Des rayons de lumière traversaient la fenêtre de la chambre et terminaient leur course directement sur le visage d’Elfazelle. Elle se retourna un peu, encore à moitié endormie, essayant inconsciemment de les éviter.

L’odeur de la pièce ne lui paraissait pas familière, et les sons non plus… c’était étrangement calme… Pas de bruit de basse-cour, ni de chien aboyant…

Elle ouvrit les yeux par réflexe, cherchant une explication et fut surprise l’espace d’un instant.

Ce lit n’était pas le sien, cette chaise et cette petite commode non plus, et encore moins ce miroir joliment ornementé.

Elle se rappela instantanément la veille : aucun de ces meubles ne lui appartenait, tout simplement parce qu’elle n’était pas dans sa chambre. Elle avait atterri dans une belle demeure de la capitale, un peu à l’écart des rues commerçantes ; cela dépassait largement toutes ses espérances. Elle s’était en effet imaginée au mieux passer sa première nuit à Lüh dans une petite chambre de taverne. Sa destinée était donc bien de quitter son village natal, elle en était maintenant certaine ; comment expliquer autrement tout l’enchaînement de situations d’hier ?

« Oh il faut que je me dépêche, Rym m’avait dit à la première heure dans le jardin ! Il a l’air d’être tôt vu la couleur du ciel, mais mieux vaut se dépêcher au cas où. »

Elfazelle se leva d’un bond et se dirigea vers le miroir. Il y avait quelques ajustements à faire avant de descendre : déjà adopter une tenue plus adaptée à l’activité physique qui l’attendait, et ensuite faire en sorte de ne pas être gênée par cette tignasse brune.

Elle enfila un pantalon de toile beige ajusté, et un haut près du corps assorti.

Elle n’appréciait pas beaucoup s’attacher les cheveux ; ils constituaient une cachette derrière laquelle se réfugier et se sentait plus vulnérable lorsqu’elle ne les sentait pas sur son visage.

Elle opta alors pour une queue de cheval haute, laissant tout de même sa frange de côté comme d’habitude.

Une fois globalement satisfaite de son reflet dans le miroir (hormis les traces de draps encore visibles sur sa joue), Elfazelle se dirigea vers la porte.

« Ah! Mon arc ! »

Nul doute qu’elle en aurait besoin, sa mentor ayant été très claire sur le fait que le combat à distance serait plus adapté pour elle (et Elfazelle était d’accord sur ce point).

Elle empoigna rapidement son arc et son carquois puis dévala les escaliers, manquant de perdre l’équilibre.

« Plus que quelques pas pour rejoindre le jardin. Ça va, le soleil n’est pas encore totalement levé. »

La porte de derrière donnait sur un jardin bien vert, redécoré pour l’occasion avec quelques mannequins d’entraînement, une cible de tir et divers instruments pour la chasse posés sur une table.

Rym était de dos, penchée au-dessus de la table. Son physique athlétique l’impressionnait toujours autant.

Ne sachant pas si elle l’avait entendue arriver, Elfazelle préféra s’annoncer pour éviter toute réaction imprévue qui pourrait la conduire à se retrouver par terre comme la veille :

« Bonjour Rym ! Par quoi on commence ? »

Elle arborait un large sourire et ses yeux étaient emplis d’excitation ; toute sa vie elle avait attendu le moment où elle pourrait enfin manier une arme.

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L’entraînement tant attendu

Rymaïn & Elfazelle
Lüh, propriété de Blanchecime ∴ Ignis 59

Malgré l'approche imminente d'Aer, les rayons de son frère donnent encore avec chaleur sur la capitale. Voilà pourquoi la nordienne apprécie un entraînement matinal. L'aube porte toujours une douce fraîcheur, et permet des conditions idéales sous ce ciel clair... Pour débuter. Il faudra profiter des aléas du temps par la suite, afin qu'Elfazelle soit apte à agir en toutes circonstances. Bridée par le froid, aveuglée par les brumes, ou encore alourdie par une pluie battante, ... C'est là de nombreuses possibilités à prendre en compte. Savoir se battre et tirer ne suffit guère face à un défaut de capacités adaptatives.

La jeune disciple en possède-t-elle, qui ne demandent plus qu'à être travaillées, puis perfectionnées? Ou est-ce qu'il faudra lui apprendre des rudiments essentiels, qui demandent davantage de temps et d'efforts? Nous verrons bien.

Une large cible sur pied installée plusieurs mètres derrière elle, Rymaïn tourne autour d'une table sur laquelle sont disposés, un à un, quelques objets utiles à la chasse. Vêtue simplement et sobrement, elle porte une chemise de coton vert bouteille, sans manches et boutonnée, sur un pantalon de cuir brun, à peine moulant. Des bottes plus légères qu'à l'accoutumée, faites en peau d'impa, accompagnent sa démarche. Son arc repose contre la table, décordé. Lorsqu'elle place un tissu qui, une fois ouvert, dévoile des algues violettes à l'odeur plutôt désagréable, un bruit retenti dans son dos.

Elle se crispe, se souvenant d'avoir donné une partie de son prénom exact la veille. Malgré la froideur survenue un instant plus tôt, une forme d'amabilité se glisse dans son timbre  quand elle s'adresse à la jeune femme. "M'appeler Rymaïn sera un bon début. Maintenant que je n'ai plus à me méfier de ta personne, tu peux connaître et utiliser mon prénom en entier." Jusqu'à présent, un seul être sur cette île emploi un diminutif pour la nommer. Elle n'est pas certaine d'accepter que quiconque d'autre le fasse. Pour l'instant du moins... Peut-être que ses certitudes changeront avec le temps?

Ses prunelles olives dévisagent de bas en haut la petite et fine silhouette. Ses lèvres se délient, pour poser une question qui s'avère inutile au son résonnant dans le dos d'Elfazelle. Trévis, un employé de la baronne, s'aventure au dehors, les bras chargés d'un plateau. La nordienne soupire, déjà consciente des raisons de sa présence. "Mademoiselle Amalanya, vous avez oublié votre petit déjeuner."

La rouquine a demandé à l'homme, plus tôt dans la matinée, de bien veiller à ce que son élève avale quelque chose. De toute évidence, cette dernière n'est même pas passée par les cuisines. La guerrière aux masses indique une petite caisse de bois fermée, et le plateau y prend rapidement place, tandis que l'homme s'incline avant de repartir. Sur l'argenterie ornée de fines gravures, se trouvent plusieurs victuailles -salade de potatopos agrémentée de pipailles et assaisonnée de radicine, à côté, quelques crocanrons et une petite assiette avec du filet de rudis frais- le tout accompagné d'un pichet d'eau fraîche et un autre de jus d'oranzine.

"Mange. Tu pourras m'écouter en même temps." Elle ne compte pas entamer les leçons par l'exercice au tir de suite, de tout façon. Sans se soucier de l'odeur nauséabonde des algues, qui pourrait indisposer la jeune femme, elle commence à lui indiquer la nature et l'utilité de ce qui est présenté sur la table.

En premier lieu, les algues violettes. "Il s'agit d'un chasse-monstre. Son odeur, et ses propriétés en général, font fuir les créatures de puissance moyenne. Les plus faibles -sifflets, élémentaires, magmapauds... comme les plus fortes -Maskur, goliaths, raparius... ne sont pas affectées par ses effets." Après lui avoir accordé quelques secondes d'observation, elle referme le tissu avec un lien, puis le glisse dans son sac sans fond afin de les débarrasser de l'odeur incommodante. Elle ajoute en parallèle.

"Tu découvriras les espèces de monstres qui peuplent l'île au fur et à mesure, ainsi que leurs caractéristiques connues, ne t'inquiète pas."

D'un geste, elle saisit un petit sachet et invite la jeune femme à s'approcher pour en voir le contenu. Il s'agit de poudre à félins, dont elle explique l'utilité, comme précédemment avec le chasse-monstre. D'autres objets intéressants sont soumis à l'œil attentif de son élève. Rymaïn ne le montre pas vraiment, mais elle est satisfaite de voir Elfazelle prêter une telle attention à ses explications. Craignant ne pas savoir comment s'y prendre pour lui apprendre, elle éprouve un soulagement particulier. Peut-être un soupçon de fierté personnelle? D'un geste du fief elle repousse cette idée un peu étrange.

Après avoir fait le tour des différents produits exposés, dont une toxine d'esprit brumeux, ainsi qu'un onguent du sans odeur et quelques autres, elle finit de replacer chaque objet sur la table, puis se tourne vers Elfazelle.

"Voilà pour l'instant. Si tu n'as pas de questions précises, tu vas commencer à t'exercer au tir." Malgré une intonation toujours un peu distante et sur la réserve, elle se montre ouverte et encline à partager davantage si besoin.

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Lorsque Rym lui indiqua de l’appeler Rymaïn, Elfazelle repensa à la journée de la veille ; elle aussi n’avait donné qu’une partie de son nom pour éviter d’être retrouvée trop facilement.

« Peut-être qu’elle cherche aussi à éviter quelqu’un ? Le vieil homme qui l’a arrêtée hier ? »

Mais le moment n’était pas opportun pour ces questions.

Rymaïn l’observa silencieusement un instant, provoquant un léger malaise. Elfazelle attrapa son bras gauche avec sa main droite, ne sachant que faire.

« Elle regrette peut-être sa décision, vu mon physique…
Voilà, elle va me dire qu’elle a changé d’avis. »

Avant que Rymaïn ne se soit exprimée, un bruit se fît entendre dans le dos d’Elfazelle. Elle se retourna pour voir de quoi il s’agissait et fût surprise de constater la présence d’un employé de maison chargé d’un plateau copieusement garni.

Elle bredouilla rapidement lorsqu’elle compris que c’était à son attention :
« Ah ! Euh… merci beaucoup… »

Puis elle l’observa, gênée, aller poser le plateau à un endroit désigné par Rymaïn et le salua d’un hochement de tête.

« Ça commence bien… Moi qui ne voulais pas me faire remarquer... Si je n’étais pas partie aussi vite, j’aurais peut-être pensé à passer aux cuisines… »

Elle releva les yeux pour s’excuser de l’interruption, mais fût devancée par sa mentor, qui lui ordonna de manger.

Elle n’avait pas vraiment faim, l’appréhension et l’excitation lui coupant quelque peu l’appétit.

Néanmoins, elle se dirigea docilement jusqu’au plateau joliment décoré et piocha quelques crocanrons. N’étant pas particulièrement adepte de ces fruits, cela avait au moins le mérite de lui occuper les mains.

Tout en continuant de mastiquer, elle se dirigea vers la table où se tenait son entraîneuse.

Une légère brise lui fit plisser le nez et froncer les sourcils alors que Rymaïn expliquait tranquillement l’utilité d’une sorte d’algues violettes.

Elfazelle avait déjà croisé plusieurs des monstres énoncés lors de ses lectures, certains étaient même représentés.

Elle réfléchit à un exemple de monstre moyen, pour vérifier qu’elle avait bien compris.

« Donc ça n’affecte que les monstres comme les Oboros ? »

Elle fixa les algues, et demanda un peu embarrassée :
« Et l’odeur qui fait fuir les monstres, est-ce que je suis censée la sentir aussi ? »

Elle trouvait cela étrange que la rouquine ne montre aucun signe d’inconfort, alors que cela commençait à masquer le goût de la bouchée qu’elle mastiquait.

Appréciant que le sachet d’algues disparaisse de sa vue, Elfazelle porta son attention sur le nouvel objet qui lui était présenté.

« De la poudre à félins ? Ça marche sur les chats aussi ? »

« Mais quelle question bête !   »
Elle était vraiment très excitée pour oser parler sans réfléchir. La brunette chercha instinctivement ses cheveux pour les plaquer sur son visage avant de se rappeler qu’ils étaient attachés.
Elle s’empressa d’ajouter en baissant les yeux :
« C’est idiot, passons à la suite »

Ce fut ensuite au tour de la toxine d’esprit brumeux. Elfazelle allait s’approcher pour regarder de plus près, mais les explications sur ses effets par inhalation la firent reculer rapidement.

L’onguent du sans-odeur paraissait moins risqué à utiliser.
« Et jusqu’à combien de temps fonctionne l’onguent ? Est-ce que ça dure plus longtemps si on met une grosse couche ? »

Cette fois-ci, elle attendait sincèrement une réponse à ses questions.

Elfazelle était fascinée par tous ces objets et pensa dans un murmure:
« En fait il n’y a pas forcément besoin d’avoir une force surhumaine, tant qu’on est bien équipé et qu’on sait s’en servir. »

La théorie était terminée, et il fallait maintenant passer à la pratique. Un mélange d’enthousiasme et de peur emplissait son corps :
« Ce serait bien que je ne me ridiculise pas… au moins pas trop… »

Ne sachant comment s’y prendre, elle se saisit de son arc et d’une flèche, se plaça à plusieurs mètres de la cible et demanda très sérieusement :
« Quelle est la bonne posture à adopter ? »

Elle était bien décidée à appliquer à la lettre les indications que Rymaïn allait lui donner.

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L’entraînement tant attendu

Rymaïn & Elfazelle
Lüh, propriété de Blanchecime ∴ Ignis 59

En plus de s'intéresser, la jeune femme s'implique dans les explications amenées. Faisant montre de connaissances déjà acquises. Bien. Cette assurance la conforte dans son choix, elle demeure modeste, mais n'hésite pas à prendre sa place. Leurs échanges s'avèrent plus... Agréables? Que prévu.

Rymaïn hoche le fief à la mention des Oboros, confirmant sa déduction. Quant à l'odeur du chasse monstre... Elle ne saisit pas de suite le sens de la question. Bien sûr, qu'elle doit aussi la sentir, à moins d'avoir le nez bouché, le contraire serait difficile. La réponse se délie simplement, sans chercher plus loin. "Evidemment."

Elle hausse un sourcil à la question suivante. N'ayant jamais jugé utile d'y réfléchir, ne voyant aucun intérêt à cela. Mais oui, la poudre doit probablement agir sur les chats. Ils sont plus faibles et moins résistants que tout autre félin de l'Île. La petite brune semble ne pas attendre de réelle réponse, finalement, jugeant sa propre question idiote. Soit. Rymaïn se détourne et vient saisir le pot d'onguent à la robe violette. Question bien plus pertinente. "Il fait effet pendant près de dix minutes. La quantité n'y change rien. Du moment qu'elle est adéquatement répartie, sur différentes zones du corps, afin que les odeurs soient masquées dans leur globalité."

Alors que sa disciple observe les différents objets présentés, le murmure glisse jusqu'aux oreilles de la nordienne, qui esquisse presque un sourire l'espace d'une seconde. Oui, être puissant ou user d'une arme à la perfection ne fait pas tout, les détours pour l'emporter sur un adversaire sont multiples. Leurs capacités et l'emploi intelligent de matériel efficace peuvent vite faire la différence. Elle répond, même s'il ne s'agit guère d'une question, le timbre coloré d'une légère satisfaction.

"Exactement."


La rouquine vient saisir son propre arc, auquel elle rattache la corde qui se trouvait dans son sac sans fond. Puis vient se positionner auprès d'Elfazelle.
"Quel est ton œil directeur? Celui avec lequel tu vises?" En fonction de la réponse donnée, elle lui explique patiemment la bonne position à adopter. Tenir l'arc de la main opposée à l'œil directeur, et la corde de l'autre. Elle lui indique comment aligner son corps, ses jambes, ces dernières devant être de profil par rapport à la cible. Pieds écartés à largeur d'épaules, le dos droit, de sorte à former un T avec ses épaules lorsqu'elle lèvera son arme.

Le ton un peu dur, se veut surtout clair et explicite. Difficile de chasser le naturel après si peu de temps en sa compagnie.  "Tu ne tiens pas ta flèche. C'est sur la corde que tu tires, en plaçant tes doigts ainsi, de part et d'autre du projectile." Trois en dessous, deux au-dessus. D'un geste, elle lui indique de lever l'arc devant elle, gardant les mains sur chacune de leur prise -l'arc et la corde- tout en tirant sur la corde. Au besoin, elle corrige d'un geste ce qui doit l'être. Insistant sur le fait que sa posture doit, certes, être confortable, mais également rester tonique.

Puis, elle vient doucement soulever le coude du bras qui tient la corde. "Ainsi, tu fais davantage travailler les muscles de tes épaules, et non de ton bras. Maintenant, choisi un point de repère -menton, oreille, ou autre- vers lequel tu vas ramener l'encoche de la flèche. Afin de garder à chaque fois le même lorsque tu vises."

Après d'autres explications, brèves et rapides, afin que la jeune femme ne maintienne pas inutilement l'arc bandé en puisant dans ses forces, elle ajoute simplement. "Pour viser, fie toi à ton instinct. Oriente ton arc afin que la pointe de ta flèche te paraisse alignée avec ta cible. Prends le temps de bien respirer surtout, lentement, pour te détendre et rester concentrée. Puis relâche la corde."

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Il ne fallut pas longtemps à Rymaïn pour préparer son arc et rejoindre Elfazelle vers la cible.
La brunette observa avec admiration la rapidité dont elle avait fait preuve pour rattacher la corde.

« Mon œil directeur ? »

Elfazelle ferma alternativement le gauche puis le droit, et encore une fois le gauche.

« Ce doit être le droit, ça me paraît plus naturel »

Sa mentor prît le temps de lui expliquer comment se placer. Tenir l’arc de la main gauche et la corde de la main droite lui paraissait normal aussi.
C’était d’ailleurs ainsi qu’elle avait testé les armes dans le magasin la veille.

« Je ne suis pas complètement à côté de la plaque au moins »

En revanche, garder les pieds bien écartés ne coulait pas de source. Elle ne se sentait pas à l’aise dans cette position et pensait qu’elle avait l’air d’une imbécile.

Rymaïn lui prodigua ensuite quelques conseils pour bien positionner sa flèche. Son ton était un peu brusque, mais cela ne dérangeait pas vraiment la brunette ; la plupart des gens du village ne prenaient pas de pincettes quand ils s’exprimaient.

Elle eu un peu de mal à bien placer ses doigts pour que le projectile tienne en place. Toutefois, c’était assez facile une fois la bonne position trouvée.

L’arc bandé, la rouquine opéra quelques corrections ici et là.
Garder le coude levé lui paraissait un peu étrange, probablement car ses muscles n’étaient pas très développés à cet endroit.

« Un point de repère ? »

Elle essaya les différents endroits, pour finalement se fixer  entre le menton et l’oreille.

Le moment de lâcher la corde était arrivé. Elfazelle suivit les conseils qui lui étaient donnés, en alignant bien la pointe et en expirant doucement avant de tirer.

Difficile de dire si elle avait bien visé à la base, car la flèche s’était fichée dans le sol avant la cible.

Elle se massa rapidement le bras droit, puis le secoua tout en s’excusant :

« Mince, j’ai dû rester un peu trop longtemps le bras tendu. Je vais réessayer »

Elle se saisit d’une nouvelle flèche et retourna face à la cible.

« Pieds écartés perpendiculaires à la cible, dos droit, on place le projectile, on oublie pas de lever le coude et on vise le centre »

Cette fois-ci, elle attendît le dernier moment pour bien tirer sur la corde avant de la relâcher.
La pointe se ficha dans la cible, mais très loin du centre, proche du bord.

Elfazelle plongea son regard dans celui couleur olive, et lui demanda, à la fois surprise et déçue :
« Je ne comprends pas, j’ai visé le centre pourtant…
J’ai oublié quelque chose ? »

Rymaïn se rapprocha et lui fît faire quelques ajustements dans sa position sans vraiment la toucher, ce qui lui convenait très bien.

Dans le même temps, elle lui expliqua qu’il sera nécessaire d’entraîner tout son corps pour être une chasseuse accomplie.

« Soulever des poids, courir régulièrement… ça va être difficile ! Mais je DOIS y arriver, c’est le seul moyen… et je ne voudrais pas la décevoir »

Elle se sentait désormais redevable auprès de Rymaïn, et ferait tout son possible pour atteindre un bon niveau.

Effectivement, les jours suivants furent plutôt éprouvants, la course à pied en particulier.
En cette saison d’Ignis, elle ne sentait même pas la fraîcheur du matin sur sa peau, tant elle avait l’impression d’être un four ambulant.
Elle manquait de force dans les jambes certes, et les courbatures des premiers jours par dessus n’arrangeaient rien. Néanmoins, elle souffrait plus d’un manque de souffle et devait régulièrement faire de petites pauses pour calmer son rythme cardiaque.
Il lui faudrait probablement des semaines, voire des mois avant de pouvoir suivre l’allure de sa mentor.
Toutefois, cette perspective ne lui faisait pas peur, elle était suffisamment persévérante pour s’accrocher jusque là.

Heureusement, les repas étaient suffisamment consistants pour compenser les pertes de calories, et Elfazelle tenait à aider à leur préparation. Elle souhaitait participer comme elle pouvait aux tâches d’entretien de la maison, et faisait également un peu de ménage, en compensation du logis et du couvert gratuits.

L’entraînement au tir à l’arc commençait à porter ses fruits. Elle comprenait mieux comment gérer la tension de la corde et s’était choisi un point de repère assez fiable pour viser.
Il arrivait encore que certains tirs passent à côté, mais la grande majorité atteignait la cible et certains le centre. Nul doute que cela s’améliorerait avec la pratique.

Aujourd’hui, il s’était écoulé exactement une semaine depuis son arrivée à Lüh.
Son corps était en permanence endolori, mais la douleur avait diminuée car ses muscles s’habituaient progressivement aux efforts physiques.
La session de tir à l’arc quotidienne se passa plutôt bien, elle n’avait raté la cible que quelques fois et venait de planter sa flèche en plein centre.

Elle se retourna vers sa mentor avec un sourire satisfait :
« Je pense m’arrêter là pour le tir à l’arc aujourd’hui, autant rester sur un succès ! Et je me demandais… »

Elle s’agita un peu en passant son poids d’un pied sur l’autre :
« Est-ce qu’on pourrait faire… un bras de fer ? »

Elle s’empressât d’ajouter avant la rouquine ne puisse répondre :
« Je sais que je vais perdre, mais je me disais que ça ferait un bon moyen d’évaluer mes progrès »

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L’entraînement tant attendu

Rymaïn & Elfazelle
Lüh, propriété de Blanchecime ∴ Ignis 59

Si cela ne se détecte pas forcément au premier coup d'œil, Elfazelle semble naturellement prometteuse. Ses réflexions, ainsi que sa capacité à analyser d'elle-même ce qui peut enfreindre la bonne réussite de ses tirs démontrent un esprit vif et intuitif. La rouquine s'en trouve satisfaite, et lorsque la jeune femme exprime ses doutes après plusieurs essais, elle se permet de réajuster sa position. Par le biais de contacts brefs, et légers.

Ses derniers conseils sont également accompagnés de consignes plus détaillées concernant un entraînement global du corps de sa jeune disciple. En effet, cette dernière doit former davantage sa musculature et travailler son endurance. Que ce soit par le port de charges ou la course à pieds. Le tout ponctué d'étirements préalables et finaux, pour ménager et échauffer correctement les muscles qui seront vite endoloris par le manque d'habitude.

Le timbre un peu froid résonne, avant de donner congé à la petite brune.

"Pour une première journée, ce n'est pas si mal. Faits quelques étirements, après tu pourras disposer."


Les jours s'enchaînent. Les traits se rapprochant du cœur de la cible également. Les progrès sont là, plutôt rapides, rien de très surprenant vu la régularité de leurs séances, et l'application de sa jeune protégée. Son corps n'arbore pas encore de changements notables, assez logiquement, mais elle travaille dur et fait montre d'une résistance comme d'une persévérance à toute épreuve.

Rymaïn note l'implication quotidienne d'Elfazelle aux tâches de la maisonnée, mais sans vouloir y prêter de réelle attention. Cette attitude ne la surprend pas, bien qu'elle ne la trouve guère engageante. Les âmes trop bonnes ne survivent pas sur cette île faite de sauvagerie... Et elle ne songe nullement aux monstres dans la nature en pensant cela. Devrait-elle endurcir aussi son caractère?

Cette réflexion lui arrache un grognement vague alors qu'elle ouvre les volets de sa chambre. Laissant les doux rayons d'Ignis pénétrer la petite pièce et éclairer le hâle de son visage. Pourquoi s'en préoccupe-t-elle? La nordienne n'a pas à se sentir concernée... Ou affectée? Raah. D'un geste du fief elle chasse ces idées bien trop brumeuses en fermant les yeux un instant. Se pencher sur son ressenti ne lui a jamais rien apporté de bon... Si ce n'est des maux de crâne.

Une semaine s'est écoulée depuis le premier entraînement, et lorsque s'achève la matinée, les résultats sont là. Encourageants. Avec une maîtrise qui s'affine de plus en plus, Elfazelle plante sa dernière flèche au centre. Le tir soustrait un éclat de contentement au creux du regard olive. La réflexion est partagée, oui, une belle fin permet à l'esprit de se reposer sainement pour se préparer à la suite. Les réussites ne seront pas toujours présentes.

La demande qui s'ensuit, en revanche, l'interpelle. Bras croisés devant la jeune femme, elle plante momentanément son regard dans le sien. Puis sur ses bras, par réflexe. L'ajout pressé vient relativiser la requête, trouvée ridicule un instant plus tôt par la rouquine. C'est une façon d'évaluer ses progrès au fur et à mesure, certes... Mais la brune est clairement désavantagée. Aujourd'hui, comme demain. Outre le tir à l'arc, Rymaïn est accoutumée depuis son enfance à manier une masse dans chaque main

L'hésitation perce, mais l'accord se délie avec une certaine compréhension. "Et bien... Oui, pourquoi pas."

Les deux jeunes femmes se positionnent de part et d'autre de la petite table. Rymaïn laisse Elfazelle tendre son bras directeur, afin de choisir le sien. Ambidextre de naissance, cela ne change pas grand chose de son côté. Vu l'aspect pragmatique de l'exercice, le contact tactile si prononcé entre leurs mains passe heureusement à l'arrière plan. Même si la sensation demeure... Particulière?

Sa disciple semble prête, d'un geste du fief, la nordienne signale le départ de leur confrontation. La faible résistance qu'elle perçoit disparaît en une seconde, l'instant d'après, sa poigne vient écraser la main de la jeune femme sur le plat de la table dans un bruit sourd, qui résonne de concert avec l'exclamation douloureuse en face. Le bois semble presque avoir craqué. Le geste possédait une certaine brutalité... Involontaire.

L'inconfort la gagne avec un temps de latence, parallèle à la conscientisation de ce qu'elle vient de faire. "...Ah!" Elle relâche aussitôt sa prise, toujours enlacée à la main meurtrie. Détournant brièvement le regard. "Pardonne-moi... Je ne voulais pas te... " Le timbre égaré se voile d'agacement. A sa propre encontre en vérité.

"Nous attendrons plus longtemps avant de refaire ce genre de chose!"

Elle se détourne. La fin de la séance lui octroie une raison de fuir sans avoir besoin de s'embourber davantage dans une situation interactionnelle de la sorte. Laissant la jeune brune derrière elle... N'y avait-il pas du sang sur le dos de sa main? L'estomac de la rouquine se serre. Combien de personnes ne cesse-t-elle de blesser, physiquement, ou autrement?

Elle a déjà opéré un demi tour, et se rapproche d'Elfazelle. "Assieds-toi." Plus calme, presque cordiale, la voix ne se veut pas impérieuse. Rymaïn prend place à califourchon sur le petit banc, en face de sa disciple, et extirpe plusieurs objets de son sac sans fond. Une gourde d'eau claire, deux bouts de tissu propres, une fiole, et un pansement coagulant.

Après avoir imbibé d'eau le premier morceau de tissu, d'un geste délicat, elle vient saisir la main blessée. La plaie n'est pas si importante, mais des éclat de bois ont semblablement arraché un peu de peau. En faisant le plus attention possible, elle en retire deux ou trois. De fine rayures de chair sont effectivement à vif. Focalisée sur les gestes qu'elle pose, la guerrière aux masses évite délibérément le regard boisé. Avec le linge humide, elle nettoie la blessure précautionneusement. Une fois celle-ci décrassée, elle est désinfectée à l'aide du second tissu, imprégné du liquide présent dans la fiole.

Lorsqu'elle amorce le bandage, sa voix calme se délivre, colorée d'une pointe d'amertume. Elle ignore comment habiller son propos autrement, car elle ignore la nature des émotions qui circulent en elle. "Je n'ai pas l'habitude... J'essayerai... De faire plus attention la prochaine fois."  

Le bandage terminé, elle ajoute, relevant enfin la tête vers celle de sa disciple. "Tu feras une pause demain, le temps que cela cicatrise complètement."  

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Sa demande sembla laisser Rymaïn perplexe. Vu sa posture fermée et son coup d’œil sur ses bras, Elfazelle s’attendait à un refus. Après un bref instant de réflexion, la rouquine accepta ; elle avait l’air moyennement convaincue par l’argument de sa disciple.
Elfazelle lui adressa un sourire timide, elle était curieuse de découvrir la force que sa mentor pouvait avoir.

Une fois installées face à face et en position, les différences entre elles étaient flagrantes : Elfazelle avait non seulement le bras moins long, mais il paraissait surtout dénué de muscle à côté de celui de Rymaïn.
Cette dernière lui fit un signe de la tête pour lui signaler le début. La jeune brunette mît toute sa force en se cramponnant avec l’autre bras sur le coin de la table, tandis que la jolie rousse ne bougeait pas d’un pouce. Du moins… pendant la première seconde.
Ensuite, tout alla très vite, Elfazelle n’eut pas le temps de comprendre ce qu’il passait quand sa main heurta violemment la table.

« Ouch ! » fût le seul son qui sortit de sa bouche, son souffle ayant été momentanément coupé par le choc.

Dans le même temps, indépendamment de sa volonté, les larmes commencèrent à lui monter aux yeux.
Elle tira sa main instinctivement, mais celle-ci était toujours piégée dans celle de Rymaïn. Son geste avait dû lui faire prendre conscience de la situation, car cette dernière relâcha aussitôt sa prise.
La brunette récupéra sa main, puis essuya les larmes qui venaient de perler aux coins de ses yeux.
Elle observa la blessure : du sang avait coulé, et il y avait quelques entailles peu profondes, avec de petits éclats de bois ci et là.
Le choc passé, la douleur commença à s’estomper et il n’y avait plus d’humidité dans ses yeux ; elle aurait très certainement un gros bleu, mais pas de cicatrice.

« Ce n’est rien de grave » répondit-elle la voix un peu chevrotante aux excuses de sa mentor.

« Nous attendrons plus longtemps avant de refaire ce genre de chose! »

« Oh non, elle regrette d’avoir accepté ! Elle ne voudra plus recommencer maintenant… »

Elle observa la chevelure de feu s’éloigner, puis se leva pour aller nettoyer ses plaies.
Elle n’eut pas le temps de faire un pas, que la jolie rousse avait déjà fait demi-tour et lui indiqua de se rassoir, plutôt gentiment.
Elle obéit, et regarda sa mentor farfouiller dans son sac avec un air un peu perplexe.

« Mais qu’est-ce qu’elle cherche ? »

Les objets posés sur la table répondirent à son interrogation.
La brunette laissa sa main à disposition malgré sa réticence ; elle craignait d’avoir mal lors du nettoyage. Toutefois, Rymaïn montra une délicatesse insoupçonnée en prenant soin de sa blessure.

Un léger malaise était palpable entre elles. Elfazelle était gênée que l’on s’occupe d’elle, cela lui donnait l’impression d’être trop faible pour le faire elle-même, tandis que Rymaïn semblait s’en vouloir d’être la cause de cette situation, car elle avait soigneusement évité son regard.

« J’aurais pu le faire moi-même tu sais. Mais merci, je n’ai quasiment rien senti »

Elle était quand même reconnaissante, car cela aurait été beaucoup plus long de sa main la moins habile.

Quand le regard olive rencontra enfin celui couleur noisette, Elfazelle en profita pour tenter de la rassurer, avec un ton amusé :

« On prévoira un coussin pour amortir la prochaine fois »

En tout cas, elle ne se ferait pas prier pour se reposer demain après cette première semaine intensive.

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L’entraînement tant attendu

Rymaïn & Elfazelle
Lüh, propriété de Blanchecime ∴ Ignis 59

La réaction de la petite brune apaise la colère intérieure, dirigée uniquement contre elle-même. Un bref soupir, à peine perceptible, délie son soulagement. La peur la quitte...

... La peur? Ce simple constat étreint momentanément ses traits. Avant de disparaître aussi fugitivement. La peur de quoi, au juste? Elle juge bon de laisser ce questionnement de côté pour l'instant. Et perçoit vaguement le ton amusé qui vient jusqu'à ses oreilles. Son regard oblique sur la table qui présente un léger renfoncement maintenant. Elle se pince les lèvres, un rien incertaine, avant de comprendre mieux l'intention. Un faible mot réussit à se faufiler en dehors de ses pensées.

"Oui." Le sourire ne l'accompagne guère, mais elle revient au regard noisette avec un visage plus paisible. Puis se relève et quitte la jeune femme. Un poids l'écrase doucement tandis qu'elle rejoint la bâtisse. Une fatigue perceptible. Composer avec d'autres individus lui demande une énergie qu'elle ne possède pas toujours.


Passent les jours, et passent les semaines... Rythmés par les entraînements matinaux, ainsi que d'autres occupations un peu spéciales, que Rymaïn effectue pour la baronne. Les leçons de pistage rapidement assimilées, c'est au tour du tir sur cible mouvante de s'inscrire dans la lignée de leurs exercices.

Solensil se charge de faire bouger les cibles, sous une apparence plus petite mais toujours dotée d'ailes. En ce début d'Aer, Rymaïn laisse sa jeune disciple aux bons soins de la divinité. Elle doit en effet se rendre à Trare, pendant une petite semaine environ. Certaines affaires l'y attendent. Elle revient de ce bref séjour... Différente. Même si cela transparaît peu au cours des entrainements. Pendant lesquels la nordienne se montre toujours un peu distante, et froide par moment.

Cependant, son rapport à Elfazelle évolue progressivement, vers des tonalités plus aimables. Douces par moment, malgré une attitude toujours fermée quant à des sujets plus privés. Ou simplement plus compliqués pour la chasseresse, qui n'est pas accoutumée à parler d'elle ou comprendre ce qui est attendu lors de certains échanges.

Elle accepte cependant de réitérer le souhait de la jeune femme, concernant sa façon d'évaluer ses progrès physiques. Avec plus d'attention et de retenue.


Plus d'un mois et demi s'est écoulé depuis le début de leur association. Aer souffle quelque peu en ce début de matinée, mais les efforts fournit ne laissent pas réellement de place à des tenues trop lourdes et chaudes. Levée plus tard, assez exceptionnellement, la rouquine arrive dehors après sa jeune élève. Cette dernière a pris l'initiative d'entamer la séance, ce qui ne la surprend guère. Rymaïn s'autorise même un peu plus de retard. Arrêtée sur le pas de la porte, elle se penche un rien vers l'avant. Bras écartés et les mains posées sur la petite balustrade qui sécurise les quelques marches menant au jardin, elle observe la jeune femme un instant.

Le temps a fait son œuvre. La silhouette autrefois plus fine, offre désormais un constat sensiblement différent pour l'œil averti. Ses bras déclinent des muscles finement ciselés, discrets, mais bien présents. La posture et les mouvements sont plus athlétiques, autrement précis. Le travail enduré dessine d'une toute nouvelle façon les courbes de la jeune femme. Le regard olive s'attarde distraitement, avant de capter les iris noisettes désormais tournés dans sa direction. Et leur offrir un fin sourire.

Il est temps. Pour mettre concrètement en pratique tout ce qu'elle a apprit. Pour clore cette séance, Rymaïn l'annonce simplement à la jeune femme. Afin qu'elle puisse s'y préparer mentalement. Bien sûr, elles ne démarreront pas le lendemain, inutile de mettre une telle pression sur ses épaules. Mais d'ici quelques jours, et le temps de trouver un contrat intéressant comme approprié, elles pourront partir en chasse.


Les couleurs de l'aube dessinent des stries ambrée sur le ciel automnal. Une légère amertume compose ses traits l'espace d'un instant. Contrairement à ce qui était prévu, leur chasse attendrait un peu. Les préparations du festival d'Aer se dessinent progressivement un peu partout dans les rues de la capitale. Et si elle escomptait fuir toute cette agitation, elle se trouvait contrainte d'y faire face. D'y participer même, sur l'incitation de la baronne, ainsi que la provocation de Solensil.

Un concours de tir à l'arc se tiendra pendant les festivités, et il faut reconnaître que l'exercice, pour sa jeune disciple, peut s'avérer utile. Un long soupir quitte ses poumons. D'autres préoccupations embrument ses pensées à cette idée grotesque que sa propre participation... Elle tente d'y échapper en se préparant pour leur séance matinale. Comment annoncer la chose à la jeune femme? Depuis le temps, la rouquine sait son élève aussi peu encline à la fréquentation sociale intensive.

Bah, tant pis, elle verra bien. Elle sort prestement de sa chambre, passe devant le bureau qui tient lui de pièce de vie à Elfazelle, puis s'interrompt. Quelques secondes de réflexion et la voilà qui revient sur ses pas. Un geste hésitant se manifeste alors qu'elle lève un bras, puis finalement, elle abaisse doucement la poignée. Essayant de na pas éveiller trop brutalement la petite brune. Un rai de lumière en partie étouffé par l'ombre de sa silhouette tombe dans la pièce sombre. Le visage endormi l'accapare un instant et la laisse perplexe. Il est tôt... Est-ce utile de la déranger de suite?

La nordienne souhaite cependant se débarrasser rapidement de ce qu'elle a à dire alors. Sa voix s'élève avec douceur, d'abord pour éveiller la jeune femme.

"Elfazelle?" S'assurant de la lucidité de cette dernière, elle enchaîne alors. "Je ve..." La rouquine se ravise à la dernière minute. L'impératif n'a pas lieu d'être ici. "Est-ce que tu voudrais manger avec moi ce matin?"

Autant profiter du petit déjeuner pour converser plus tranquillement. Et ne pas gâcher du temps sur son entraînement. Même si elle apprécie peu manger en compagnie d'autrui généralement. C'est, cette fois, peut-être moins... Dérangeant?

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Crédits img : Karyna Trychyk

L’épisode de leur premier bras de fer fut assez vite oublié, l’entraînement prenant une place importante dans l’emploi du temps et l’esprit de la petite brune.

La durée des exercices de tir à l’arc fût raccourcie pour laisser place à des leçons de pistage.
Elfazelle les trouvait très intéressantes, et avait hâte de les mettre en pratique.

« En plus ça pourrait me permettre d’éviter de me faire surprendre ; plutôt utile quand on tire à l’arc ! »

La théorie sur le pistage terminée, la difficulté des entraînements fut augmentée d’un cran. La jeune disciple devait maintenant tirer sur des cibles en mouvement.
La première séance fût moins désastreuse que ce qu’elle aurait imaginé. Solensil y était pour beaucoup ; elle fit bouger les cibles assez lentement pour qu’Elfazelle ait le temps de bien viser.
Rymaïn lui prodigua quelques conseils supplémentaires avant de partir pour la semaine, pendant laquelle Solensil se retrouva en charge de son entraînement sur cibles mouvantes.
Elfazelle n’osa pas lui demander la cause de son départ, mais elle ne pouvait s’empêcher d’y penser.
Trois jours après, elle se décida à poser la question à la demi-divinité; sa mentor était partie à Trare, apparemment son lieu de vie habituel, pour une raison inconnue.

« Mais mon village est juste à côté ! Je vais me contenter de cette réponse pour le moment, même si j’aimerais bien en savoir plus. On passe quand même beaucoup de temps ensemble et je ne sais pas grand chose sur elle… »

A la fin de la semaine, la petite brune avait fait quelques progrès ; elle avait toutefois encore du mal à toucher les cibles quand Solensil mettait trop d’entrain à la tâche.

La chasseresse était égale à elle-même au retour de son voyage. Néanmoins, son ton devint progressivement moins froid au fil du temps.
Se sentant plus à l’aise, Elfazelle essaya d’en apprendre plus sur sa personne, mais Rymaïn se fermait dès que le sujet était abordé.
En dehors de ce point sensible, leurs échanges étaient plutôt agréables. La jolie rousse lui proposa même de retenter l’expérience du bras de fer ; Elfazelle alla chercher avec entrain un petit coussin « par précaution », qui s’avéra pratiquement inutile grâce à la retenue de son adversaire.

« Chouette ! Je ne sais pas si je me suis améliorée, mais notre relation oui ! »

Après plusieurs semaines, Elfazelle s’était bien améliorée sur plusieurs points. Le tir à l’arc lui demandait encore une grande concentration, mais elle arrivait à toucher la grande majorité des cibles. Son endurance avait nettement augmentée aussi, elle ne souffrait plus autant lors des séances de course. Enfin, même si elle ne pouvait battre sa mentor, sa force s’était développée.

Un matin comme un autre, Elfazelle pris son petit déjeuner dans la cuisine puis se dirigea vers le jardin. Aucune trace des reflets de feu, ce qui sortait de l’habitude.

« Bizarre… En même temps, ça doit être ennuyant pour elle. De toute façon, j’ai de quoi m’entraîner toute seule »

La brunette entreprît donc une séance de tir à l’arc, en se plaçant sur le côté de la cible plutôt qu’en face, afin de créer une difficulté supplémentaire.
En pleine concentration, elle ne remarqua la présence de la jolie rousse qu’une fois qu’elle avait fini de tirer les flèches disponibles.

« Bonjour Rymaïn ! » dit-elle d’un ton enjoué.

Sa mentor lui annonça qu’elle allait pouvoir participer à sa première chasse.
Elfazelle se sentait à la fois impatiente, anxieuse et très heureuse :
« Déjà ? J’ai l’impression que je suis arrivée hier. J’ai vraiment hâte ! On part quand ? »

Elle sentit un léger soulagement quand elle apprit qu’elle ne partirait pas dès le lendemain. Même si elle avait attendu ce moment toute sa vie, un peu de temps pour organiser ses pensées et ses affaires était bienvenu.

Elles attendaient de trouver un contrat intéressant, tout en restant à la portée de la jeune disciple.
Ce soir là, Elfazelle s’était couchée en se disant qu’elle irait le lendemain faire un tour à la taverne pour consulter les affiches.
Contrairement à d’habitude, ce fut une voix familière qui la sortit de ses rêves en un instant.

Le regard noisette se posa sur l’olive, peu distinguable dans la pénombre. Sa mentor n’avait pas aligné deux mots qu’un léger sentiment de panique la gagna et elle se releva brutalement en position assise:
« Qu’est-ce qu’il se passe ? Je suis en retard ? »

Toutefois, Rymaïn était venue pour une demande assez inattendue.

« Désolé, tu m’as un peu prise par surprise. Oui, volontiers ! » lui répondit-elle tout de suite avec un sourire en se frottant les yeux.

Elle n’arrivait pas à bien distinguer le visage de la rouquine pour essayer de deviner s’il s’agissait d’une bonne nouvelle ou non. C’était déjà plutôt difficile de lire ses traits en temps normal ; mais dans l’ombre de la porte, cela s’avérait impossible.
Elle s’étira les jambes et les bras tout en parlant:

« Je te rejoins de suite ! »

Même si aucune des deux jeunes femmes n’était gênée par les longs silences, Elfazelle appréciait les quelques moments où elles pouvaient échanger. C’était important pour elle de bien connaître les personnes de son entourage proche.

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L’entraînement tant attendu

Rymaïn & Elfazelle
Lüh, propriété de Blanchecime ∴ Ignis 59

Légèrement prise au dépourvu, la jeune femme accepte néanmoins son invitation, ôtant un fin soupir de soulagement à Rymaïn. Bien que leurs échanges plus personnels soient peu fréquents, cela ne semble pas entraver l'entrain d'Elfazelle à les partager. La rouquine referme la porte sur cet assentiment, avant de prendre la direction du rez-de-chaussée.

Dans la petite salle à manger attenante aux cuisines, une table déjà dressée pour elle l'attend. Ainsi que le discret sourire habituel de Trévis, qui la salue chaleureusement à son entrée. Une salutation rendue avec amabilité et douceur. Cette dernière se prolongeant dans le timbre d'une demande.

"Peux-tu préparer la table pour une deuxième personne, s'il te plaît?" L'homme s'incline brièvement, avec un oui plutôt ravi, bien que teinté d'un imperceptible étonnement. Au fond, cela l'enchante, peu importe le temps passé. Les choses changent... En bien.


Alors qu'elle s'installe et commence à se servir parmi les divers mets et aliments mis à disposition, un bruit annonce l'arrivée de la petite brune. D'un geste ouvert de la main, Rymaïn lui fait signe de s'installer en face d'elle. Un ton plutôt cordial se délie dans sa voix.

"Tu as vraiment fait des progrès étonnants depuis ton arrivée." Elle termine de garnir son assiette, avant de poursuivre, levant à nouveau le regard vers les yeux noisettes. "J'aurai un défi un peu... Particulier à te proposer. Afin de te tester dans une situation inhabituelle." Un instant d'hésitation s'immisce, elle n'a pas spécialement envie d'aborder le sujet. Bien consciente de la difficulté de la chose, ses propres réticences présentes au devant de ses pensées. Cela dit, elle ne compte pas enchaîner dans les détails directement

"Mais avant de t'en apprendre plus, j'aimerai que tu me parles de toi. Enfin, je veux dire... Les mots de la baronne résonnent bizarrement dans son esprit. Pourtant, elle sait que cela serait adéquat. Utile, en un certain sens.

"... Quel est ton ressenti? Vis-à-vis des mois passés ici et de ton entraînement? Et est-ce que tu as des projets, en dehors de la chasse?

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Crédits img : Karyna Trychyk

Elfazelle observa les reflets cuivrés s’éloigner, se frotta les yeux une nouvelle fois, puis s’assit un instant au bord du lit.

« Il y a quelque chose d’inhabituel pour qu’elle vienne comme ça. Qu’est-ce que ça pourrait être ? Elle a peut-être trouvé un monstre pour moi ? »

Pour chasser au plus vite l’incertitude, Elfazelle se prépara en vitesse ; enfin, aussi vite qu’elle pouvait car des nœuds récalcitrants s’étaient installés dans la nuit et sa tignasse n’était vraiment pas présentable en l’état.
Elle enfila une tenue habituelle pour l’entraînement, mais se retint de prendre son arc. Après tout, Rymaïn avait seulement parlé de petit déjeuner.
Elle arriva dans la salle à manger, un peu anxieuse de ne pas savoir ce qui se tramait.
Elle adressa un sourire timide à sa mentor, qui avait commencé à se servir, puis s’installa sans précipitation, tâchant de ne pas trahir son anxiété.

« Tu as vraiment fait des progrès étonnants depuis ton arrivée »

« Ah… Euh… Merci… » bafouilla-t-elle sans trop savoir quoi répondre.
Elle n’était pas à l’aise avec les compliments et, même si elle se rendait bien compte qu’elle avait progressé, elle voyait bien qu’il lui restait encore un long chemin à parcourir.
Elle prît alors des couverts pour piocher dans les plats, mais s’arrêta tandis qu’elle remplissait une cuillère de compote.
La surprise laissa place à l’inquiétude, peut-être à cause de la réticence de sa mentor à aborder le sujet ; Elfazelle fronça les sourcils :
« Un défi ? En quoi ça va consister ? ».

Mais la jolie rousse ne souhaitait pas développer pour le moment, ce qui fît naître une pointe de déception chez Elfazelle. Ce sentiment fut très vite balayé par l’étonnement. La brunette ne s’attendait absolument pas à ce que sa mentor s’intéresse à son ressenti ; c’était la première fois qu’elle lui demandait depuis son arrivée et elle n’avait jamais été très encline à partager ses sentiments. D’où venait cette question ? Avait-elle besoin d’évaluer son état d’esprit avant de lui proposer le défi ?

Le regard noisette reprit place sur la cuillère encore dans le bol de compote ; tout en se servant, Elfazelle commença par bredouiller puis parla plus distinctement après quelques secondes pour clarifier ses pensées.

« Mmmh… Euh… Déjà, je suis très reconnaissante que tu m’aies amenée ici ; pas que pour l’aspect financier, le jardin est vraiment super pour s’entraîner et tout le monde est agréable. Aussi, j’aime bien discuter avec toi parce que tu es toujours franche, et que le silence ne te gêne pas. Mais… »

Elle hésita un bref moment, redoutant de s’avancer sur un terrain glissant, et continua en fixant son assiette:

« Je sens bien que tu te fermes si je te pose une question personnelle, et je ne sais pas si c’est parce que tu ne me fais pas confiance… »

Elle laissa planer un instant, pour laisser à sa mentor le choix de s’exprimer ou non.

« Sinon, j’avais quand même un peu peur de n’arriver à rien au tir à l’arc, mais tes conseils m’ont beaucoup aidée ! Et regarde, on voit mes muscles ! » dit-elle enjouée en fléchissant les bras pour gonfler ses biceps.

Elle reprit avec moins d’entrain et en détournant le regard :

« Mais je sens bien qu’il reste encore énormément à faire avant d’arriver à ton niveau et je ne sais pas trop si je serai à la hauteur en conditions réelles… »

Elle soupira, et hésita à nouveau, ne sachant pas vraiment si Rymaïn penserait que son projet était une bonne idée ou complètement stupide.

« D’ailleurs, à ce sujet, j’ai effectivement un projet… Tu sais que je suis à la bibliothèque tous les après-midi ? Et bien, j’en profite pour faire des recherches sur la magie, enfin plutôt comment enchanter des armes ; j’aimerais compenser mon manque de force… Mais bon, pour l’instant je n’ai pas trouvé la réponse que je voudrais, le processus semble assez obscur… »

Elfazelle fixa alors les yeux couleur olive pour jauger leur réaction, en espérant ne pas passer pour une idiote.
Elle ajouta rapidement en tripotant une mèche de ses cheveux:

« J’ai beaucoup trop parlé, désolé, je sais que tu n’aimes pas trop ça »

Elle termina avec un sourire gêné, et se décida enfin à goûter la compote dans son assiette.

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