Quelle agréable soirée. Je me trouvais sous forme humaine sur la plage d'une île de la péninsule du triangle d'Aljimer. J'avais passée la journée au sein du village de cette île parce que je m'étais disputée avec le nouveau dirigeant du port fortifié, je le laissais réfléchir et ne doutait pas un seul instant qu'il viendrait s'excuser en personne sous peu. Les villageois avaient donnés une grande fête en mon honneur, j'ai insisté pour pêcher moi même les poissons nécessaire au festin.
C'était une île tropicale à quelques dizaines de kilomètres d'un petit continent montagneux. La géographie de cette région était intéressante : les îles étaient tout simplement paradisiaque et les vagues parmi les plus puissantes du monde en raison des profondes abysses océanique séparant les îles.
Nous étions donc installés sur la plage. La totalité du village était là, du plus jeune au plus vieux. Face à la mer, j'étais occupée à tricoter une gigantesque couverture colorée et couverte de runes complexes avec rien de moins que quatre aiguilles. Une grosse corbeille de fruits avait été abandonnée à mes pieds. Au début elle circulait de mains en mains mais les humains l'avaient finalement oubliés. Car chacun d'entre eux buvait mes paroles.
« … Mais Ragnok était trop têtu pour écouter et poussa le bateau droit sur la tempête. Alijah barricada alors le port fortifié, abandonnant le capitaine à son sort. Le siège de l'ïle d'Aljimer fut l'un des plus courts de votre histoire. La flotte de Belkias se positionna en triangle autours de la ville. »
Avec mon aiguille, libérée de sa maille pour en rechercher une autre, que je pointais d'un air menaçant vers les villageois, je dessinais un triangle dans les airs pour illustrer mon récit. Le silence le plus complet régnait parmi les humains, une extrême concentration animait, ou plutôt inanimait, les plus jeunes. Je repris mon récit telle la maitre conteuse que j'étais déjà à cette époque.
« Or le seigneur de la côte noire ne connaissait pas les traitres récifs et hauts fonds de la région et était persuadé que les montagnes côtières sur le continent voisin allait freiner la tempête. Elle les frappa de plein fouet ! Pour le peuple d'Alijah ce ne fut qu'une ridicule formalité. En revanche, Belkias perdit les trois quart de sa flotte. Les bateaux survivant furent tous, sans exception, même le terrible navire impériale, ravagés et immobilisés par les récifs quand ils ne furent pas jetés sur les fortifications à moitié broyés. Les troupes d'Alijah attaquèrent dès la fin de la tempête, les soldats de Belkias, encore sonné par la force de l'affrontement entre Aer et Aqua, n'eurent tout simplement aucune chance. Alors que le petit seigneur de l'ïle d'Aljimer était dépassé par un nombre cent fois supérieur à ses propres troupes, il anéanti le seigneur de la côte noire sans aucune perte. Ainsi je vous ai conté la véritable naissance de la légende du triangle d'Aljimer. »
Car c'était le lieux dans lequel nous nous trouvions, le célèbre et traitre triangle d'Aljimer qui, d'après la légende, aurait engloutis plusieurs centaines de navires, la totalité de la flotte de guerre soit disant invincible du seigneur de la côté noire, le redoutable Belkias. Jamais je n'irais vérifier mais au fond des océans se trouvait l'un des plus grand cimetière de bateau du monde actuel.
« Madame Pru'ha ! Et Ragnok alors ? »
« Ha ! Ce gros bêta a été retrouvé dix ans plus tard sur un îlot ridicule à une centaine de kilomètres de là seulement. Son navire soit disant insubmersible s'est transformé en brindilles durant son combat contre la tempête. Ragnok a sacrifié son navire et ses marins mais n'a pu sauver de sa cargaison qu'un petit coffret. »
Je tricotais avec vitesse et énergie, mes aiguilles étaient agités d'une danse énigmatique aux yeux du profanes. L'art du tricot est en effet beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît au premier abord, surtout après des milliers d'années de pratique. Ce que les humains ignoraient et qu'un autre demi-dieu pouvait très certainement sentir c'est le flux continue de magie qui circulait dans mes outils nourrissant la couverture naissante.
« Il y avait quoi dans ce coffret ? »
« Des lettres mon enfant. Les lettres d'amour qu'il a échangé avec sa compagne morte de chagrin après la bataille du triangle d'Aljimer car elle pensait que la tempête avait avalée Ragnok. »
J’interrompis la danse de mes aiguilles pour compter mes mailles et modifier la position de deux d'entre elles. Respectueux, les humains attendaient en silence pour continuer de me poser des questions et certainement me réclamer une autre histoire.
Rang : Reflet Crédit Avatar : squidina Date d'inscription : 15/08/2018 Messages : 301Double Compte : Valion Lameblanche, Qilin Lù, Markus, Rao Liens vers la fiche : Qui j'étais Qui je suis Elément : Métier : Fléau Invocateur : Lagertha Inventaire :
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Aujourd'hui s'annonçait taquin sous les auspices des Quatre. Xion s'élança à toute vitesse le long des courants marins. Pas de tâche au programme, juste des réjouissances. Il se laissa entraîner dans une zone réputée pour sa traîtrise. Ainsi il valsait au gré des humeurs de sa Mère. Et il riait, secoué en tout sens dans une danse chaotique. Et il en redemandait, avide de ces sensations fortes que sa nature divine assimilait à un pur divertissement.
Puis il sentit une présence familière. Ses écailles en frémirent de joie. Pru'ha, la maîtresse du savoir. Il bondit à sa rencontre, saluant ses enfants sur son passage. Mais la fille d'Aer était fort affairée et lui proposa de fêter leurs retrouvailles le soir même, en compagnie des humains. Enthousiaste, le renard replongea, débordant d'énergie.
Une heure plus tard il lézardait sur la plage, le corps léché par les douces vagues. L'aventure l'avait quelque peu fatigué tout de même ! Le repos cueillit son esprit sur une brise chaude et agréable. La faveur de la nuit lui était toujours plus douce, aussi il attendit qu'Ignis se couche, dans une relative patience.
Xion écoutait très attentivement, son regard lumineux encore plus brillant qu'à l'ordinaire. Et ce n'était pas juste l'obscurité qui soulignait sa lueur avec beauté. Sagement allongé derrière le groupe d'humain, il observait son amie. Ses gestes et ses mots le captivaient à égalité. Les fibres naturelles s'organisaient sous les impulsions magiques. Les images se peignaient dans son esprit divin avec le langage des hommes.
Le passionnant récit terminé, ses moustaches s'agitèrent. Il restait tout plein de zones d'ombres pour son esprit simple, et donc tout autant de questions. Mais il fut devancé par ses enfants et, avec affection, leur laissa tout le loisir de s'exprimer. La satisfaction de les voir aussi intéressés valait l'attente.
Il gagna ainsi l'occasion de ressasser cette histoire. Foncer en plein dans une tempête. Quand même, les humains sont un peu idiots parfois. L'être d'Aqua ne put retenir son amusement, qui se mua en rire à mesure qu'il conscientisait la grossièreté de cette idée. Xion roula sur le dos, arrosant les plus proches de quelques gerbes sableuses. Une fois calmé, il s'exclama :
« Pourquoi ils n'ont pas écouté ma Mère et la Tienne ? Tout le monde sait qu'il ne faut jamais s'interposer lorsqu'ils se disputent ! »
Mais ça n'était pas vraiment une question en soi. Il savait que tous n'avaient pas le même esprit. Et le danger n'apparaissait pas de la même façon. Comme la fois où la dragonne avait foncé vers un calamar géant alors que c'était complètement ridicule !
D'autres questions suivirent. Aucune ne souleva celle qui le taraudait. Pourtant, la créature abyssale s'était attendue à ce que tout le monde la pose. Alors finalement, il prit l'initiative. Son regard curieux fit face en toute innocence à l'enfant du Ciel.
Bien sur j'avais remarquée l'arrivée de Xion. Je fus heureuse de le voir arriver mais n'en montrait rien : nous aurions tout le temps de nous saluer plus tard. Je n'interrompis aucune de mes activités, ne lui adressais pas même le moindre geste, seulement un regard pour lui signifier que je l'avais bien vu. Je savais qu'il comprendrait : nous avions passé suffisamment de mois ensemble pour apprendre à nous connaître.
Beaucoup d'humains ne comprirent pas quand il éclata de rire à s'en rouler sur le dos, l'explication qu'il donna donna naissance à plusieurs sourires. Beaucoup, qui ne l'avais pas entendu arrivé, s'émerveillèrent de le découvrir là. Il me posa une question, je lui répondis avec une douceur infinie :
« L'amour est le plus merveilleux cadeaux de nos parents mon ami. Il s'agit d'un lien d'attachement fort entre deux êtres, c'est une affection puissante que nourris pour quelqu'un d'autre.
-C'est quand papa il colle sa bouche sur celle de maman ! » S'écria un très jeune enfant.
Un éclat de rire secoua tous les humains sauf le père en question qui donna une petite tape derrière la tête de son enfant, allant jusqu'à réussir l'exploit de m'arracher un sourire amusé.
« Prend par exemple le lien qui uni une mère à son enfant Xion, visualise la relation entre eux. Il s'agit d'amour.
-Mais c'est aussi quand papa il colle sa bouche sur celle de maman ou pas ?
-Raaah ! Mais c'est pas un peu fini avec ça petit garnement ?
-Fallait être plus discret mon vieux !
-Tiens Xion tu vois ? Ça c'est aussi de l'amour ! »
Une nouvelle vague de rire traversa la foule. Se rappelant soudain l'existence de la corbeille de fruits, celle ci voyagea de nouveau parmi les humains. Un enfant s'écria :
« Vous pourriez nous raconter une autre histoire ?
-Oh oui s'il vous plait dame Pru'ha !
-Encore une histoire dame Pru'ha !
-N'avez vous pas été assez gourmand pour ce soir ? Il est tard, vous devriez être au lit. »
Une gentille vague de protestation enfantine s'éleva soutenu par beaucoup d'adultes. Je fis sembla d'être imperturbable, les yeux baissées sur mon tricot.
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Un lien d'attachement fort entre deux êtres. Ça, le renard d'eau le conscientisait très bien. Il n'avait qu'à poser ses pupilles dorées sur la dragonne pour assimiler le terme à leur relation. D'après cette description du moins. Idem pour celle avec sa Mère. Son amour inconditionnel le berçait depuis sa tendre naissance dans les abîmes maritimes. Il en devenait justement difficile d'utiliser le même terme pour tout autre être.
La suite le perdit. Xion ne se voyait pas poser sa bouche sur celle de son amie. Déjà, sous son apparence humaine, elle faisait dix fois la taille de la sienne. Et puis quel intérêt de la poser où que ce soit si ce n'était pour se nettoyer ? Ses enfants en savaient-ils plus que lui ? Ou étaient-ils aussi perdus ? La réponse de Pru'ha ne lui apporta aucune clarté. Parlait-elle du fait de coller ses lèvres sur d'autres ou du rapport entre l'homme et le garçon ? Les rires retentirent, repoussant l'interrogation dans un coin de son esprit. Ses babines s'élargirent et il se joignit à la vague d'amusement qui avait conquis le public.
La volonté de la conteuse de mettre un terme au récit le déçut également. Xion ne souhaitait pas laisser toutes ces belles images s'évanouir dans le sable. Pas encore. Il y avait tant d'histoires à vivre. L'enfant d'Aqua écouta les humains protester gentiment. Un sourire étreignit ses sens. Il secoua la tête puis éleva calmement la voix.
« Ce n'est pas comme ça qu'il faut faire. » Il engloba l'assemblée d'un regard empli de tendresse avant de reprendre avec douceur : « Ô grande maîtresse du savoir, pourriez-vous nous faire don d'une autre de vos incroyables histoires ? »
Depuis le temps, le renard savait comment brosser la dragonne dans le sens des écailles. Mais s'il jouait avec sa fierté, il n'en pensait pas moins. Son respect pour la fille du Ciel n'avait d'égale que son admiration. Quelle que fut la décision de cette dernière, la conscience du renard revint à cette notion d'amour. Elle lui échappait et il s'en trouvait frustré.
Allongé sur le dos, il contempla les petites lumières d'Ignis qui s'accrochaient à la peau d'Aer. Sa Mère était partie en décrocher deux pour faire ses yeux, lui avait-on dit un jour. Ça a dû être fatiguant et difficile. Est-ce que l'amour correspondait à cet acte aussi ? Un grognement indécis vibra dans sa gorge. Une fois que la dragonne termina son récit ou qu'elle ait congédié les insulaires, il s'approcha de sa forme humaine en trottinant. Il voulait comprendre. Sinon il tenait la désagréable impression de passer à côté de quelque chose. Et une idée très précise avait germé dans ce but.
« Et si on allait chercher les lettres de Ragnok ? »
Sa queue battait nerveusement l'air. L'excitation montait et le gardait difficilement en place. L'envie de plonger à la recherche d'un trésor lui rappelaient leur première aventure et les nombreuses tâches effectuées pour la "scientifique". Pourquoi ne pas en ajouter une de plus à leur palmarès ?
La vague de protestations n'eut tout simplement aucun effet. Je continuai de tricoter comme si les humains discutaient entre eux. La couverture avait déjà atteint une taille respectable si bien que je pouvais interrompre mon travail quand je le souhaitas. Pourtant je continuai de travailler dessus intégrant des runes et des motifs complexes aussi facilement qu'un humain prend une respiration. Déjà à cette époque les humains ne pouvaient rivaliser avec moi dans l'art du tricot : j'avais des millions d'années de pratique. J'étais à ce point maitre du tricot et de la magie que je réussissais à combiner les deux arts. Aussi longtemps que ma magie vivra, cette couverture protégera celui qu'elle couvre du froid et des maladies, peut importe la température. Elle soulagera les articulations douloureuses et favorisera la détente pour offrir un parfait repos réparateur. L'oeuvre qui naissait entre mes mains sera d'une valeurs inestimable et pourtant je l'offrirai pour rien d'autre qu'un sourire à un vieil homme de ce village.
Je fus sur le point de céder devant la formulation de Xion qui m'arracha un sourire amusée. Il avait bien comprit comment obtenir ce qu'il voulait de moi, je me sentirai coupable quoi qu'il arrive. Si je cédais, les enfants dormiraient très peu et victimes de fatigue le lendemain. Si je refusais, j'allais décevoir tout ces humains que j'aimais bien. Je me vengeais aussitôt en refusant de répondre durant de longues secondes. Puis :
« Non Xion, il faut que les enfants aillent au lit. Du calme du calme ! Je vous promet de revenir dans quelques jours pour vous raconter une nouvelle histoire mais à la seule et unique condition que vous rejoigniez votre lit sans faire d'histoire. »
Les enfants commencèrent à se lever, certains protestèrent parce qu'ils ne voulaient pas attendre pour une nouvelle histoire mais ils furent encadrés par les plus grands et les parents. Et soudain Xion déposa son idée, tout le monde s'arrêta pour me regarder. Je répondis simplement :
« Les lettres de Ragnok se trouve au château d'Aljimer non loin d'ici. Elles sont conservées avec soin.
-Vous pourriez nous les lires ?
-Oh oui s'il vous plait dame Pru'ha !
-Le roi servant actuel me doit un service, je pourrais lui demander d'effectuer une copie des lettres pour vous si vous le désirez. Xion nous partirons demain matin lorsque j'aurai terminé mon ouvrage. Aller maintenant les enfants, tous au lit ! »
Tout le monde s'en alla petit à petit pour nous laisser seuls avec Xion... à l'exception d'une petite fille d'environ 6 ans. Très timide, elle s'approcha de moi. Je stoppais mon tricot pour m'adresser à elle avec une grande douceur, presque avec amour :
« Qui a t-il mon enfant ?
-Dame Pru'ha... Mon papa est parti à la pêche avec mon chien... Il part jamais avec lui d'habitude, mon chien il dort avec moi... Il a dit qu'il en avait besoin... Que ce serai juste pour cette nuit... J'ai peur toute seule la nuit... Je ne veux pas aller dormir... Est-ce que je peu rester avec vous et votre ami dame Pru'ha ? »
La petite était au bord de larmes. Touchée, je posais mon tricot et ouvris les bras, la petite s'y blottie et je la serrai contre moi.
« Xion mon ami ? Accepterais-tu de passer la nuit avec cette petite pour la rassurer s'il te plait ? »
Je connaissais la réponse, je savais qu'il dirait oui. Aussi avec une grande douceur j'expliquais à la petite fille avant de la pousser gentiment vers le fils d'Aqua :
« Mon enfant. Xion va veiller sur toi cette nuit. Il est très gentil et prendra soin de toi. Quant à moi je ne bouge pas d'ici, je suis tout près de ta maison. Xion, je te présente Lyna. Lyna, voici Xion. »
Je terminais en lui chuchotant quelque chose à l'oreille. La petite ricana, s'approcha de Xion en ouvrant grand les bras puis lui fit un câlin. Elle s'éloigna avec lui tandis que je restais seule sur la plage à terminer mon ouvrage. L'aube me trouvera occupée à lire un livre, la couverture terminée soigneusement pliée à mes pieds.