'Aqua se redressa et s'éloigna d'un pas lent. Je ne fis aucun geste pour la retenir elle, la laissant s'en aller, respectant son souhait de solitude. La rejoindre maintenant serait une erreur. En revanche, avec beaucoup de douceur et sans agression aucune, j'incitais Sybille à rester avec moi. D'une voix douce trahissant clairement mon âge, ma compassion et ma propre désolation :
« Je sais ma chère... Laissons là seule un moment. »
Je laissais échapper un long soupir.
« Qu'as t-elle bien pu vivre pour être dans cet état ? Est-ce une autre atrocité des humains de l'ancien temps ? Nous avons tous souffert à notre façon, nous avons tous des cicatrices et des blessures qui ne ce soigneront jamais. Je sens en elle une immense colère mélangée à une profonde détresse. »
Je marquais un court silence. Quel calme soirée. Quel paradoxe : nous vivions une forme de drame au sein d'un si beau moment que nous offrait la nature. Je n'étais peut être pas la plus compétente pour soigner la douleurs de Xion, un certains gardien dragon, qui avait lui même terriblement souffert, l'était beaucoup plus. Néanmoins mon amitié pour Xion me plaçait dans la meilleure position pour la soulager. Je devais aller lui parler mais il n'était pas encore temps.
« Sybille, voudriez-vous me parler de Xion s'il vous plait ? Votre rencontre, ce que vous savez d'elle... »
Une comportement purement scientifique : récolter des données avant d'agir...
Inévitablement, je lâchais le peu d'intérêt que j'avais pour mon dîner et l'accrochait sans retenue à Xion, qui sans un mot, s'éloignait de nous. Lentement, j'aurais pu la rattraper, j'en avais envie et un faible élan en sa direction, s'il avait été plus combattif, m'aurait fait me relever. Quelque chose d'autre pourtant m'en empêchait et les mots de la dragonne ne firent que le confirmer. Mes yeux brins glissèrent alors jusqu'à elle, deux secondes à peine avant de les détourner et de laisser mon corps s'affaisser dans l'herbe. Je n'avais plus faim, elle ne me tiraillait déjà pas tout à l'heure, mais la plus du tout. Mon ventre était désagréable, une sorte de douleur lancinante, pas intense, mais perpétuellement là. Elle avait déjà fait son apparition depuis tout à l'heure, mais maintenant je la sentais vraiment. C'était inconfortable, suffisamment pour me faire changer de position, me détournant un peu plus encore de Xion qui s'éloignait, qui me quittait. C'était douloureux. Mon visage se crispait, mais j'écoutais malgré tout ce qui disait la dragonne. Il ne faisait plus aucun doute qu'elle s'adressait à moi cette fois-ci.
Enfin pas tout à fait, ses premiers mots évoquaient les souffrances de Xion, les siennes et également celles de tous les autres. Encore quelque chose à laquelle je n'avais pas accès, dont j'étais étrangère, face à laquelle j'étais impuissante. Voilà, comment pouvais-je espérer l'aider en quelconque manière sans connaitre le mal qui la rongeait ? Je pensais alors à ma propre manière de réagir, pour essayer de comprendre un peu mieux. Si je m'éloignais, il ne valait mieux pas me rattraper. Voilà ce qui m'avait retenu tout à l'heure. Si je souffrais, j'étais incapable de me l'expliquer et encore moins de mettre des mots dessus, pour que les autres comprennent, alors je cache, j'enterre en attendant que ça passe. Et si ça ne passe pas, tant pis, je vivrais avec. Mais je n'ai pas envie qu'elle vive avec ça éternellement, je sais à quel point c'est difficile, même à ma faible situation d'humaine, alors pour elle... cela devait être terrible.
La voix de la dragonne s'élève encore, cette fois-ci en me posant une question. Mon regard vient à elle, distraitement, avant de s'en détacher dans un soupir, se perdant dans l'ombre de la nuit caressant l'herbe fraîche. Que savais-je de Xion ? Qu'avais-je appris d'elle ? Nous avions finalement passé pas mal de temps ensemble, nous avions combattu ensemble, accomplis des atrocités dans lesquelles nous avions nagés avec satisfaction. Nous avions aussi partagé un moment plus tendre, plus intime, plus doux sans que je n'en ai éprouvé d'inconfort particulier. Mais elle, que savais-je d'elle et non de mes ressentis à son propos ? Incertaine, mon regard se tourna alors vers sa position supposée avant qu'il ne se perde à nouveau. Est-ce que la dragonne pouvait l'aider ? Est-ce qu'elle pouvait m'aider, moi, à la comprendre ?
❝ Son épreuve consistait en une sorte de choix, entre une lumière éclatante et une ombre épaisse. ❞ Je préférais alors gardé pour moi le choix que j'avais fais, après tout, il ne regardait qu'elle et moi. ❝ Elle m'a révélé mes désirs, s'est tenu à l'écart tout le long et ne s'est révélé qu'à la toute fin. C'est la première fois qu'elle sortait, avec moi... ❞ Je fronçais les sourcils un instant, était-ce seulement un bon choix. J'étais particulièrement mal placé pour lui venir en aide. ❝ Son amnésie est grande, il n'y a que quelques brides de souvenir qui lui reviennent parfois. Elle se souvient de l'ancien monde, de son environnement au moins, mais pas de ses rencontres et à priori pas des humains. En tout cas, on ne l'a jamais évoqué. Elle est comme un nouveau né, qui découvre tout, y compris la nature humaine. Je pense qu'elle doit être perdue, d'une certaine manière, mal à l'aise. ❞
Qui ne le serait pas en sa situation. Enfant divin, parmi une multitudes d'humains étrangers, sans attache avec d'autres Demi-Dieux. Il y a bien Galifey, mais ils ne se croisent finalement que rarement et je n'ai pas l'impression que l'entente soit si limpide que cela. Dans un monde que l'on ne connait pas, entouré par un tas d'étranger on se sent facilement...
❝ Seule. ❞
Je lâchais ce dernier mot dans un murmure qui me renvoyait inévitablement à ma propre expérience. J'avais été arraché à mon monde, propulsé dans un autre plein d'étrangers. Ils étaient pourtant humains eux aussi, mais j'étais seule au milieu d'eux, face à eux. Il m'a fallu des années pour me sentir à l'aise et trouver ma place et je n'y serais sans doute jamais arrivé sans Elle. Elle était mon attache, mon ancrage, mon soutien et j'avais toute confiance en elle. Parfois dure, parfois douce, à l'image de n'importe qu'elle mère je suppose, mais toujours présente. Mon regard retrouvait le vide qu'avait laissé Xion, j'aimerais être ça pour elle. Le voulait-elle ? Me le permettrait-elle et en serais-je seulement capable ? Ça me paraissait si difficile, je m'en sentais presque incapable. C'est pourtant moi qui l'ai propulsé dans ce monde, ce devait alors être à moi de l'y accompagner. Et puis, ne m'avait-elle pas dit qu'elle était sortie pour être avec moi, pas seule ?...
Sybille s'accorda quelques secondes avant de me répondre. Je ne la pressais pas. Ç'aurait été idiot et n'aurait fait que la brusquer, la braquer. Elle m'aurait alors répondue une bêtise bafouillante ce qui n'aurait été dans l'intérêt de personne, encore moins celui de Xion. Je profitais de ce temps pour grignoter le sanglier en faisant le moins de bruit possible. Une tâche bien difficile mais je comptais sur la compréhension de l'humaine. Ma taille me permettait de prendre des bouchées colossales du point de vu des humains, de fait il ne restait presque plus rien de l'animal. Je dois avouer que le goût du sang m'a considérablement manquée : certainement une caractéristique biologique des dragons, voilà une question que je n'ai pas pensée à poser à mes congénères.
L'humaine me parla alors rapidement de l'épreuve de Xion. Le choix entre la lumière et l'obscurité. Entre la terre et l'océan ? Les joies de la socialité et la solitude impitoyable des abysses ? La paix ou la guerre ? Je n'avais pas à en demander plus bien que ma curiosité me chatouillait : l'épreuve de chaque demi-dieu -le terme d'invocation étant une insulte à mes yeux- devrait rester dans l'intimité du lien partagé avec son compagnon humain. Elle sortait donc pour la première fois, tout comme moi. Quelle chance d'être libre au même moment. Je ne pouvais qu'être d'accord avec Sybille : Xion devait être complètement perdue. Depuis combien de temps était elle sortie ? Avait-elle eut suffisamment de temps pour nouer un lien avec Sybille ? Ce lien était la clef ! Elle devait nouer un lien de grande intimité avec son humaine et retrouver une amitié perdue : la mienne. Nous pouvions l'aider mais le voulait-elle ?
« Xion... était un être d'une extra-ordinaire curiosité. N'égalant pas certes celle de la scientifique qui est mienne. Elle s'émerveillait de tout assez facilement et son éclat de rire était contagieux. Si vous saviez ce que nous avons pu rire ensemble ! Elle était altruiste et toujours infiniment heureuse d'apporter son aide sans jamais réclamer de récompense en retour. Je la trouvais agaçante au début par le débit de paroles qu'elle était capable de tenir. Néanmoins elle est devenue une sœur, nous étions très proche. »
De toute mon existence, et Aer sait que je suis extrêmement âgée -silence ! Ah mais ou avez vous apprit la politesse ? Qui a osé tenter de me donner un âge ? On ne parle pas de l'âge d'une dame ! Un peu de respect, de galanterie que diable !... je chasse les galants, je vous l'accorde mais ce n'est pas une raison!- je n'ai été proche que de très peu de personnes. Pour la grande majorité, je suis un nuage de mystères et d'énigmes.
« Elle vivait dans les abysses de l'océan, si loin sous la surface que vous ne pouvez tout simplement pas l'imaginer. C'est un lieu sombre, dangereux, impitoyable et solitaire. Personne ne peu compter sur personne dans les profondeurs du monde. Pourtant, elle montait souvent à la surface et se mêlait aux humains. Un monde de lumière et de socialité tout simplement à l'opposé de celui ou elle est née. »
Un monde certes terrible mais fascinant à étudier. Je me souviens de ma surprise lorsque j'ai découvert un être vivant au delà des la dizaine de kilomètre de profondeur. Xion le savait depuis bien longtemps certes mais pour la science ce fut un instant historique !
« Vous devez prendre soin d'elle Sybille. Lui faire découvrir le monde, apporter de la joie dans son cœur. Voyez cela comme une quête. Vous aurez en récompense l'un des êtres les plus merveilleux de la création. La plus formidable des amies... Et vous me la rendrez en passant. »
Je m'étais adressé à elle telle une bienveillante, et certes puissantes, grand mère. Je ne la connaissais pas vraiment, néanmoins elle bénéficiait de mon soutien.
Laissant définitement la viande qui m'avait été offerte, la faim ne m'ayant jamais vraiment prise, mes épaules se laissaient alourdir par le poids de mes pensées. Observant le sol entre mes jambes, mon visage était tiraillé de toute part tandis que j'écoutais à présent les dires de la dragonne. Je dois dire que ses confessions avaient de quoi m'étonner. Elle dépeignait un portrait que je n'avais jamais vu chez Xion, emprunt d'une insousciance certaine. Comme celle d'une enfant. Ce dont elle me parlait était exactement ce qui me réfreinait chez eux, toujours trop enthousiastes, parlant à n'en plus finir. Cette association était étrange, mais pourtant faisait écho à mes pensées précédentes. A nouveau, mon regard se porta sur le vide que la renarde avait laissé. Elle était une enfant à qui on avait arraché l'insouciance, j'en étais presque convaincue maintenant.
La suite des l'histoire que me contait la dragonne raisonnait alors comme une berceuse. Me narrant l'existence de cette renarde qui m'aparaissait bien trop lointaine. Sa naissance et sa vie dans les profondeur. La lumière que le monde à la surface devait être. Celui des humains ? Je retenais un rire nerveux. Non, ce n'était pas vrai. Le monde des humains n'avait rien de lumineux, mais je pouvais concevoir que sa découverte avait eu avoir quelque chose d'assez inédit pour sembler positif. Je me grattais alors la tête en soupirant longuement, mais discrètement. Ce que me demandait la dragonne me paraissait impossible, pas dans l'état actuel. Pas dans le monde dans lequel nous étions. Pas avec la femme que j'étais aujourd'hui.
J'inspirais alors amplement, me laissant tomber à la renverse, le regard maintenant tourné vers l'étendue vaste et sombre qu'était le ciel. A présent, un long soupire vint evacuer les tensions accumulées, l'espace d'un court instant, mais important.
❝ J'aimerais bien... accéder à voir requête. J'aimerais sincèrement, mais je crains que le moment ne s'y prête pas. J'ai libéré Xion en des temps troublés, pour moi et mon peuple. Les joies y sont rares. C'est... ❞
Peut-être ma faute finalement. J'avais fais le choix de la trouver, j'ai tout fait pour qu'elle me choisisse et sorte à mes côtés. Et voilà que maintenant trônait sur mes épaules mon incapacité à lui rendre ce que le monde lui avait prit. Un autre aurait peut-être pu mieux faire, où j'en aurais été peut-être davantage capable plus loin dans le temps. Si toutefois j'étais encore en vie pour essayer.
❝ C'était sans doute trop tôt, ou trop tard pour la sortir de son temple. ❞
Lentement, je me laissais submerger par une sensation étrange, qui pesait lourd sur mon corps étendu. J'en oubliais presque la présence de la dragonne, aussi imposante soit-elle.
Les humains étaient ils en mesure de comprendre le choc que représentait la première sortie du temple pour un demi-dieu ? Il serait très intéressant d'effectuer une étude à ce sujet, je le notais dans un coin de ma tête. L'humain et le Demi-dieu n'ont déjà pas une perception du temps identique : pour le premier, Cinquante années représentent la moitié d'une vie quand pour le second ce n'est qu'un battement de cil, une période si courte qu'elle passe inaperçu au sein de l'histoire du monde. Pour l'être humain, le monde a toujours été ainsi depuis sa naissance : c'est celui d'Arcane, avec sa magie limité, ses frontières, son histoire politique et les temples divin. Mais pour un enfant des Dieux, il y a eu l'ancien monde, sa destruction puis une attente au sein du salle de pierre si longue qu'un humain ne peu tout simplement pas l'imaginer. La première sortie est un choc : notre savoir, notre expérience est solide, incroyablement solide et nous donnait une supériorité mais aujourd'hui, après les épreuves parfois au delà de l'imaginable qu'on vécu certains, ce savoir s'effondre remplacer par de l'ignorance d'un enfant pour ce nouveau monde. Les humains peuvent ils comprendre le choc que cela représente ?
D'après Sybille, Les temps étaient troublés. Ayant quittée le temple depuis peu, n'ayant pas encore eut accès à ma forme humaine ni à une bibliothèque j'étais aussi ignorante qu'une fourmi, chose particulièrement frustrante pour un être de savoir tel que moi-pauvre bibliothécaire qui me m'accueillera au sein de son établissement dans les temps prochains. Y avait-il un temps pour sortir un demi-dieu de son temple ? Ce n'est pas une question pour moi mais pour un maitre de la sagesse et de la philosophie. Je répondis à Sybille d'une voix douce de grand-mère :
« Ne laissez pas votre esprit s'enfermer dans la négativité Sybille, le malheur existe pour permettre la beauté du bonheur. Comme disait le célèbre Professeur Lecoincé : La régularité de la vie implique la mort. Remplacez vie et mort par bonheur et malheur. »
Je n'étais pas sure qu'elle comprendrait. Il était de coutume de traiter les scientifiques de fous dans l'ancien temps, de sorcier même au début des temps. Leur savoir offre simplement un point de vu différent et donc des incompréhensions. Le point de vu d'un demi-dieu est différent de celui d'un humain, le mien en tant que scientifique divine me place sur une autre échelle, une échelle qui m'isole. Oh sans conséquence : la solitude ne me dérange pas. Après avoir dit ses mots, je me levais tranquillement :
« Bien ! Cette gourmandise terminé, je vais devoir vous laisser. Je vais aller dire un mot à Xion avant de partir si vous me le permettez. Ce fut un véritable plaisir Sybille. Puisse la santé toujours accompagner. Au revoir. »
Je me dirigeai alors à la suite de Xion. Impossible d'être discrète de part ma corpulence-et je vous interdit de dire que je suis grosse ! Celui qui osera devra affronter mes crocs ! Je n'eus aucun mal à retrouver Xion. Je m'approchais tout en conservant une certaine distance :
« Xion ? J'ai été heureuse de te revoir ce soir. Je dois partir. Si tu le souhaites, tu me trouveras au village de Sirk au sein de la bibliothèque. Je ferais donner des consignes pour que tu y sois toujours la bienvenue. »
Je patientais une petite trentaine de secondes mais aucune réponse ne me fut offerte. N'importe qui d'autre aurait reçu mon irritation de m'ignorer ainsi mais avec le respect que l'on doit aux amis, je n'en réclamais pas. Silencieusement, à supposer que ce soit possible pour un dragon de ma taille, je fis demi-tour, déployais mes ailes et pris mon envol, devenant rapidement quasiment invisible dans les profondeurs du royaume des ténèbres.
Rang : Reflet Crédit Avatar : squidina Date d'inscription : 15/08/2018 Messages : 301Double Compte : Valion Lameblanche, Qilin Lù, Markus, Rao Liens vers la fiche : Qui j'étais Qui je suis Elément : Métier : Fléau Invocateur : Lagertha Inventaire :
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Silence. Une bulle de rien où s'installe le néant. L'enfant des abysses s'y repose. Ne pas réfléchir. Ne pas penser. Ne pas rêver. C'est mieux ainsi. Elle s'est éteinte au fond de la Rivière Blanche. Aucune créature ne semble vouloir la déranger. Ses sens s'éveillent aux fluctuations de l'eau. Seule la volonté de rester à disposition de son élue l'invite à ne pas se faire surprendre. Elle attend. Comme au sein de sa cellule, sans émotion. Sans rage cette fois. Du moins, pas en surface.
Puis une présence, suivie d'un appel. Pas celui qu'elle cherche, mais l'énergie dans le ton de la dragonne la fait remonter. Celle-ci part. L'envie de la retenir se manifeste, puis retombe faiblement. Leur lien, diffus et dénué de souvenirs pour sa part, ne suffit à palier son trouble. Xion aspire pourtant à des retrouvailles, et Pru'ha lui donne la réponse avant qu'elle pose la question.
« Je te verrais là-bas alors. »
Malgré son air distant, la conviction triomphe dans ces simples mots. La renarde observe la belle créature d'Aer s'envoler. Sa morphologie rend le spectacle particulièrement impressionnant, et impacte la nature environnante. Son départ signifie que Lagertha est seule dans la forêt. La fille d'Aqua revient donc à ce monde d'un pas lent. Mais prête à s'élancer en cas de danger.
Elle trouve son humaine plongée dans le silence également. Le temps s'effrite. Elle avise la viande délaissée et finit par demander de sa voix neutre et détachée.
« Tu vas le manger ? »
La faim l'ignore mais avaler une substance pourrait peut-être combler le vide qu'elle ressent. Tout dévorer, à l'image de Grandes Faux. La renarde soupire longuement. Elle a besoin de nager dans une direction précise. Ses yeux lumineux plongent dans les iris bruns.
Lecoincé ? Pour le coup, c'était ma gorge qui avait faillit se coincer avec l'un des rares morceaux de viandes que j'avais entreprit de manger. Quelle nom idiot, sérieusement. Enfin, cela n'enlevait rien à aux conseils que voulaient m'offrir la dragonne. Après avoir réussis à laisser passer ce bout de viande, je revenais à un air un peu plus concerné par ses paroles, mais mon regard allait toujours vers Xion, bien qu'une phrase m'avait interloquée par mon incapacité à la comprendre dans l'immédiat.
La régularité de la vie implique la mort. Remplacez vie et mort par bonheur et malheur. Qu'est-ce que cela pouvait bien vouloir dire ? De ce que j'en comprenais, il fallait que j'en déduis que la régularité du bonheur implique la malheur, mais j'étais loin d'être sûr. Je connaissais pourtant quelqu'un qui aurait certainement compris bien plus que cela, mais pour l'heure, me concernant c'était impossible. J'avais tenter de comprendre si intensément que je fus prise de court par le départ de la Dragonne qui s'éloignait déjà et à qui je répondais un simple :
❝ Au revoir ❞
En l'observant partir. Me voilà seule, pendant au moins quelques minutes et pourtant, je n'avais su en profiter pour réfléchir. De ma position, j'observais de loin la Dragonne qui était encore parfaitement visible et admirait son envol, me rappelant aux souvenir d'Armalys. Un autre échec. Je n'avais pas su la garder auprès de moi, même si je n'avais eu aucune intention d'aller contre sa volonté qui était de me quitter. Une divergence d'opinion trop grande pour passer outre et si... cela arrivait avec Xion, ou même Galifey ? Non, ce serait trop pour moi. Pourtant, malgré la brume qui guidait notre relation, j'étais bien incapable de savoir comment la dissiper. Peut-être me fallait-il songer à demander de l'aide, moi qui ne le faisait jamais.
C'est alors que Xion revint vers moi, attirant mon regard brun à elle, presque immobilisé par son retour et surtout par mon incapacité à l'accueillir comme je le devrait. Ce sont alors ses propres mots qui m'arrachèrent à ma torpeur.
❝ Euh, non. Finis-le si tu veux. ❞
Lui répondit-je en me relevant assez maladroitement, l'observant alors pendant quelques instants agir avec une indifférence qui commençait à sérieusement me peser. Pour autant, si mon envie d'y remédier était bien présente, j'étais aussi bien trop apeurer à essayer et envenimer les choses. Me connaissant, c'était l'un des scénarios le plus probables. Alors je finis par baisser les yeux, sans les accrocher à sa présence, avant qu'elle ne les rappelle à elle.
❝ On avance. ❞
Lui répondis-je dans un souffle, avant de me défaire pour rejoindre Gyllir. M'installant sur son dos rapidement, j'attendais que Xion finisse son repas avant de repartir. Cette nuit était à l'image de mes sentiments, si elle me permettait d'avancer sans me poser de question, elle n'illuminait pas assez mon chemin pour savoir qu'elle route arpenter afin de trouver une solution à un problème qui m'était finalement inconnu. En ma conscience, j'avais fais le choix de ne pas persévérer dans une voix où une autre pour le moment, mais mon cœur est très souvent plus fort que ma tête. Je lâchais alors finalement une simple question, à laquelle je ne m'attendais même pas à une véritable réponse, mais cette tension commençait à me ronger les os.
Rang : Reflet Crédit Avatar : squidina Date d'inscription : 15/08/2018 Messages : 301Double Compte : Valion Lameblanche, Qilin Lù, Markus, Rao Liens vers la fiche : Qui j'étais Qui je suis Elément : Métier : Fléau Invocateur : Lagertha Inventaire :
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Englouti en quelques coups de crocs. Voilà le sort qui cueille le gibier à peine les mots de son élue tombés. Xion déglutit bruyamment, la gueule à nouveau ensanglantée. Une digne prédatrice insensible à de telles considérations. Plus de vide mais un malaise. Le même que tout à l'heure. Il émane clairement de Lagertha. Mais il semble avoir trop de force pour venir d'une seule source. La renarde s'ébroue. Comme pour le dégager de ses écailles entre lesquelles il prend plaisir à se loger. En vain.
Sa pitance achevée sans gourmandise, elle se rapproche machinalement des montures. Kuro suit le pas, attaché à la jument noire. Et Xion aussi, avec son lien invisible. Elle soupire. Elle regrette d'avoir eu à quitter la grande rivière. Le duo progresse sous la tension. L'enfant des abysses oublie quelque peu de sonder les environs. Elle cherche à retrouver le paisible silence des profondeurs. Une question tente de percer sa carapace, au bout d'un temps. Elle relève distraitement la tête vers son élue.
« Je ne sais pas. »
Puis la rabaisse. Son museau n'est qu'à une trentaine de centimètres du sol. C'est une honnête réponse. Finalement, Xion réalise même qu'elle préfère continuer à chercher dans son coin. Pour l'instant. Sans méchanceté, elle ajoute :
« Je n'ai pas envie de parler. »
Puis accélère la cadence pour se retrouver devant. Son instinct prend le relais. Ses sens se tendent. Cette concentration dédiée à leur sécurité lui suffit à trouver ce silence. Pour l'instant. Elle ne réfléchit pas. Elle écoute. Observe. Et agira si nécessaire. Il n'existe peut-être aucun autre besoin.