Chasse-moi si tu peux !
A la poursuite d'une étincelle d'humanité...
Rymaïn & Xion ° Mi-Printemps ° Petit Bois

L'astre solaire consumait déjà les dernières perles de rosée matinale, alors que les bruissements d'un convoi reprenaient lentement, après une nuit forcée au clair de lune. Fulgurant et meurtrier, l'assaut bestial de la veille avait coûté la peau d'un mercenaire, ainsi qu’écharpé le bras d'un autre. A présent doté de quatre escorteurs alertes -dont Rymaïn- au lieu de six, le groupe avançait, redoublant de vigilance.

Une vielle dame aveugle, portée par une charrette, écoutait attentivement sa petite-fille, qui voyageait à dos de cheval à ses côtés. La voix de cette dernière tremblait étrangement.

"Le Petit Bois est juste à l'ouest... C'est là qu'il se trouve, Astia. Peut-être que..."

L'ancienne répondit, avec calme et tranquillité.

"Il a rejoint le coeur de la terre mère depuis plusieurs lunes, il te faut le laisser en paix maintenant."

Une larme perla au coin du regard bleuté de la jeune femme, qui baissa les yeux. Ses lèvres comme sa voix reprirent une assurance infaillible.

"Non. Pardonnes moi, mais je n'y arriverais jamais."

A ces mots elle tira la bride de son cheval, puis talonna ce dernier en s’éloignant du convoi, sous quelques regards interloqués. Les mercenaires se passèrent le mot sans rien dire, inutile de perdre un homme ou du temps supplémentaires.

Rymaïn, qui chevauchait un variquan alloué par le groupe qui l'avait recrutée, s'approcha de la femme aveugle, ayant perçu la conversation plus tôt. L'ancienne ne la laissa guère ouvrir la bouche et tendit son bras vers elle, avant d'accrocher son poignet avec douceur.

"Faîtes quelque chose pour elle, s'il vous plait... Les autres ne s'en soucieront pas."

Surprise, la nordienne eut d'abord le réflexe d'ôter son bras, mais elle n'osa pas bouger face à ce regard gris perle qui la scrutait sans la voir. Son timbre froid et interloqué résonna bassement. "Que... Pourquoi moi ?! Croyez-vous que je vais risquer davantage ma vie qu'eux ?" le cristal nuancé de gris des pupilles devant elle se voila un instant, sous les paupières de la vieille femme. Un sourire bienveillant naquit sur ses lèvres parcheminées par le temps.

"A cheval elle n'a pas du prendre beaucoup d'avance... Il n'est jamais trop tard pour faire un choix judicieux."

Elle lâcha délicatement son poignet, sans ajouter un mot.


Le variquan atteignit rapidement l'orée du petit bois où se situait la jument de la jeune femme. Paissant paisiblement, à la merci de n'importe quelle bête sauvage. Rymaïn descendit de sa propre monture, résolue à la perdre définitivement. Elle ne pouvait attacher la bête, pour la sécurité de cette dernière, s'il lui fallait fuir un monstre ou l'autre en son absence. La nordienne s'arma aussitôt de son arc, encochant une flèche améliorée, elle passa près de la jument pour pénétrer dans les sous bois, pestant intérieurement. 'Complètement cinglée... Et moi la première!'

Après quelques mètres à tenter de pister une humaine à priori peu discrète -laissant branchages et terre marquée sur son passage- un bruit feutré l'immobilisa soudain. L'espace d'une seconde la rouquine ferma les paupières, c'était totalement insensé, jamais elle n'aurait du suivre cette gamine, qu'est-ce qu'elle foutait là? Elle rouvrit les yeux, attentive, tâchant de percevoir la direction d'origine de ce bruit discret, qui semblait néanmoins se rapprocher d'elle. Elle banda doucement son arc, la respiration mesurée... peut-être la dernière?

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Chasse-moi si tu peux !

Humant l'air un instant, Xion s'arrête. Certains membres de son clan, et notamment Lagertha, ont agité un bout de papier abîmé devant ses yeux lumineux à plusieurs reprises. Pourtant, elle n'a pas encore réussi à mémoriser tous les dessins inscrits dessus. Et son sens d'orientation terrestre laisse à désirer. Ça, c'est quelque chose qui n'a pas changé. Mais elle n'est pas très loin du campement, alors ça devrait aller.

La renarde se tient à l'orée du Petit Bois, à l'Ouest de Rorn. Malgré ses appréhensions et sa solitude, une nouvelle fois, elle s'aventure entre les troncs poussée par le sens du devoir. Une mission lui a été confiée. Elle doit trouver un endroit facilement défendable et exploitable, pour que les humains puissent venir y couper du bois dans une relative tranquillité. Alors elle s'avance, prudemment, les griffes tendues et le dos voûté. Elle sait que des animaux rôdent, plus sauvages et puissants que ceux de l'Ancien Monde. Des versions déformées, monstrueuses. Elle ignore la peur, mais connaît la méfiance. Elle ne doit pas mourir, Lagertha a besoin d'elle.

Évidemment, ce n'est pas Galifey qu'on envoie tout seul dans la forêt. L'oiseau est bien trop gros pour une reconnaissance de terrain dans un endroit appelé « Le Petit Bois ». Elle se déconcentre. Xion secoue la tête. Les arbres ne lui parlent pas autant que les courants marins. Mais encore, c'est tout ce monde qui est silencieux. Inutile de penser à ça, elle doit continuer à avancer.

Les environs semblent calmes, jusqu'à ce qu'un être passe rapidement non loin d'elle, sans la voir. Un animal ? Elle attend d'autres bruits, ceux qui indiqueraient la confiance et le nombre nécessaires à un humain pour se promener aussi peu discrètement. Rien. Intriguée, elle relève la tête et suit la direction des sons. Il y en a d'autres, derrière, plus légers. S'ils suivent la même chose, elle finira par tomber sur cette seconde présence. Décidément, le coin n'est guère tranquille. Elle soupire. La surface est si bruyante, elle préfère le calme des abysses.

La forme qu'elle devine plus loin s'est arrêtée, elle l'a peut-être entendue. Les traits de son visage masqué se durcissent, même si la différence physique n'est pas grande. Xion pivote pour aller directement à l'encontre du mystère. À quelques pas, apercevant une silhouette humaine entre les feuillages, elle entend l'étirement d'une corde, un chant qu'elle connaît du campement. Elle ne s'arrête pas, même si la tension serre ses muscles fins, et s'avance hors des fourrés jusqu'à dévoiler la moitié de son corps agile.

C'est une humaine, un peu plus robuste que la sienne. Elle la fixe de ses yeux perçants. Une flèche est pointée dans sa direction. Xion grogne, répondant instinctivement à cette posture offensive. Elle sort complètement puis tourne autour de la femme, les babines retroussées. C'est comme ça que Lagertha réagit aux menaces. Mais celle-ci ne tire pas. Pourquoi ? Elle a peur ? Ça fait son petit effet ?

La renarde abyssale s'immobilise soudainement, fouettant l'air de sa queue. Qu'est-ce qu'elle doit faire ? Partir ? La tuer ? Elle se redresse et ne s'agite plus. On ne lui a rien précisé en cas de rencontre. Elle devait juste évaluer l'hostilité et la présence de la faune. Mais maintenant qu'elle a trouvé une humaine, elle fait quoi ? Comme Lagertha ? Une vague de panique la submerge brièvement, effaçant son air agressif pour lui donner un regard perdu. Elle ne sait pas. Alors elle demande à l'inconnue d'une voix neutre, sans crainte ni défi, mais avec un brin d'innocence :

« Tu veux tirer ? »

Si la femme veut se battre, elle la tue et puis la question est réglée. Ce serait le plus simple.

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Rymaïn & Xion ° Mi-Printemps ° Petit Bois

Un grognement brisa le silence forestier... La silhouette, encore indistincte, franchit le feuillage, souple, discrète, l'allure élancée. Le visage aux teintes bleutées scruta l'humaine, de ses prunelles dorées comme le sable scintillant du Désert Ambré. La créature semblait n'avoir rien de commun avec les monstres peuplant l'île, bien que la nordienne connaissait peu la faune de cette partie d'Arcane. En réponse à ses babines retroussées, toujours ponctuées d'un grognement sourd, elle baisse lentement son arme, non de peur, mais par crainte de l'effrayer dans ses intentions. La nature de la créature aux traits et à l'aspect d'une profondeur azurée par endroit, nacrée par ailleurs, agréablement fluide, lui apparaît soudain évidente. Ses couleurs superbes en deviennent presque envoûtantes...

Lorsqu'elle s'immobilise, sous les yeux olive de Rymaïn, cette dernière croit percevoir un subtil changement dans le regard qui lui fait face. L'agressivité semble s'être diluée dans l'or des ses iris, pour laisser place à une forme... de perplexité ou d'indifférence? La nordienne ignore comme interpréter tel changement, mais l'écho d'une simple question dissipe ses doutes, elle se sent apaisée. Sa propre voix résonne, mesurée, sereine aussi. "Certes non." Après avoir calmement rangé sa flèche dans son carquois, elle met un genou en terre et incline le fief. "Pardonnes mon indélicatesse, enfant des Quatre. J'ignorais croiser la route d'un semi-divin."

Elle se redresse, celui-ci ne semblant guère montrer de tempérament agressif pour l'instant. Néanmoins, elle sent une forme de culpabilité l'envahir, peut-être sa présence est venue perturber l'enfant divin. Elle se permet d'ajouter alors "J'espère ne pas avoir troublé vos activités en ces lieux... J'étais à la recherche d'une jeune inconsciente, qui s'est aventurée plus tôt dans la forêt et..." Soudain, elle interrompt son propos, que peut-bien désirer savoir l'être magique devant elle à ce sujet? Ne l'importune-t-elle pas déjà assez? Peut-être escompte-t-il se jeter sur elle sans commune mesure, comme bien des enfant des Dieux, haïssant légitiment sa pitoyable race. Hésitante, elle l'observe, gardant néanmoins son sang froid, faire face à la mort n'est pas un problème. Elle apprécierait cependant une alternative plus douce en présence d'un être aussi extraordinaire, si le destin lui offrait telle faveur.

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Ah. Donc elle ne veut pas se battre. Et pour preuve, elle range même sa flèche. Zut. Coupant court à toute réflexion, l'humaine en face d'elle s'agenouille. Ses petits yeux dorés s'agrandissent sous l'étonnement. Si son visage masqué n'est guère expressif, l'incompréhension est telle qu'elle immobilise tous ses muscles et chasse toute autre pensée. Mais que fait cette femme ? Pourquoi lui parle-t-elle de cette façon ? La considération qu'elle lui témoigne est si grande qu'elle semble dépasser ses deux mètres de hauteur. Xion jette un coup d’œil en arrière, cherchant une autre présence qui puisse être le sujet de ces propos.

Elle se sent mal à l'aise. Au camp, personne ne lui offre des mots aussi ronds. Ses pairs sont des armes, des compagnons. Et cela lui convient, elle comprend. C'est même ce qu'elle veut. Là, elle tient l'impression que l'inconnue s'adresse à sa mère. Mais Aqua ne l'entend probablement pas, peu importe les paroles formulées. Elle a saisi que certains humains respectent les premiers enfants des Quatre plus que d'autres. Pas à quel point, visiblement.

La femme se relève, ramenant ses pensées sur la situation par son mouvement et ses nouveaux mots. Elle met quelques secondes à rattraper le fil de leur sens, et réalise que le silence est tombé depuis.

« Oh. Elle est partie par là. »

Xion tourne le museau en direction des bruits entendus plus tôt, désormais associés à l'objet de recherche de cette femme. Elle a répondu instinctivement, n'ayant pas le temps de réfléchir à autre chose. Elle ne relève pas la première phrase parce qu'elle ne saurait pas quoi y répliquer. Son clan n'apprécierait probablement pas qu'elle dévoile la raison de sa présence à n'importe qui. De ça au moins, elle reste certaine.

La créature des abysses secoue brièvement la tête pour se ressaisir. Cette femme la perturbe comme aucune autre. Et elle n'arrive pas à se défaire de son malaise. Un peu agacée, elle opte pour la méfiance. C'est la base qu'elle a assimilée. L'humaine en face ne réagit pas trop non plus. Xion se recule nerveusement, puis lève le menton vers son vis-à-vis.

« Par là. »

Sans attendre la suite, elle s'engage dans la direction désignée plus tôt. Même si les signes d'un passage précipité sont légion, elle n'a jamais traqué quoique ce soit sur terre. Et elle n'est pas très concentrée. Alors rapidement, et d'une manière qu'elle espère discrète, elle ralentit pour se placer au niveau de l'humaine. Elle aurait dû s'en aller et chercher un coin tranquille. Mais d'un autre côté, ce coin-là, qu'elle n'avait pas fini d'explorer, serait certainement plus tranquille une fois les deux humaines parties. Voilà, elle n'a qu'à retrouver la deuxième avant de reprendre sa mission.

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Elle ignore comment traduire ce silence, prenant corps dans le moindre repli des sous-bois, jusqu'à ce qu'un propos l'interpelle. De toute évidence, l'enfant divin lui indique la direction prise par l'humaine dont elle est à la recherche. D'abord perplexe, ne sachant l'intention réelle de la créature, elle s'empresse néanmoins de la remercier.

"Je...Merci." Notant l'absence de réaction à l'égard de ses précédents propos, Rymaïn juge ne pas l'avoir incommodée plus que nécessaire. Du moins, son attitude n'a, semble-t-il, d'aucune façon provoquer ire ou contrariété. La nordienne observe l'être divin secouer brièvement la tête, puis effectuer un mouvement de recul, l'air... nerveux? Peut-être n'apprécie-t-il simplement guère sa présence de façon plus intrinsèque. Soudain mal à l'aise, Rymaïn s'apprête à s'éloigner au plus vite, craignant occasionner une gêne supplémentaire, mais le semi-dieu enchaîne rapidement. Affirmant sa précédente indication, avant de s'engager dans cette même voie.

La rouquine demeure une fraction de seconde interdite, puis oblitère le trop plein de réflexions, la situation reste délicate, mieux vaut ne pas se perdre en tergiversations futiles. Après avoir prestement ré-encoché une flèche, d'un pas souple, mais rapide, elle part à la suite de la créature aux reflets bleutés, qui ralentit sa cadence, afin de rejoindre son propre rythme. Que fait-elle donc?

Bien qu'étrange, la sensation n'en est pas moins agréable. Rymaïn ne perçoit aucune malveillance. Elle se sent accompagnée, comme en présence d'un partenaire silencieux qui suit la même optique qu'elle, provisoirement, sans raison réellement définie.

Nettement plus allègre que lorsqu'elle a pénétré dans la forêt, ses sens s'éveillent davantage, cernant plus finement le moindre stimulus à sa portée humaine, sa respiration modérée, se calque avec plus d'aisance sur sa course légère. Des traces nettes de bottes apparaissent alors, dans une terre plus argileuse. Elle ralenti, ainsi que la créature à ses côtés. Une petite clairière se dessine sous leur yeux, la jeune femme de toute à l'heure est agenouillée en son centre, statique, offrant son dos à leur vue. Seules ses lèvres remuent, laissant échapper une litanie à peine perceptible par la nordienne.

"Prenez mon corps, mon cœur et mon âme, Dieux d'Arcane, que mon essence imprègne ces bois, et rejoigne enfin la sienne."

La rouquine range à nouveau sa flèche, mais demeure à l'écart, hésitante. Cela aurait été tellement plus simple que de croiser et chasser une bête sauvage! Elle ferme momentanément les paupières, elle ne possède aucune habileté sociale susceptible de l'aider à interagir. Encore moins inciter la jeune femme à l'accompagner. Son regard olive se porte distraitement sur l'enfant-divin à ses côtés. Il faut pourtant agir vite, n'importe quel monstre peut surgir chaque seconde passant.

"Il me faut la ramener parmi les siens, mais..." Son timbre, posé, devient soudain plus brusque, malgré son ton bas, une main vient accueillir son front penché en avant. "...Par les Dieux, je ne sais même pas quoi lui dire." Son souffle se brise, et finit en murmure amer. "D'habitude j'essaye qu'on s'éloigne de moi, pas le contraire."

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Pour s'occuper l'esprit utilement et ne point s'attarder sur son malaise, Xion se concentre sur l'environnement. Peu de choses accrochent son regard, car elle se laisse rarement aller à la curiosité. Du moins toute seule, car elle s'est rendue compte qu'elle aime bien quand son humaine lui fait découvrir des morceaux de ce monde. Mais Lagertha n'est pas là. La renarde laisse ses yeux dorés se balader distraitement sur les veines des feuilles, le tracé des écorces, les dos ronds des grosses racines et la droiture des branches.

Puis, ils glissent par inadvertance sur la grande rousse à ses côtés. Ils s'attachent aux lignes sur son visage et aux rares endroits où son corps est à nu. Ils suivent leur tracé. Elle aimerait le toucher du bout de ses moustaches pour mieux mémoriser le chemin. Elle ne se sait pas pourquoi, mais ça, ça l'intéresse. C'est joli. Elle s'apprête à lui dire quand la femme se met à ralentir. La créature de l'eau suit la cadence, tentant soudainement d'en déterminer la raison. Clairière droit devant. Elle aperçoit le sujet de leur recherche au même moment où son odeur chatouille ses narines. La supplique serait presque jolie aussi, tant elle se mêle à la nature avec respect.

Xion observe et écoute. Il n'y a pas l'air d'avoir de menaces alentours, même si elle ne peut en être certaine. Son attention revient rapidement sur l'humaine à la chevelure de feu, et surtout la peine dans sa voix. Elle semble réellement affligée. Ça devrait l'indifférer. Pourtant sa sincérité lui fait quelque chose. Elle ne sait pas quoi, mais elle sent ses entrailles remuer. Étrange. Le silence lui fait réaliser que l'autre attend qu'elle agisse.

Une nouvelle vague d'incertitude la submerge. Elle fait déjà son possible pour se réadapter au langage, alors utiliser les mots consciemment pour influencer les humains, c'est clairement au-delà de ses capacités. Mais bon... Elle soupire intérieurement. La rousse semble avoir besoin d'aide. C'est à elle qu'elle a envie de s'intéresser et qu'elle souhaite comprendre. Ce n'est pourtant pas ce que la situation exige.

« Elle veut mourir. »

Ça lui semble être une évidence. Peut-être une contradiction avec les propos de la grande humaine ? Elle demande pour chasser cette incompréhension, car ça ne lui semble pas très juste de ne pas donner à cette femme ce qu'elle veut.

« Elle n'a pas le droit de mourir ? Tu dois la ramener en vie ? » Puis son regard se tourne vers la clairière. Elle propose simplement : « Je peux toujours l'effrayer pour qu'elle courre vers toi. »

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Oui... Le désir de mort imprègne la clairière telle une substance indéfinie qui s'immisce dans les moindres recoins de l'atmosphère. Si l'évidence ne l'aide pas vraiment, le questionnement à sa suite enclenche un autre mécanisme de réflexions, l'extrayant momentanément de la difficulté perçue précédemment. Son regard olive se pose sur l'or rétinien de la créature divine à ses côtés, accompagné d'une voix mesurée. "Nous avons tous ce droit, à mon sens..."

Prononcer ces quelques mots offre soudain un effet miroir à la seconde question. Non, personne ne lui a demandé de la ramener en vie, car personne ne lui a demandé de la ramener... Les propos tenus par l'ancienne aveugle font résurgence... ''Faites quelque chose pour elle...'' Ce n'est qu'à présent qu'elle entend la multiplicité dont sont parés ces mots. Son visage se détourne du semi-dieu et observe le dos de la jeune humaine face à elle. Cette simple pensée engendre un sentiment confus de soulagement et d'apaisement.

"Je n'avais simplement pas saisi... Mais je crois comprendre ce qui m'a été demandé. Ce n'est pas la peine de l'effrayer, ça ne marcherait guère."

Si l'intention est plus claire, la tâche n'en reste pas moins délicate. En d'autres circonstances, donner la mort ne prête pas à interrogation. Il s'agit d'une évidence pour Rymaïn, d'un acte spontané, souvent contextuellement nécessaire, ou, parfois, brutalement émotionnel, mais jamais parce qu’autrui le souhaite. Elle hésite, une fraction de seconde, avant de réagir.

Finalement, elle passe son arc autour d'elle, pour l'accrocher dans son dos et s'avance lentement derrière la silhouette agenouillée. Son esprit s'est fermé à davantage de questionnements, il n'est pas conditionné pour... Elle... n'est pas... conditionnée pour. On ne lui jamais octroyé la possibilité d'éprouver ce que les humains désignent des 'états d'âme', cela, au moins, ne la desservira pas ici. Le reflet d'une petit lame scintille sous les fin rayons qui échouent dans la clairière, alors qu'elle s'est saisie d'une dague à sa ceinture, avant de se pencher derrière la jeune femme.

Cette dernière attend la mort, si bien que d'où qu'elle vienne, elle ne se soucie même plus de le savoir. Qui l'approche? qui la touche? un effleurement à peine perceptible... Le souffle qui s'attarde au creux de son oreille... "Votre corps reposera dans la forêt..." C'est probablement ce qu'elle désire entendre, n'est-ce pas? La pointe de la lame, par habitude, trouve aisément l'interstice entre les côtes, un coup, à la fois sec et puissant, porté de bas en haut, perce alors le cœur directement. Fatal, immédiat surtout, c'est tout juste si une légère traînée de sang s'échappe lorsque l'arme est retirée.

La nordienne supporte la hanche droite afin d'allonger correctement le corps, puis se redresse, essuyant la petite lame sur le revers de sa cape avant de la remettre à sa ceinture. En fermant sa psychée à des territoires qu'elle ne souhaite aucunement explorer, elle a momentanément oublié la présence divine dans son dos... La nordienne se retourne, doit-elle se préoccuper de sa réaction? Au moins, il ne l'a pas stoppée, elle ignore encore tout de cet enfant divin et de la perception qu'il puis avoir de son comportement. Elle ne sait même pas comment elle-même se perçoit en cet instant précis d'ailleurs...

"...Ais-je mal agis?" Sa propre question l'étonne, sans qu'elle sache quoi en faire, où si elle désire réellement subir le jugement d'un enfant divin. Maintenant qu'elle est soulagée, si l'on puis dire, de cette tâche, elle a envie de partir, du moins, c'est ce qu'elle croit. Sa main passe à nouveau sur son front, elle dégage quelques mèches orangées, puis se détourne vers le corps allongé. Il faudrait l'enterrer, peut-être, pour éviter que des bêtes sauvages ne le souille inutilement... Pourquoi pense-t-elle à ça, au fait?  

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C'est soudain. À l'entente de ces mots, rien ne se passe. Mais lorsqu'ils résonnent dans son esprit, son petit cœur se serre, et la renarde baisse le regard avec tristesse. Nous avons tous ce droit... C'est faux. Eux, les demi-dieux, ne peuvent pas mourir. Elle le sait pertinemment. Personne n'a exaucé son vœu, peu importe ses hurlements du plus profond des océans. Même plongée dans la souffrance causée par leurs enfants, aucun de ses parents ne lui a donné le droit de mourir.

La seconde réflexion de la rousse encore à ses côtes, la tire de cet abîme, contemplé un bref instant. Elle semble penser tout haut, mais ce n'est pas grave, elle peut quand même s'y accrocher. La femme dit que sa proposition ne marchera pas. Elle ne se vexe pas, mais ne comprend pas immédiatement. Puis, en la voyant ranger son arc, elle saisit. L'humaine souhaite en finir parce qu'elle a plus peur de la vie que de la mort. Alors si elle se présente en incarnant la mort, l'autre risque de lui tomber dans les crocs.

Xion s'assoit, observant la scène qui se déroule lentement, et en silence. Étrange. Elle ressent... de l'apaisement. Un être qui n'a peut-être plus peur de la mort. C'est beau. Comme une sorte de paix. Quand le corps est enfin allongé dans l'herbe, elle se relève et les rejoint. La grande se retourne et l'observe s'approcher. Elle est troublée, c'est écrit sur son visage encore plus vivement que ses dessins. C'est drôle toutes ces expressions. Avec Lagertha, tout passe par les sourcils. Elle, c'est assez différent.

Une question s'échappe. Xion la laisse imprégner l'atmosphère avant de s'évanouir doucement. Puis elle s'assoit bien en face de la jeune femme, ce qui la place à peu près à sa hauteur. Elle n'a pas l'habitude d'être la juge de quoi ou qui que ce soit. Certes, les questions binaires, ça lui parle déjà plus, mais là, elle nage en territoire inconnu. Alors elle se la pose à elle-même.

« C'est ce qu'elle voulait. Et tu l'as aidé. »

Est-ce si mal ? Certes, d'autres seront peut-être blessés par cet acte, mais il ne s'agit pas d'eux. Et ils ne sont pas là.

« Que crains-tu ? »

Pourquoi est-ce que ça l'atteint autant ? Elle a tellement d'armes et de muscles, elle est forcément habituée à tuer, non ? Et pourtant... pourquoi est-ce qu'elle lui ressemble ? Elle semble... perdue. Comme une enfant sans ses parents. Elle dégage une forme... d'innocence. Mais comment elle, pauvre coquille vide, miroir brisé de ce qui fût, peut-elle voir en cette humaine un reflet propre, quand elle-même est supposée en être un ?

D'un petit grognement proche du râle, elle ôte à son vis-à-vis l'opportunité de répondre. Sa queue s'agite et fouette l'air pour chasser tout ceci. Pas de place pour les troubles, ça fait trop mal. L'enfant d'Aqua observe le corps. Le clan de Lagertha brûle les siens. Mais cette femme souhaitait se mêler à la terre. Seulement, les bêtes risquent de la trouver quand même, à moins de causer profond, ce qui prendrait du temps.

« Si nous la brûlons, ses cendres se disperseront dans le bois. Sinon il faut creuser très profond. »

Elle plante son regard rond sur la jeune femme.

« Je t'aide. » Ses moustaches frémissent. « Enfin si je peux. Je ne sais pas faire de feu. »

Ça ne la dérange pas de creuser non plus. Elle n'a pas les plus grosses pattes mais elle est rapide.

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Rymaïn & Xion ° Mi-Printemps ° Petit Bois

Les bruissements de la forêt sont les seuls échos à sa question, enveloppant progressivement la clairière, tandis que l'enfant divin qui s'apparente à une renarde s’assoit face à elle. Ce premier silence, étrangement, n'est pas désagréable... Quasiment à hauteur similaire, elle l'observe finalement lui apporter une forme de réponse. Rymaïn à la sensation qu'elle lui offre davantage sa pensée propre qu'un parti pris quel qu'il soit. Cela permet à la nordienne de retrouver une certaine sérénité.

La question suivante l'interpelle un instant, elle ignore à quel niveau la saisir. Est-ce une globalité, ou cela porte-t-il sur quelque chose de spécifique? Mais avant de s'interroger sur la forme, ne lui faudrait-il guère s'interroger sur le fond? C'est à dire son propre ressenti, cette... crainte qui vient d'être nommée, et par conséquent, lui apparaît désormais plus concrètement. Elle n'aime guère se pencher sur ce qui touche l'aspect émotionnel, surtout lorsque cela lui échappe. Soudain, la renarde grogne faiblement, et semble s'agiter, ses iris d'or se posent sur le corps inanimé, comme si elle n'attendait guère de réponse.

La nordienne observe à son tour la jeune femme allongée. Effectivement, il faudrait creuser profond, et brûler le corps semble plus indiqué. Moyennant quelques précautions préalables, évidemment. "Oui, ce serait plus judicieux..." Comme la créature divine lui propose son aide, elle se hasarde à lui demander quelque chose, sans réellement en faire une demande. "...Il faudrait dégager la terre autour d'elle des feuilles et autres branchages afin d'en faire un lit pour amorcer la crémation. Et pour que le feu ne se propage au delà d'une certaine surface." Là dessus, elle saisit son sac sans fond, et en retire un petit coffret qui sert à stocker de quoi entretenir ses armes. Elle y a entreposé une pierre à briquet ainsi qu'une petite pièce d'acier strié qui lui permettront d'allumer un feu.

Heureusement, la clairière offre un espace adéquat pour ce genre de pratique, il faudra néanmoins rester un peu, le temps de s'assurer que le corps soit consumer entièrement et que le vent n'emporte pas de braises susceptibles d'embraser la forêt. La renarde s'est attelée à la tâche, et lorsque le corps fut posé sur le lit de branchages, la nordienne s'accroupit un instant, afin d'y projeter plusieurs étincelles qui finirent par embraser l'ensemble progressivement. Espérant que l'odeur de chair brûlée n'attise certaines bêtes... Ce ne serait déjà pas agréable à respirer. "Éloignons-nous un peu." Suggéra-t-elle, revenant au bord de la clairière.


Alors que des flammes de plus en plus grandes dessinent d'étranges et fascinantes ondulations, le regard fixé sur le brasier, elle décide de répondre à cette précédente question tout de même, avec la seule donnée accessible et consciente qu'elle possède.

"Je crains la mésestime des enfants divins... Moi qui ne suis que simple humaine, semblable à un golem inachevé, modelé pour affliger votre race tels mes prédécesseurs." Si cette peur la rongeait depuis longtemps, ce devait être la première fois qu'elle la formulait réellement. Des êtres faibles, éphémères, incapable de libérer 'réellement' un semi-dieu de ses chaînes. A peine susceptibles de leur offrir quelques joies provisoires... évanescentes.

Mais craignait-elle uniquement cette mésestime, ou y avait-il autre chose? Elle se perçut à nouveau au cœur des abysses, dans la cellule du serpent de cristal, et son visage se ferma soudainement. "Sans doute ais-je surtout peur de moi-même. Du chaos et du vide presque omniprésent..." Elle soupire, en levant les yeux vers la canopée, passant une main sur le côté de son cou. La lumière qui transperce le feuillage éveille néanmoins un fin sourire au coin de ses lèvres. "Heureusement, de rares lumières m'habitent et brillent assez fort pour me maintenir à flot jusqu'à présent."

Elle s'interrompt, laissant un nouveau silence s'installer. Ses yeux redescendent vers la renarde, ignorant comment cerner la créature auprès d'elle. Elle lui semble distante et proche à la fois, dans son attitude, comme ses mots. Elle se comporte un peu comme le ferait Rymaïn en présence d'un être humain de façon générale, avec hésitation ou prudence? Incertitude, peut-être... la nordienne peut-elle seulement se permettre de croire éprouver une similitude -même sans en cerner réellement les contours- avec un être divin?

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Chasse-moi si tu peux !

Elle a cette façon de s'adresser à elle, sans vraiment la regarder ni lui parler. Un peu comme au début, avec tous ses mots sacrés, mais un peu différent. Fut un temps, Xion aurait trouvé cela amusant. Aujourd'hui, elle le remarque simplement. Peut-être qu'elle s'interroge, au fond.

L'enfant d'Aqua s'exécute et creuse autour de la silhouette funèbre. Elle la sépare de ce qui vit encore avec ses pattes divines, puis soulève délicatement le corps à l'aide de son museau, pendant que la jeune femme dispose les feuilles et branchages. Plus instinctivement que par mesure de sécurité, la renarde fait ensuite le tour de ce tableau mortuaire, la queue glissée dans le sillon pour y libérer un infime cours d'eau. Ainsi, les Quatre Dieux l'accompagnent symboliquement.

Le linceul naturel finit par s'embraser. Xion prend position aux côtés de la grande humaine, et contemple. En tant que fille des Abysses, elle ne devrait craindre le feu. Et pourtant, elle a vu le monde brûler. La surface de son eau, empoisonnée par des flammes incontrôlables, avides de supériorité sur tous les éléments. Elle ne redoute pas le feu des autres demi-dieux, mais celui de ses enfants humains.

Toutefois, le crépitement de celles-ci est apaisant. Il s'apparente à l'acte de la femme un peu plus tôt. Libérateur. Dévoilant la beauté qui peut se cacher dans la mort. Xion est sereine. La présence à ses côtes s'anime pour répondre à la question qu'elle n'aimait pas se poser.

La créature des abysses penche légèrement la tête sur le côté en observant le visage encré. Les ombres d'Ignis dansent sur ses traits, jouant avec la couleur de ses yeux. Simple humaine hein ? Qu'est-ce qui fait qu'eux sont en partie divins et pas ces nouveaux humains, pourtant nés des mêmes parents ? Est-ce leur magie ? Leur puissance ? L'Homme le plus puissant est-il plus proche du divin ? Son regard doré se détourne, aspiré par les ondes chaleureuses du bûcher. Ce début de réflexion s'évanouit rapidement. Ce n'est plus son genre de s'interroger sur la nature des choses.

Elle reporte ses iris brillants sur la rousse à la suite de ses propos, y percevant toujours cet écho insaisissable. Elle assimile lentement ses mots, sans la quitter du regard, puis croise finalement le sien. Elle n'est pas habituée à partager ses pensées, mais elle apprend. Sa voix se fait plus douce, comme le bercement de l'eau.

« Ce n'est pas de ta faute, ce qui est arrivé. »

Mais c'est peut-être la leur ? Elle ne sait pas.

« Si tu es chaos, alors tu n'es pas vraiment vide... »

Peu importe à quel point on le désire, ce quelque chose nous habite, même à l'abri sous la violence. Il est si difficile de s'en débarrasser. C'est un peu une question, aussi. Le regard de l'enfant semi-divin tombe sur le sol à ses pieds. La dernière étincelle illumine brièvement quelques zones d'ombre de son esprit. Les rares lumières dans les ténèbres de l'océan. Elle les sonde, incapable pour l'instant d'en tirer des leçons, mais elle les voit ces lumières, elle aussi.

Quelque chose attire son attention et elle se redresse vivement. Elle ne sait pas écouter les vibrations de la terre, est moins sensible à ce que dit l'air, mais il y a une odeur qui reste la même sous la mer. Celle du sang. Sa vue et son ouïe perçoivent l'embarras des feuillages, dérangés par une course.

« Un homme blessé. Il s'enfonce dans le bois un peu plus loin. Paniqué et désorienté. »

Ses instincts de prédatrice sont là. Elle ne le sait pas, mais il appartient au convoi de la grande humaine. Un bruit plus sourd retentit de l'autre côté. Une présence plus imposante, liée à ces lieux. Que faire ? Protéger la dépouille, toujours rongée par les flammes ? Ou s'enquérir de la situation au-delà de la forêt ? Xion sait que ce choix ne lui revient. Elle prend néanmoins sa décision.

« Je te suis. »

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Mana:

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