L'aube de la Nouvelle Nuit

Voilà maintenant quelques temps que nous étions fixé au milieu de ce village abandonné, vidé de ces habitants humains et libéré de ces envahisseurs monstrueux par nos soins. Cet endroit ne payait pas de mine, la mort  en était le décor, tout autour de nous qui n'étions qu'un petit clan au milieu de l'étendu de ce village vide et silencieux. Nous avions pourtant trouvé notre place, en son centre ou avait été bâtit quelques maisonnée encore accueillantes, tout du moins, après les quelques jours à les avoir retapé pour qu'elles le redeviennent, grâce au bois des autres maintenant inhabitées. C'était comme un village dans un autre, un petit quartier que nous avions pris soin d'entouré de palissades pour nous y abriter d'autant plus.

C'était là la seule manière efficace de procéder, après tout nous n'étions pas assez pour assurer la garde partout, même si pour cela nous avions évidemment l’appui de Galifey et Xion. Malgré toutes ces déconvenues, je devais bien avouer qu'être ainsi tous réunis, dans un endroit proche d'un foyer quoi qu'éphémère, cela avait de quoi m'apaiser. A chaque réveil et ceux même au travers de l'épaisse brume qui nous entourait, je sentais ces temps de vagabondages s'éloigner. Les quelques sourires des miens revenaient à la surface et réveillait quelques pensées pour l'illusion que m'avait fait vivre Xion dans sa cellule. J'y avais découvert un souhait, un but dont je ne me doutais pas, celui d'offrir une renaissance à mon clan quand je croyais que tout ce qui m'importait était ma vengeance. Je l'avais même repoussée...

C'était étrange et une sensation nouvelle qui me traversait de plus en plus souvent. Mais elle n'était pas la seule. Car pour parvenir à prendre ce village plus au nord, en terre de Non-Droit qui, elle, saurait nous accueillir convenablement, il fallait que j'attende. Et que j'attende quoi, ou qui ? Je vous le donne en mille, le Démon. Cet homme qui faisait naitre en moi un tas d'émotions contradictoire et souvent au même moment. Je l'avais quitté, après cette nuit là sans un au revoir, parce que les au revoir ne me connaissait pas, encore moins dans ces conditions là. J'avais cherché, par tout les moyens, à ne pas pensé à cela, mais ça me hantait plus que je ne le souhaitais. Ce qui, au fil des jours, se transformait en ressentiment déguisé. L'impatience me gagnait, pas à le retrouver, mais à enfin pouvoir prendre ce qui m'était dû et pour cela, je devais l'attendre lui. Alors dans mon esprit, il était celui qui ralentissait mon avancée et je trépignais de plus en plus, le maudissant d'être aussi long à venir à notre rencontre.

Pourquoi mettait-il si longtemps ? Mes indications n'avaient pas été assez claire peut-être ? Non, il avait simplement mieux à faire sans doute, comme le Comte qu'il était face à sa prétendue allié à peine cheffe de clan. Pourquoi n'avais-je pas le pouvoir d’accélérer le temps ? Si je le pouvais, qu'il s'attende à entendre de mes nouvelles. Est-ce que ça lui plairait que moi je le fasse attendre ainsi ? Non, certainement pas et il me le ferait très bien savoir. Alors moi, je ne me gênerais pas non plus quand il arrivera, si il arrive un jour. Oui, voilà ce que le temps loin de lui avait fait naitre en moi, des ressentiments et c'est avec eux que je l'accueillerais.

C'est ainsi que Lothar et Hagen, en poste à l'entrée principale du village, notaient l'arrivée du Démon. Si avec la brume il avait été difficile de le reconnaître immédiatement, après quelques œillades et une demande de son identité, il ne leur fallut pas longtemps pour lui ouvrir les portes. Lothar restait à son poste, quand Hagen prit soin de guider le convois à travers le village vide, silencieux et morne. Autour, il n'y avait que de la brume, des maisons en bois inhabitées, parfois abimées, parfois écroulés. Le vent sifflait parfois à travers leur planche et donnait à ce village un air fantomatique. Un peu plus loin cependant, le lueurs de torches marquait la direction de notre emplacement et en avançant, on distinguait le deuxième cercle de palissade qui s'ouvrit à l'annonce de la venue d'Hagen. Ivar l'accueillait, ainsi que le Démon en lui accordant une sorte de salutation assez mal effectuée.

L'espace dans lequel le convoi entrait était assez restreint et il devrait sans doute stationner à l’extérieur, manœuvrer pourrait être difficile. La brume s'y déposait moins et permettait de mieux appréhender l'endroit et surtout, ce qui s'y passait. A l'arrivée du Démon, chacun stoppait son activité. Sig qui préparait le repas dans une marmite suspendue au dessus d'un feu se redressait lentement, son attention portée au Démon avant de le saluer poliment. Elle ne l'avait jamais rencontré, mais elle se doutait bien de qui il était. Falko et le Tréant n'étaient pas loin. Ce dernier, assis sur un banc avec Hedda à ses côtés, arrêta de conter son histoire pour se relever péniblement et saluer solennellement le visiteur allié. La petite elle, restait sur ses gardes et se rapprocha même de Xion et Galifey qui étaient, eux-même, posté non loin. Ce qui n'était pas forcément le cas d'Astrid qui n'avait pas bougé du mur sur lequel elle était adossée. Amalrik sortait de la maison dans laquelle il avait élu domicile, alerté par le bruit.

Quand à moi, j'avais maugréé dans ma propre habitation, jusqu'à ce que le bruit me parvient. Je n'avais été aucunement prévenue de l'arrivée de quiconque et n'identifiait même pas ce qui pouvait bien se passer. Alertée, je sortais brusquement et à sa vue, me figeais tout simplement. Les regards des miens se tournaient vers moi, mais je les sentais à peine. Ce que je sentais en revanche, c'était mon cœur qui avait fait un bon quand je fus face à lui, même si il était loin de plusieurs mètres. Je l'avais reconnu sans mal et mes yeux s'étaient écarquillés. Je ne bougeais plus, tout simplement et ce pendant plusieurs secondes certainement. Sig nota mon état sans difficulté et s'apprêtait à me rejoindre, mais elle n'en eu pas le temps. Mon corps réagit alors de lui-même, cherchant sans doute un échappatoire au flot qui s'était déversé dans mes tripes.

Je faisais machine arrière, rapidement, revenais sur mes pas et trouvais refuge dans ma maison, dont je fermais la porte derrière moi, restant ainsi sur le bois retrouvant le souffle que j'avais perdu. Par les Dieux, étais-je devenue folle ? Pourquoi est-ce que je réagissais comme ça ? Je me sentais... prise au dépourvu, plus que surprise et surtout, incapable de réagir sereinement à sa vue. C'était comme si... je perdais pied, à tel point que j'avais préféré opté pour le fuite. C'est pas vrai... quelle idiote. De quoi pourrais-je bien avoir l'air en réagissant ainsi ? Je ne savais ni quoi penser ni quoi faire, la seule donnée que je captais c'était mon cœur qui tambourinait à m'en faire souffrir. Ma respiration était haletante et je sentais ma température grimper.

Adossée fermement à la porte, le temps défilait certainement. Pourtant, je n'arrivais pas à m'en défaire, je n'arrivais pas à bouger, mon corps ne voulait pas. J'étais... pétrifiée par je ne sais quel sentiment. Mon regard n'était ancré sur rien et j'avais le souhait étrange de pouvoir disparaître. Pour tout un tas de raison, mais maintenant que j'en prenais conscience, ma réaction en était la raison la plus évidente. Je ne savais plus comment revenir en arrière et peu importe ce que je ferais ensuite, tout paraitrait étrange. Quel était ce mal qui envenimait mes pensées et mon corps ? Incapable de faire quoi que ce soit, c'est Sig qui prit les devants, en invitant le convois à s'installer où il le pouvait. Elle s'approcha même du Démon en conservant le silence, puis en portant son regard vers ma position, comme si elle l'invitait à y aller. Pourtant, elle ne s'y permettrait pas alors, elle se contenta de lui accorder un sourire avant de lui demander si ses hommes avaient besoin de manger. Selon la réponse, elle reviendrait à ses occupations d'une façon ou d'une autre.

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L'aube de la Nouvelle Nuit

J'avais fini par fermer les yeux, aussi fort que possible. D'abord, comme un moyen de m'échapper, j'avais l'espoir fou de m'endormir et de quitter ce lieu par le simple pouvoir de ma pensée. Un vain espoir je le savais et pourtant, je fermais mes yeux avec une forte ferveur. Tout comme la porte dans mon dos, contre laquelle j'avais l'impression de me battre pour la maintenir fermé sur l'homme qui me faisait perdre la notion de réalité. Le temps m'avait paru long avant que je ne sorte de tout cela, pourtant, j'avais fini par retrouver le calme de respiration, toujours prononcée tout de même. Mon corps se détendait lentement et étrangement, il ne se passait pour l'instant rien d'autre.

J'aurais pu m'en méfier, m'en inquiéter, mais tout ce qui m'importait c'était de retrouver mon calme. Des bruits derrière la porte me ramenait pourtant à la lourde réalité. Je ne discernais pas bien ce qui se disait, j'entendais les voix, mais plutôt comme un son diffus. Mon visage se refermais alors peu à peu, retrouvant la sévérité qui le tirait à l'accoutumé. Lentement, je libérais la porte de mon poids, faisant un premier pas en avant pour m'en défaire complètement. Et puis finalement, je reprenais de l'aplomb, fermant les poids et fermant mon air, m'apprêtant à me retourner pour faire front.

Mais à peine j'amorçais un demi-tour que j'entendis frapper à la porte. Prise alors d'un sursaut, je me tournais complètement avant d'entendre sa voix. Instinctivement, mon regard se détournait de la porte, cherchant à nouveau à fuir. Mais je ne pouvais pas, je ne pouvais plus. Il fallait que je me reprenne. J’eus alors une pensée pour les cœurs tendre dans ma sacoche sur la table dans le coin de la pièce, mais leur souvenir n'étaient pas des meilleurs. Alors je préférais renoncer à l'idée. De fait, je n'avais rien d'autre qui pourrait m'aider, alors je n'avais plus le choix. J'inspirais profondément et ouvris la porte, le visage et le regard détourné.

Je restais ainsi une ou deux secondes à tenir la poignet, ne lui faisant pas face. Pourtant, je ne l'invitait ni à entrer et n'avais pas non plus la force de sortir. C'était ridicule et pathétique. Moi, qui n'avais pas la force de sortir d'une maison pour des raisons obscures. Je finis alors par lâcher la poignée, allant chercher la gourde sur la table avant d'en boire quelques lampées pour détendre ma gorge qui s'était trop serrée. Après l'avoir éclaircis, je restais pourtant posté là, tourné vers le coin de la pièce.


Ça l'était et pourtant, c'était presque plus confortable que notre ancien camp. La chance d'être un village en terre princière sans doute. En tout cas, détourner ainsi la conversation, voilà un moyen qui semblait me permettre de tenir bon. A vrai dire, c'était bien la première fois que je m'inquiétais d'accueillir quelqu'un de son rang dans une maison si... éloignée de ses propres conditions. Ce qui n'était pas vraiment pour me plaire, j'étais plutôt loin de celles qui s'inquiètent de l'image qu'elles renvoient et cette nouvelle sensation me mettait mal à l'aise.

Alors, le visage toujours fermé je me détachais de la table, tirais la chaise et la tournais vers lui, au cas où il voudrait s'y asseoir. Sans l'y inviter, là non plus. Je traversais alors la pièce et rejoignais mes autres affaires, sur la commode, faisant mine d'en faire quelque chose et à vrai dire, sans savoir pourquoi. Je n'arrivais simplement pas à rester statique ou à lui faire face, alors quoi de mieux que de lui tourner le dos ? Car c'était à présent ce que je faisais.

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L'aube de la Nouvelle Nuit

Je devais avoir l'air d'une idiote, à ainsi ne pas savoir quoi faire de mes mains. Pourtant, j'étais incapable de faire quoi que ce soit d'autres si ce n'est éventuellement lui jeter quelque coup d'oeil pour m'assurer de ce qu'il faisait. Le pire dans tout ça, c'est que je me sentais extrèmement crispé, chacun de mes gestes me semblaient difficile à faire, je sentais mon corps endoloris et tout cela commençait à sérieusement m'énerver. Mon visage se fronçait et mes dents se serraient. Une certaine amertume se mélangeait à tout cela.

Si d'abord j'écoutais à peine ses premiers mots, il ne me fallut pas longtemps pour l'entendre et le sentir se rapprocher de moi. Plus il avançait et moins mon corps bougeait, comme une proie rencontrant son prédateur sans aucun espoir de s'en sortir. Pourtant, je ne me retournais pas jusqu'à ce que je le sente dans mon dos, y provoquant un frisson des plus douloureux, s'amplifiant d'autant plus quand il m'informait de son impatience à me retrouver. Mes yeux s'écarquillèrent alors d'autant plus et je sentais que ma tête commençait à bouillonner. Etait-je fiévreuse ? Oui, peut-être que tout cela était dû à une maladie quelconque.

Malgré cela, le temps s'était suspendu lorsqu'il se tint derrière moi, comme il l'avait fait tant de fois. Sans rien y comprendre, mon corps semblait se détendre, sans savoir si c'était ses mots ou sa présence qui le menait à cette réaction. Voir même tout autre chose. Pourtant, le doute s'installait. Il m'assurait avoir été impatient de me revoir ? Même après que je sois parti sans annoncer mon départ, sérieusement ? Pourquoi... ? Je n'aurais pas de réponse à cela, il choisit tout bonnement de s'en aller et de définir ses propos.

Dans un premier temps, son éloignement n'avait pas été agréable, à tel point que j'avais cédé à me retourner enfin, comme si j'avais voulu le rattraper. M'apprêtant à lui répondre quelque chose dont je ne savais même pas encore le sens, je fus cependant coupé dans mon élan parvenant à peine à déposer mon regard sur dos avant de le détourner quand il prit place sur la chaise, qui plus est lorsqu'il définissait ses propres mots. Moi et mon clan, bien sûr. C'était évident, il était sans doute plus impatient de partir en guerre qu'autre chose. Pour quelqu'un de sa trempe ça paraissait normal. Mon corps, à cet instant, me paru soudainement lourd et je me laissais aller à m'adosser sur la commode, les bras croisés, pour lui faire face.


Répondit-je dans un soupir avant d'entamer un nouveau silence. Il était là pour l'attaque qui se préparait et il était ici pour en parler. C'était normal et tout ce à quoi je devais m'attendre. Etrangement, à ainsi revenir sur terre, je prenais peut-être conscience que mes réactions étaient sans doute liées à ce que j'avais ressentis quand je l'ai quitté. Là aussi, c'était un flou sans nom, mais c'était du passé. Aujourd'hui, il s'agissait de construire l'avenir, stratégiquement. Je ne pouvais laisser la place à tout ces questionnements, nous étions alliés. Il ne fallait y voir que ça. Malgré tout, je ne me sentais pas très bien, toujours alourdis, le regard bas et la mine sans doute affaissé.

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L'aube de la Nouvelle Nuit

A vrai dire, ma question n'en était pas vraiment une. Si elle était légitime, car le sujet était important, je doutais simplement d'avoir un réel intérêt pour sa réponse, du moins pour l'instant. Cela se traduisait évidemment par un manque d'entrain à l'écouté, plutôt prise par les tourments de mon esprit plus insondables les uns que les autres. Pourtant, quand j'entendis la chaise grincer légèrement, mon regard se tourna vers ses pieds, prenant conscience qu'il s'était relevé. Et là, contrairement à tout à l'heure, le temps semblait s'accéler, m'échapper complètement. Mon cœur s'emballait encore une fois, sans savoir là encore pourquoi.

Il s'était levé et j'entendais à peine ce qu'il me disait, bien que ses mots soient positifs. Cette fois-ci en revanche, mon regard parvint jusqu'au sien, terni et motivé par une sorte d'apréhension concrétisée alors qu'il trouvait la porte. L'instant d'après fut fulgurant de surprise, même pour moi, je ne m'étais même rendu compte de rien alors que je découvrais ma main fermement accroché à son bras, mon regard brun s'y déposant comme pour m'assurer que j'avais bien fais ça. Pétrifiée par mon acte que je n'avais ni envisagé ni mené, la faute à ce foutu corps qui réagissait sans que je l'y invite, mon regard s'ancrait sur ce lien.

Je restais ainsi, jusqu'à ce que ses mots attirent mon attention et mon regard à lui. Encore une ou deux secondes ainsi, les yeux dans les yeux, avant que je ne le lâche d'un pas en arrière et détournant mon regard.


Bon début, mais encore ? Tout se mélangeait, je n'avais visiblement pas envie qu'il parte, en tout cas c'était ce que j'en déduisais et pourtant, j'avais moi-même fuis plusieurs jours auparavant. A ce propos, il ne paraîssait pas plus atteint que cela. Mon départ avait sans doute eu plus d'effet sur moi que sur lui, qu'elle idiote d'avoir pu pensé, voir espéré en prenant du recul, que cela aurait pu le peiné. Pourtant, des questionnements me brulaient les lèvres. J'en avais assez de ne pas savoir ce qu'il en était, ni ce que j'en espérais. Il m'avait forcé à m'imposé la réalité de notre alliance, purement stratégique et j'y avais consentis, à contre cœur je devais bien l'admettre. Mais à quoi je m'attendais ? Nous n'étions pas du même rang après tout, si nos corps s'appelaient, il n'était question que d'amusement et plaisir rien de sérieux. Et pourtant, après cela, je lui avais cédé ce que je n'avais jamais cédé, j'avais pris ce que je n'avais jamais voulu d'un homme.

Voyons, qu'est-ce que Sig me conseillerait là maintenant ? De parler, ça c'est certain. Mais de quoi, je ne savais même pas quoi dire ni quoi demander. Voulais-je seulement clarifier les choses, au risque qu'elles ne me conviennent pas ? C'était sans doute pour cela que j'évitais toujours tout, je préférais ne rien avoir que ce que je ne voulais pas. Qu'est-ce que je voulais là ? Je ne savais même pas vraiment et c'était sûrement pour ça que je me perdais autant. Et je sentais un fois encore mon visage se fermer face à tant d'incertitude. Peut-être que les exprimer suffirait... alors dans un soupire, j'en lâchais une partie infime.


J'eu un nouveau mouvement de recul, je n'étais pas à l'aise avec l’aveu de mes doutes, encore moins face à lui. Si j'avais appris durant des années avec Sig et que j'y parvenais petit à petit avec Xion, avec lui c'était encore différent. Mais la question était légitime, je ne savais plus comment le considérer. Au départ c'était facile, il n'était qu'un homme attirant et mon allié. Aujourd'hui, il était celui qui me tourmentait et faisait de mes pensées une marée à la houle effrénée. Il y avait eu quelque chose, cette nuit là qui avait tout changé, et depuis, je n'arrivais pas à revenir en arrière.

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L'aube de la Nouvelle Nuit

Je ne pouvais voir ses réactions, j'étais trop occupée à compter les miennes et à essayer de les comprendre. Je ne l'avais pas vu regarder mon tissu, qu'à vrai dire je ne regardais plus que rarement. Quoi que peut-être, il pourrait me permettre d'y voir plus clair. J'avais rarement le réflexe d'utiliser cet outil et à vrai dire, ça avait tout aussi rarement fonctionné. Parce que je n'étais pas vraiment la plus apte à prendre du recul sur une simple décision. Mais ne pas savoir commençait à sérieusement me déplaire, quand jusqu'à présent ça ne m'importait que peu.

Contre toute attente cependant quand je sentis sa main sur mon menton, invitant mon visage à faire face au sien, je n'avais été prise d'aucun surprenant frisson ou retrait brusque. Au contraire, je m'étais laissé guider, peinant tout de même à lui offrir mon regard. Je n'avais pas non plus envie de rire, pourtant j'avais tout de même quelque peu réagis à sa plaisanterie, d'un simple soupire prompt, un brin narquois. C'est vrai que je l'avais frappé, souvent, c'était la ma meilleure façon de communiqué si j'en croyais ce qui se disait autour de moi. C'était surtout ce que je savais faire de mieux, contrairement à maintenant.

Tout ce que je savais de cet instant, c'est que mes doutes n'étaient que de bruit de fond. J'étais étonnement plus détendu, mais toutes les accalmies ont une fin. Si d'abord il m'avait relâché, ce qui attira inévitablement mon regard à lui, plein d'interrogation à nouveau, mais la plus importante à ce moment là était « Pourquoi ? ». Pourquoi m'avait-il lâché, pourquoi soupirait-il maintenant, pourquoi pensait-il que c'était de sa faute ? A propos de quoi ? A nouveau, je perdais pied, assaillit par tant de chose, mon regard devenait fastidieux et agité quand mes doigts se crispaient. J'ai raison ? C'est de l'attaque dont nous devions parler ? Mais non, j'avais tord, je voulais avoir tord. Il ne pouvait pas lâcher après ça.

A nouveau, je sentais mon esprit s'emballer, mon souffle se perdre. Je me sentais déboussolée, prête à flancher alors instinctivement, je fis à nouveau un pas en arrière, comme pour retrouver un second souffle. J'inspirais, profondément et expirais lentement, dans un souffle fin. Mon regard n'était toujours pas dédié au sien, mais au moins il allait vers lui.


Ce n'était pas habituel de ma part, mais après avoir consentis à repousser ma vengeance, je pouvais bien accepter de repousser les limites de ma patience. Ce court échange plus terre à terre avait eu au moins l'effet de me calmer un peu. J'avais toujours le regard bas, mais au moins je m'étais éloigné d'une certaine explosion. Un peu incertaine, je me lançais à nouveau.


Là mon regard trouvais le sien, interrogatif presque...timide. Maintenant que nous avions admis qu'il faudrait du temps avant de repartir, nous pouvions bien en perdre un peu ici. C'est ce que je me disais, ce que j'essayais de mettre en pratique. Au côté de Sig et surtout de Xion, j'avais appris que les conversations demandaient souvent du temps, d'autant plus quand je peinais à trouver les mots. Lui en était déjà plus habile, j'espérais sans doute qu'il m'aide.

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Si au départ je me sentais bête et je voyais mes réactions comme des entités irréels, si éloignés de ce que j'étais, ce que je voyais devant moi l'était encore plus. Il se rapprochait de moi, ça ce n'était pas très étonnant et en mon fort intérieur, je le remerciais de le faire encore malgré mes nombreuses fuites. Mais je l'entendais et le voyais prendre un élan par la respiration, tout comme je l'avais fais juste avant. C'était intriguant, peut-être plus que de me savoir le faire. Venant de lui, c'était inhabituel, lui qui me semblait toujours si sûr de lui. Tout comme moi finalement, ce qui n'était pas du tout le cas en cet instant.

Cependant, maintenant que j'avais cherché à connaître ses croyances, j'étais presque suspendue à ses lèvres tandis qu'il se jouait de ma patience. Dans un premier temps, ses mots me firent baisser les yeux, un énième fois. Voilà qu'il revenait sur mon départ silencieux. Là non plus, je ne me l'étais pas expliqué, du moins pas avec justesse. J'avais simplement cherché à éviter de m'engouffrer trop profondément dans un lointain insondable et inconnu, duquel je n'étais pas sûre de revenir. Et... ça m'avait fait peur, sans connaître la véritable nature de ce nouvel endroit. J'avais rarement peur, du moins pas comme ça et je m'étais dis que je devais suivre mon instinct à ce moment là. Mais aujourd'hui, je n'en étais plus tout à fait sûre. D'autant qu'il semblait m'en tenir rigueur, ce qui n'était pas très étonnant.

Je tenais pourtant bon, début face à lui, sans broncher, les lèvres se pinçant et mes poings se refermant. Peut-être n'était-il tout simplement pas habitué à ce qu'une femme refuse son lit. Y avait-il de l'orgueil dans tout ça ? C'est que j'aurais pu croire, jusqu'à ce qui m'avoue avec une pénibilité proche de la mienne avoir été atteint, d'une quelconque manière, par cet acte. Si je m'y attendais... Mon dos se tendait d'une certaine surprise, tandis que mon visage s'en imprégnait avant d'à peine tourner les yeux vers lui, sans aller foncièrement plus loin que le buste face à moi. Puis je les baissais, à nouveau, ne bougeant pas de place cependant. J'étais finalement bien là où j'étais et ce malgré l'apparente contrariété que représentait cette discussion. Je laissais à mon tour quelques secondes de silence, le temps de rassembler un peu mes esprits, mais la réponse était pourtant assez simple.


C'était limpide, même si ce n'était que la première étape d'un labyrinthe complexe. Ce qui demandait donc un peu plus d'affinage.


C'était déjà un peu mieux. Ça n'avait l'air de rien ou en tout cas d'une différence pas très importante, mais ça l'était. Quand il était question d'une incapacité, il était davantage question là d'une volonté différente et inédite. Mes bras venant enrouler mon corps, sans trop forcer, comme un moyen peut-être de me maintenir debout.


Bien, avec ça c'est sûr il allait tout comprendre. Non, bien évidemment que non, je ne comprenais pas moi-même, alors comment pouvais-je lui expliquer clairement. Ça m'énervait, je n'aimais pas cette sensation et mon corps se crispait en réponse, serrant son étreinte autour de moi.

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L'aube de la Nouvelle Nuit

Je me permettais une réaction plus grande, à nouveau sarcastique d'un haussement d'épaule tinté d'un soupire ironique. Je ne savais pas non plus que j'étais ce genre de femme, à nouveau, je n'avais jamais été à l'être. Je n'avais jamais ressentis une peur comme celle-ci. Je n'avais pas peur de la mort ni de mes ennemis, car je savais à quoi j'avais à faire. J'avais peur de perdre mon clan, mais là encore il y a avait quelque chose de différent, je le redoutais plus que d'en avoir peur. Là, cette nuit là, c'était une sensation bien différente, un pas que j'avais fais en arrière au lieu de tout risquer pour quelque chose que je ne connaissais pas.

Ses mots pourtant sonnaient étrangement à mes oreilles, je relevais les yeux d'un air sérieux vers lui quand il prenait comme un choix ce que j'avais fais. La nuit m'attirant vers lui quand le jour faisait le contraire, à croire que je me laissais guider par des insctincts primaires. Ma mine se renfrognais quelque peu, fronçant les sourcils. Si je n'avais pas de problème à exprimer mes envies, à faire ce qui me plaisait dans ce domaine, dans sa bouche il y avait quelque chose qui me déplaisait. Ne lui avais-je pas prouvé que les choses avaient été différente cette nuit là ? Je me l'étais bien prouvé à moi-même et c'est même pour cette raison que j'ai cherché à le fuir, par peur de ce que je pourrais devenir en persistant. Mais lui ne voyait toujours en moi qu'une femme chaude la nuit et froide le jour.

Ses mots me blessaient, plus que je ne l'aurais imaginer et je finissais par détourner mon visage. A y regarder de près, c'est ce que j'avais toujours été auprès de lui, le jour au dehors était d'ailleurs inédit pour envelopper une conversation de cette ordre. Nous avions plutôt l'habitude de se laisser aller à la chandelle de l'ombre, plutôt que sous une éclatante clarté, comme si la lumière dévoilait trop de chose que j'avais du mal à supporter. Le coup de grâce fut fulgurant lorsqu'il posa une main sur mon épaule, comme n'importe qui pourrait le faire avec un sourire comme celui-là. Mes yeux assombris se posait sur le dos de sa main et le silence m'enveloppait malgré sa question, à laquelle je m'y du temps à répondre.


Je sentais mes nerfs commencer à vibrer et l'adrénaline d'une certaine contrariété éclaircir mon intention et mes paroles, tout comme ma détermination à me faire comprendre et à ce qu'il change l'opinion qu'il avait de moi. J'aurais pu m'en foutre évidemment, mais c'était loin d'être le cas et il me fallait défendre ma position. Mon regard s'ancrait sérieusement dans le sien et ma voix était plus forte, plus tranchante.


C'est fou comme il avait le don de m'énerver et de me forcer à traduire mes propres pensées, comme à l'image de cette putain de nuit où il avait tout brisé. Mais là, je me sentais peiné, blessée et déçue. Enfin, il restait un homme après tout, j'avais été assez bête pour croire qu'il était différent, qu'il avait plus envie de moi que quelques coucheries. Visiblement ce n'était pas le cas. Alors à son image, je baissait les paupières pour soupirer et rire nerveusement. Je ne comptais pas m'énerver davantage, ça n'en valait pas la peine. En parlant de ça... je me retirais et rejoignais la table pour boire une lampée de ma gourde d'eau fraîche, adoucissant ma gorge qui s'était crispé. Lui tournant le dos, je pivotait suffisamment mon visage pour me faire entendre.


C'était aussi ça qui m'avait fait continuer mes pas m'éloignant de lui. J'avais pris conscience ce soir là que j'avais mal, à ainsi partir et je ne voulais pas ressentir ça davantage.

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L'aube de la Nouvelle Nuit

Outre l'énervement, il y avait aussi de la peine une fois encore et je sentais mon visage se tordre à ne pas savoir choisir entre colère et déception. Je finissais pas fermer les yeux, immobile et silencieux, le visage bas et les épaules crispées. Pourtant, malgré tout ça, il se rapprochait de moi. Malgré ma véhémence et ma colère, il revenait vers moi. J'aurais pu lui repousser, ou lui dire encore tellement de chose, lui en reprocher d'autre certainement, mais je n'y arrivais pas, je ne le voulais pas. J'étais là et il était là, derrière moi, comme une ombre enveloppante et chaleureuse, me forçant à ouvrir quelque peu les paupières avant de tourner légèrement mon visage vers lui. J’eus alors une pensé pour l'épreuve de Xion, dans laquelle j'avais choisi l'ombre, entre cette dernière et la lumière. J'y voyais là comme une résonance de mes choix, peut-être même de mon histoire elle-même.

Et comme l'ombre dans ce temple, celle-là était apaisante. Cela m'était déjà arrivé, en sa présence, de retrouver un certain calme malgré une tempête qui me rongeait et une fois encore, c'était le cas. Je pourrais m'y habitué... En avais-je envie ? Avais-je peur ? Je n’eus pas le loisir de trouver la réponse, il s'aventurait à me toucher, bien différemment de cette pathétique main sur mon épaule. Je sentais ses doigts, leur pulpe se frayer un chemin sous ma chevelure pour l'en défaire de ma nuque.Un long et terrible frisson y prit racine, traversant mon dos sur la ligne de ma cicatrice. Cette tension dans l'échine me fit détourner quelque peu le visage, surtout pour lui cacher que j'avais fermé les yeux, comme si une nouvelle pudeur faisait son apparition. Mes bras s'étaient croisés, comme pour faire face au froid et je rouvrais à peine les yeux quand ses mots me parvenaient.

Pire encore, le froid d'un frisson se transformait en douce caresse quand il se rapprochait encore, pour venir m'entourer de ses bras, prenant leur place sous les miens. Je devais bien avouer qu'une certaine surprise m'avait pris, mais pour seul réaction, mon regard descendait jusqu'à cet enlacement de mon être. Je ne comprenais pas ce qui se passait, tout ce que je savais c'est que je n'avais aucune envie de m'en défaire. Alors simplement, je me laissais faire comme il me le soufflait. Je n'avais de toute manière pas d'autre alternative. Oui, je pouvais peut-être rester ainsi, même si mon cœur semblait vouloir m'échapper. Si ses battements étaient forts, ils ne s'emballaient pas, pas comme tout à l'heure. Je me laissais alors doucement enlacer, refermant mes épaules pour que cela soit encore plus poussé, peut-être que là encore c'était mon corps qui y répondait de lui-même. Je ne savais pas, je ne savais plus, je n'avais pas envie de chercher à savoir.

L'une de mes mains glissait alors vers le bas, pour finir par presque se superposer à son bras. Pourtant, une question me vint à l'esprit, si étrange qu'elle me faisait douter à l'exprimer ou non. Je ne lui avais pas répondu, mais j'espérais que ne pas me défaire de son étreinte suffirait et j'y restais encore, ma tête penchant vers lui pour façonner un peu plus ce lien. Un souffle, un murmure s'échappait alors de mes lèvres.

Codage par Libella sur Graphiorum

L'aube de la Nouvelle Nuit

Je sentais son souffle sur ma peau, pas autant que je l'aurais pu ni voulu, après tout mon épaule n'était pas nu. Mais il s'imiscait discrètement, courant sur mon cou pour se faufiler un peu plus loin avec une infinie douceur. Là encore, il y avait quelque chose d'apaisant, malgré cette petite pointe un peu différente qui était toujours là, quelque part, mais j'avouais volontiers ne pas vouloir la laisser s'ancrer davantage. Je finis presque même par sentir ses battements de cœur dans mon dos, tant notre étreinte s'accentuait d'elle même. Nul doute qu'il sentirait le mien raisonner dans ses bras. J'esquissais cependant un léger sourire à l'idée de ne pas être aussi robuste que je l'étais, jugeant que j'aurais pu être brisé si il avait continué.  

Si j'avais espéré une réponse en particulier à ma réponse, il avait choisi la bonne. Je n'avais rien envisagé évidemment, mais c'était la meilleure qu'il aurait pu me donner. Il y avait du sens, tout comme il n'y en avait absolument pas et pourtant, ça voulait tout dire. Mes doigts se serrèrent alors autour de son bras et je fermais les yeux en accentuant le contact de nos visages. Comme c'était étrange, d'ainsi me laisser faire par un homme, me laisser envelopper ainsi sans m'en défaire, alors que j'avais toujours fuis tout cela.

Sauf que cette fois ci, j'avais les idées un peu plus claires, en tout cas un peu plus d'expérience. Ça ressemblait énormément à cette nuit là, où je m'étais laissé allé, où j'avais fais tant de chose, où j'avais laissé mon corps et mon cœur parler pour moi. Et c'était la fin de tout cela qui m'avait fait fuir. Ce moment là aussi en aurait une et ça sera désagréable. Une fine amertume crispa mon visage alors, réduisant notre contact en revenant à une position normale, rouvrant les yeux pour froncer les sourcils, laissant échapper une voix terne, faible.


Un constat simple, futile certainement, pathétique peut-être, mais c'était ma sincérité et mon naïf espoir qu'il comprendrait que ça aussi, ça me faisait peur.

Codage par Libella sur Graphiorum