Quand le festival a fini d'offrir son lot d'animations farfelues à un gamin monté sur ressorts, que la camarade du-dit gamin se retrouve flanquée au lit avec une blessure mal soignée et que la procession part dans seulement quelques heures, il est possible de se retrouver dans une situation un peu inhabituelle et cocasse comme celle-ci.

Simon luttait pour ne pas se laisser aller à l'inquiétude et courait de stand en stand afin d'acheter un maximum de souvenirs à acheter à Oblivion. La pauvre n'avait presque pas pu profiter de l'événement et il était du devoir du héros d'Arcane de rattraper cette immonde injustice. Ayant donc acheté un montant incroyable de victuailles et bibelots en tous genre, il fut ainsi amené à discuter avec une des commerçants très sympathique qui lui demanda à qui était destiné tous ces présents qu'il voyait s'entasser dans les bras du noble.
La réponse touchante le poussa à lui donner une friandise cadeau afin de réconforter le cœur de la pauvre absente en convalescence.

C'est à la suite de cette conversation qu'il se retrouva à discuter avec un autre noble assez connu de sa famille. Ils parlèrent longuement des exploits de Simon à aller deux invocations en une saison et de la dangerosité de l'initiative. Riant de mon cœur, Simon mentionna - non sans taire certains détails - son acquisition d'une monture chevaline qu'il appréciait mais dont l'entretien coûtait plus cher à sa famille que les traditionnels variquans.

"Vous ne connaîtriez pas une personne ou deux pour me donner des conseils ou récupérer cette pauvre bête ? D'autant plus que l'animal est en excellente condition, je suis certain d'en tirer un bon prix à la revente... J'aimerais juste m'assurer qu'il sera bien traité et qu'on ne l'entassera pas comme dans un élevage de seconde main... Il n'est pas aussi endurant qu'un variquan mais il a bon caractère et je ne veux pas qu'on le traite mal à cause d'une cause futile..."

Son visage affichait un air réellement concerné. Il parlait assez fort pour se faire entendre dans la foule, bien conscient que le bouche à oreille était à son avantage.

Il n'avait pas fallu attendre très longtemps avant qu'un gaillard singulier vienne accoster Simon pour sa demande juste formulée. Impressionné par la vitesse de la circulation de l'information, ce dernier se tourna vers son interlocuteur avec un sourire décontenancé mais radieux, devant lever légèrement la tête pour lui parler droit dans les yeux.

"Tout à fait, messire. Appelez moi Simon, et vous êtes ?"

Pas question de prendre de décision hâtive pour autant. Le bien être de l'animal passerait en grande partie par la confiance instaurée entre les deux humains qui discutaient à son sujet. Sans presser les choses, le petit noble regardait le charmant jeune homme qui venait lui parler afin d'essayer d'en dresser le portait rapide : soigné, vêtu avec goût, coiffé pour l'événement, il était au final difficile de se baser sur ça en raison du festival qui embellissait la foule pour cette journée d'exception. Son expression semblait pourtant sincère et franchement honnête - chose que Simon, confiant mais pas crédule, considérait comme une base bonne mais à approfondir - annonçant du bon pour la suite de leur petit entretien.

Pendant ce temps, les nobles qui parlaient initialement avec le vendeur de cheval s'étaient quelque peu décalés afin de faire une place au nouveau venus, commençant ensuite une nouvelle conversation de leur côté, excluant les deux hommes qui commençaient les périlleuses étapes d'une entente cordiale.

St-Pierre ? Le nom ne lui disait pas grand chose. Sans doute l'avait-il entendu une ou deux fois lors de discussions spécifiques entre son père et d'autres nobles de Lüh mais rien ne lui signifiait réellement à qui il avait à faire. Sceptique sans être pour autant pessimiste, il préféra faire bonne figure auprès du potentiel acheteur, se jurant de dialoguer avec lui sur le trajet pour s'assurer de ses intentions. D'une voix chaleureuse et plutôt commerciale, il répondit à l'homme aux yeux saphir sans laisser transparaître son âge réel.

"Bien sûr messire, il est à une dizaine de minutes d'ici, dans les quartiers nobles. Si vous voulez bien me suivre..."

Une petite courbette et un geste de la main servirent à guider le fameux Mathieux jusque dans les ruelles perpendiculaires à l'allée principale de la capitale. La foule moins dense leur permettant de mieux s'entendre, c'est ici que le jeune aventurier décida de questionner discrètement son homologue brun.

"C'est pas tous les jours qu'on croise quelqu'un intéressé par un cheval, je suis bien curieux de savoir d'où vous vient cette idée d'en acquérir un !"

Il restait sincère jusqu'au bout. Animé par la curiosité, il espérait établir un vrai lien de confiance avec cet homme s'il venait à lui céder son bon Marcheval.

La réponse attisa la curiosité du jeune homme qui se tourna avec un air inquisiteur vers son interlocuteur. Il n'avait pas l'air d'être de ces nobles excentriques capables de dépenser leur argent comme s'il poussait dans les champs mais il semblait pourtant évoquer avec un calme naturel qu'il désirait s'approprier la bête quoi qu'elle fut tant qu'il s'agissait d'un cheval. Serait-il un collectionneur, une de ces fortunes silencieuses pour ceux ne s'intéressant pas à leur domaine favoris ? La curiosité de Simon grandissait de seconde en seconde, désireux de comprendre cet individu si atypique ou du moins de s'assurer qu'il était bien ce qu'il disait être.

"Ouahou... Vous semblez vraiment aimer les chevaux... Vous en avez déjà beaucoup ? On m'a dit qu'ils étaient plus compliqués à entretenir que les variquans à la longue, j'ai peur que la bête ne soit au final pas si heureuse à mes côtés."

La voix était douce et le regard intéressé, bien qu'il soit en train de faire affaire, son naturel entrain à découvrir les gens et les choses du monde revenait sans qu'il ne puisse se retenir.
Tournant dans une nouvelle ruelle, il attendit la réponse de Mathieux avec intérêt et attention.

Simon mit son index sous son menton en signe de réflexion tandis qu'il rétrospectait ses propres soins auprès du brave Marcheval. Le palefrenier lui avait fait passer du temps sur les crins mais l'activité qui l'avait le plus rebuté avait été toute autre. Grimaçant en y repensant, il répondit avec un dégoût amusé.

"Et leur décrotter les pieds minutieusement aussi ! Par contre c'est vrai qu'ils ont très bon caractères ! Ca a juste été difficile de rentrer dans Lüh avec ces goinfres... Impossible de les retenir, à la moindre touffe d'herbe c'était périlleux et j'étais complètement crevé... J'ai du rentrer à pieds et laisser Minarîa le ramener après. Je m'attendais pas à tomber sur des bêtes si têtues !"

Il avait failli s'écrouler à l'époque et s'était évanoui d'épuisement en arrivant chez lui, dormant pendant deux jours sans pause. Aujourd'hui, l'anecdote le faisait rire et plaisanter sans aucune gène. Revenant sur ce que le fameux Mathieux lui avait dit avant cela, il garda son immense sourire amusé en reprenant la parole.

"Vous allez avoir beaucoup de travail avec un élevage ! C'est là bas que vous comptez emmener Marcheval ? C'est une belle bête mais si je ne me trompe pas, les Rochefort sont une famille très proche du prince ! J'espère qu'il sera à la hauteur... Je ne suis pas son premier propriétaire, je l'ai récupéré quand le précédent est... Quand il nous a quitté. Il sait tenir un cavalier sur son dos et obéir aux ordres de base, n'a pas peur des armes et du combat mais il n'est pas vraiment éduqué pour le dressage pur... Pour les nobles, il y aurait beaucoup à revoir !"

Les bandits à qui ils pris les montures n'avaient pas été évoqués, autant ne pas révéler la vraie provenance de l'animal si c'était possible ou il devrait sans doute baisser le prix de la bête. Avouer par contre que son dressage n'était pas optimal serait vite révélé...

Les dires de l'homme aux cheveux le rassurèrent un peu. Ses réponses semblaient naturelles et spontanées, sa logique tenait la route et il semblait vraiment vouloir Marcheval pour une raison généreuse. Constatant donc la dure réalité de la solitude qu'allait vivre le fameux Cecil après tout ce remue ménage, Simon semblait plus enclin à discuter d'une vente à l'amiable. Si l'éleveur côtoyait tant de ces créatures, il n'aurait sans aucun doute nulle difficulté à s'occuper correctement de l'alezan gourmand.

"J'espère que les deux destriers s'entendront bien ! Je sais qu'il côtoyait d'autres cheveux il y a plusieurs mois de ça mais il est plutôt seul depuis plusieurs mois, depuis que je l'ai récupéré... On ne va pas tarder à arriver. Vous désirez qu'on s'arrête pour se désaltérer entre temps ou je vous conduit directement à l'écurie ?"

Il arrivèrent à un carrefour où le jeune noble ralentit l'allure le temps d'obtenir une réponse. Tout droit ils arriveraient devant les grandes portes de la demeure De Camina. S'ils désiraient en revanche rejoindre les écuries personnelles, le chemin extérieur leur ferai prendre la route de gauche, leur évitant les détours internes au manoir.

C'était vraiment une bonne personne ou un excellent comédien. Simon croyait de moins en moins en cette deuxième possibilité et se mit à sourire avec affection en écoutant le brun parler des couchers difficiles de son animal. Poursuivant tout droit pour offrir de quoi boire à son client et invité, il finit par sonner la cloche du jardin de sa demeure en annonçant qu'il n'était pas seul afin que les fidèles domestiques du propriétaire puisse faire correctement leur devoir.
La cour n'était pas énorme, pas plus de dix mètres séparaient le grillage de la véritable porte d'entrée et il n'eut pas besoin d'ouvrir lui même puisqu'un employé le fit lorsqu'il arriva sur le pallier, saluant le jeune maître et son obligé. Simon prit alors la parole d'un ton à la fois très guindé et relâché, comme il en était coutume depuis son plus jeune âge envers les deux amis et serviteurs de sa famille.

"Messire Mathieux St-Pierre vient pour discuter d'une transaction concernant mes biens personnels."

Laissant la place à l'éleveur pour qu'il puisse rentrer sans encombre, il attendit que leurs regards se croisent pour continuer.

"Désirez-vous boire quelque chose de particulier ?"

Attendant une réponse, il glissa ensuite sa propre demande au gouvernant. Mathieux pouvait demander ce qu'il voulait, après tout, c'était le devoir des nobles que de servir leurs invités sans qu'ils n'aient à se soucier de la commande. Les placards et caves du domaine foisonnaient de boissons froides ou chaudes innommables qui n'attendaient qu'à être réclamés.

Professionnel, le serviteur acquiesça poliment à la demande de l'invité, lui proposant sans hésiter un jus de raphanos fraîchement pressé. Connu pour être le meilleur nectar en boisson, toutes les classes sociales s'arrachaient les fruits frais afin de se régaler à n'importe quel moment de la journée.
De son côté, Simon proposa à son client de le suivre jusqu'au petit salon de la demeure où résidaient deux canapés de taille moyenne et trois fauteuils assortis aux couleurs pastel. L'armature en bois verni était recouverte d'un tissus matelassé lilas se mariant avec les rideaux verts rappelant un jardin de lavande florissant.
S'installant sur un des canapés, le jeune habitant de la demeure attendit que le loyal travailleur revienne avec les collations. D'une voix amicale, il intima à l'éleveur de prendre place où bon lui semblait.

"Pas la peine de se déchausser, on va repartir bientôt. Installez vous en attendant, mettez vous à l'aise !"

Enlevant alors sa cape pour la poser sur l'accoudoir à sa gauche, il ne fallut pas trois minutes pour revoir l'habile majordome porter le plateau comportant : un verre contenant le jus de raphanos et deux glaçons ainsi qu'une tasse en porcelaine où émanait une buée aux relents de rondelette, en plus des deux boissons se trouvait une petite panière de madeleines et de rayons de miel frais.
Se réjouissant de la collation, Simon attendit que son thé infuse avec quelques étoiles dans les yeux, oubliant presque la présence de Mathieux dans la pièce.

Un doux silence s'était créé pendant que les deux hommes profitaient des collations mises à leur disposition. Hochant poliment la tête à l'approbation de son client, Simon attendit qu'il se serve pour prendre à son tour une madeleine dans la petite panière. Elles étaient fraîches du matin et le blond dégustait sans retenue les pâtisseries qui lui graissaient le bout des doigts. Soufflant ensuite sur la tasse de thé de rondelette, il essaya de faire la conversation tant bien que mal, peu à l'aise avec les mondanités de ce genre. Après tout, c'était la première fois qu'il était amené à guider une discussion sans le soutien d'un membre de sa famille pour combler ses lacunes.

"Donc heuuu... Comme ça, vous travaillez dans la noblesse..? Vous travaillez loin d'ici ?"

Ne sachant pas du tout sur quel pied danser, il préféra rester sur le confortable sujet de l'équitation, passion de son obligé. Misant sur l'aspect logistique, il essaya d'avoir quelques informations utiles sur le trajet à faire avec le brave mais gourmand Marcheval dans la fastidieuse et festoyante ville de Lüh. Dans un coin de sa tête, Simon nota de proposer d'effectuer la transaction finale quelques jours après le festival afin de ne pas subir la foule avec un animal peu habitué.

Tout en soufflant sur le liquide encore chaud qui tournoyait dans sa tasse, les réflexions pullulaient dans l'esprit fertile du plus jeune des interlocuteurs. L'homme avait l'air honnête et généreux en plus de la passion qui accompagnait chacune de ses paroles ; s'il s'agissait d'un arnaqueur, Simon ne pouvait le démasquer pour le moment. Le seul moyen de s'assurer de sa bonne volonté serait donc de lui faire confiance ? Aussi contradictoire que cela puisse paraître, le plan semblait tenir la route : confier Marcheval à Mathieux puis lui rendre visite fréquemment afin de s'assurer des soins apportés à la bête. Il y avait très peu de chances qu'il soit au final une mauvaise personne et l'aventurier en avait conscience ; il s'en voudrait cependant trop d'avoir été négligent s'il arrivait malheur à la monture par la suite. Qui sait, peut être même qu'avec la confiance grandissante et le lien qu'ils tisseraient, il pourrait confier d'autres montures égarées à l'éleveur par la suite ?

"Vous êtes vraiment passionné, hein... Je trouve ça admirable."

Un sourire des plus tendres élargit les traits du petit marchand. Se repaissant de quelques madeleines qui remplirent ses joues comme un dulcius gourmand, il fit passer le tour avec une gorgée de thé, ne sachant déjà plus quoi dire. Finir cette collation devenait pour lui un véritable objectif afin de s'occuper des affaires sérieuses aussi efficacement que possible.
Dans son esprit, il commençait déjà à penser à la suite : le prix était certes un sujet inévitable mais il fallait également évaluer l'âge de la bête, son état de santé, ses facultés et sans doute d'autres choses auxquelles il ne pensait pas. Sentant qu'il ignorait tout de ce domaine, il espéra silencieusement que l'acheteur lui offre un prix fixe et honnête sans poser trop de questions...

Taisant qu'il ne ressentait pas autant ce genre de sentiments à l'égard spécifique des chevaux, le silence sembla annoncer une prolongation. Finalement, la situation sembla se dénouer naturellement sous la conversation agréable que l'autre guidait désormais - au plus grand plaisir du fils De Camina qui finissait ses madeleines en manquant de s'étouffer, entraîné par les éclats de rire du brun. L'ambiance bon-enfant avait eu raison de ses réserves et après avoir avalé sa bouillie de madeleines, il se laissa lui aussi porter par une euphorie contagieuse.
Egalement sauvé par la demande suivante, consistant à aller voir le sujet de leur rencontre, Simon se redressa en transformant le rire en enthousiasme. Reprenant sa cape sur l'accoudoir du canapé, il fut prêt aussitôt que son interlocuteur eut fini sa phrase, bondissant dans la direction à prendre et annonçant d'une voix vive la suite des événements.

"Avec plaisir, messire ! Suivez moi par ici."

Allongeant sa foulée autant que son petit corps lui permettait, il dépassa Mathieux vers un corridor dans lequel il ralentit légèrement l'allure pour reprendre une cadence plus posée. La façade ouest de la villa semblait être mitoyenne à ce fameux corridor qui menait vers les possessions extérieures de la famille. Ils arrivèrent donc sans mal après quelques courtes minutes à traverser le sentier externe qui menait jusqu'à l'écurie ainsi qu'à l'armurerie personnelles du comte De Camina.
Le bâtiment qui les concernait était clairement conçu pour des variquans même si Serindë y avait également élu domicile depuis son arrivée. L'invocation Centaure partageait l'espace avec Marcheval dans deux box aux dimensions à la fois trop larges et peu adaptées.

La fille de Terra n'était pas à la maison car elle fêtait à sa façon la gloire de Terra dans les rues de la capitale ; l'alezan, quant à lui, sortit sa tête comme il put par l'ouverture du box afin de voir les nouveaux arrivants, affichant sa liste en tête en guise de bienvenue.
Bougeant les lèvres avec l'intention de réclamer une friandise, cou tendu en avant, il n'attendit pas que Simon arrive à sa hauteur pour faire son cirque sous le regard résigné de son propriétaire.

"Et bien... Voilà Marcheval... Pas besoin de spécifier qu'il est gourmand je pense..."

Le jeune homme présenta sa main vide au goinfre qui la chatouilla avec deux babines intéressées. Une fois assuré qu'il n'y avait rien à manger, il souffla de ses naseaux blanchis et se rétracta en piétinant légèrement le sol.
Une fois la poignée libre, Simon l'ouvrit calmement afin que son acheteur puisse évaluer calmement la marchandise.

Objectivement, l'animal semblait jeune, à peine débourré bien qu'habitué aux combats comme les événements passés l'avaient démontré. Il avait une chaussette à la jambe postérieure gauche et ne présentait aucune blessure visible. Les crins étaient coupés de façon à ne pas tenir trop chaud dans le désert, laissant pendre une queue dont le crin semblait à peine recouvrir la chair.
De taille moyenne, il semblait surtout se démarquer par un léger trou dans le pelage au niveau de la croupe. Une ancienne cicatrice laissait difficilement le poil renaître, laissant voir la marque d'un potentiel fer rougi appliqué autrefois pour le marquer.
Bien nourri depuis son arrivée à Lüh, l'animal n'était plus en sous-poids et sa musculature autrefois saillante semblait aujourd'hui plus naturelle. Malheureusement, celle-ci finirait par décroître s'il manquait d'entrainement dans les mois à venir.

Nullement hostile dans le caractère, l'animal était pourtant prudent et regardait le nouveau venu d'un oeil curieux. Simon laissa alors les choses se faire naturellement entre les peut-être futurs compagnons.

Simon n'était pas un excellent marchand. C'était un euphémisme. Il n'avait quasiment aucune idée des prix du marché des chevaux et s'il s'attendait à un prix pour un cheval, il ne s'attendait pas à avoisiner plus de cinq cent tsuris. Les milles offerts par Mathieux le décontenancèrent légèrement. C'était une grosse somme, pour un animal gratuit obtenu en battant des bandits. Ses yeux s'écarquillèrent malgré lui légèrement et un marchand véreux aurait pu largement profiter de cette aubaine pour tenter de marchander grassement.
Crédule était le jeune aventurier mais bête ne le qualifiait pas du tout. Son père lui avait déjà expliqué vaguement qu'il fallait essayer de toujours monter légèrement le prix par rapport à ce qui était proposé de base pendant que l'autre essayait de faire l'inverse en essayant de débourser le moins possible...

A Havrejaune, c'était une règle tacite fondamentale à maîtriser pour ne pas de faire allègrement dépouiller. Si Marcheval était une marchandise, il serait sûrement considéré comme "douteuse" par les concurrents : bâtard, sans pedigree, peu éduqué, mal ferré, sans compter que Simon cherchait à s'en débarrasser, le prix pourrait baisser considérablement ! Surtout que le pauvre blondinet ignorait tout des arguments mélioratifs d'un tel produit... Sa bonne santé, sa robe, son allure, son habitude aux températures désertiques, tout ceci lui échappait sur le moment.

Faisant mine de réfléchir pour se donner un air professionnel, il tendit alors la main à l'éleveur en acceptant le marché d'un entrain qui l'essayait de modérer.

"Mmmmh, Oui, cela me semble tout à fait correct. Vous souhaitez que l'on rédige un contrat de vente à l'amiable afin d'éviter les soucis ? Il y a une table et de quoi écrire dans la réserve, on peut faire ça tout de suite si vous voulez ! Et on écrira aussi la date où vous voulez accueillir notre ami commun ainsi que celle du paiement. Je crois que c'est tout ce qui est important pour ce genre de transaction..."

Il réfléchissait encore, heureux d'avoir eu une éducation soutenue. La scène aurait pu, dans le cas contraire, virer au cauchemar. De même avec la gentillesse et l'honnêteté de son client, paramètres importants pour que tout se déroule bien. Intérieurement, Simon remercia sa destinée de le guider toujours dans le bon sens.

Tout se passait pour le mieux jusque là. Il ne pensait pas qu'il serait si aisé d'établir un contrat équitable pour une monture avec quelqu'un de conciliant à son âge. Sans doute était-ce un avantage face à une personne passionnée et presque aussi jeune que lui ? Dans tous les cas, tout allait bien jusqu'à la dernière phrase de l'éleveur. La voix légèrement plus lente, hésitante, il répondit sans être très sûr de l'attitude à adopter.

"Hé bien... Je pensais plutôt vous le céder demain au plus tôt... Le festival va durer la nuit durant et j'avais prévu de me rendre à la procession... Sans compter le temps de la rédaction du contrat... Je suis vraiment navré mais je pense qu'il me sera vraiment difficile de vous le céder en mains propres ce soir..."

Les traits tirés par la gène, il resta attentif aux réactions de son interlocuteur. Il ne souhaitait définitivement pas risquer la réussite de la transaction à cause d'un soucis d'emploi du temps après tout.