Rêves d'aventures

27/01/2018

Neuvième jour du printemps, midi
RP précédent (pour Valion)

Plutôt satisfait de cette nouvelle perspective de carrière, l'ex brigadier-chef pénétra dans la bâtisse éprouvée avec un air plutôt guilleret. Bien décidé à savourer cette opportunité et à oublier ses travers de la veille, il commanda une choppe au tavernier et s'installa dans un coin, un peu en retrait. Il comptait y noyer joyeusement le masque blanc qui ne daignait pas quitter le rivage de ses pensées.

Son estomac n'ayant manifesté aucun intérêt pour l'instant, il en profita pour plonger la main dans son sac afin de préparer son plan de route. Au contact froid des pierres circulaires magiques, il eut un rictus blasé. Il avait acheté ça pour rien... Chassant ce constat négatif d'un signe de tête indicible, il avala une lampée du liquide ambré qu'on venait de lui servir. Avec un râle guttural un peu trop sonore pour se plier aux convenances, il sortit sa carte d'Arcane. La belle épée cintrée à son côté était prête pour de nouvelles aventures. Plus il l'utilisait, plus il trouvait que sa lance artisanale avait besoin d'un coup de neuf. Il faudrait qu'il y remédie après avoir alourdi sa bourse de tsuris.

Le regard enjoué et le sourire rêveur, Valion contempla les nombreuses possibilités qui s'offraient à lui. Sa destination : Sirk. Après, il était libre de s'organiser comme il le souhaitait. Dans l'idée, il pouvait toujours chercher des compagnons de route. Il fallait toutefois inclure sa jument dans l'équation. S'il s'arrêtait à Trare en suivant, il espérait que le voyage serait moins mouvementé que le soir de la procession. De là, il pourrait certainement payer sa place dans un convoi marchand. Ou s'engager auprès d'un groupe de chasses, d'une patrouille. Alors même qu'il réfléchissait au chemin le plus rentable, il attrapa machinalement l'une des pierres qu'il fit tourner entre ses doigts.

▼ Succès ▼▲ Succès ▲

23/03/2018

Un nouveau contrat était apparu depuis peu au panneau d’affichage de la taverne. Quelque chose d’assez flou. Une créature indéterminée à chasser pour ce qui semblait être un noble voulant reconstruire un village. Il était risqué d’accepter ce genre de contrats, mais je ne pouvais faire autrement que d’être attiré par la dernière phrase écrite sur le parchemin. “J’assurerai, à ceux se montrant à la hauteur, fortune et renommée au travers de l'île entière.” Tout ce dont je pouvais rêver. Tout ce dont n’importe qui pourrait rêver, en y réfléchissant, mais ma situation me forçait à chercher de l’argent à tout prix. Assez pour pouvoir me mouvoir sans trop de soucis. Assez pour pouvoir aller chercher un compagnon de chasse dans un des quatre Temples. Mais en attendant, qu’importe le contrat, il me fallait surtout des compagnons de route. A défaut d’avoir une invocation il fallait bien pouvoir réussir à chasser quelque chose. Je me suis alors assis à une table, observant le reste de la taverne, attendant que quelqu’un vienne s’intéresser au panneau d’affichage. Je n’avais rien commandé à boire ou à manger, mon but était d’économiser de l’argent, pas d’en dépenser, j’espérais alors que quelqu’un daigne bien se montrer avant que je ne me fasse remarquer, voire expulser.

Cet endroit était toujours aussi bruyant. Entre ceux qui festoyaient et ceux qui se battaient, impossible de vraiment faire attention à qui que ce soit qui ne sorte pas de l’ordinaire. Je suis resté plusieurs minutes à scruter la salle en quête de quelqu’un dont l’alcool n’aurait pas complètement démuni de ses fonctions cérébrales. C’est là que j’ai aperçu un homme assis, seul, étudiant une carte dépliée. Habillé comme il l’était, il ne pouvait s’agir que d’un aventurier ou d’un pirate. Sans cache-oeil ni jambe de bois, je me suis convaincu qu’il s’agissait d’un aventurier. Je me suis alors avancé vers lui d’un pas décidé, il fallait bien commencer quelque part. Quand je suis arrivé à son niveau, je me suis arrêté en face de lui, penché sur la table en m’appuyant dessus de ma main droite. Le but était de se faire remarquer, sans pour autant paraître trop intrusif. Un simple aventurier parlant à un autre dans une taverne.

“Vous partez à l’aventure ?”

J’imagine que mon introduction aurait été bien plus conviviale si j’avais eu une chope à la main, mais il fallait bien improviser un peu. Ce n’est qu’après avoir parlé que je me suis penché un peu plus en détail sur le physique de l’aventurier. Grand, musclé, barbu, mon exact inverse. Le peu de confiance que j’avais pu avoir en me dirigeant vers lui était sur le point de me quitter. Admettons qu’il parte bien de la ville et qu’il chercherait un compagnon, pourquoi diable prendrait-il un gringalet comme moi ? C’était une question à régler plus tard…

▼ Succès ▼▲ Succès ▲

27/01/2018

Plongé dans ses calculs et la mise en oeuvre de son projet, Valion était loin de porter attention aux autres clients. Cette concentration en tout point sérieuse n'était pas sans rappeler son quotidien à la Milice. Mais cette fois, la passion guidait son esprit, et non l'obligation nommée devoir. Alors qu'il arrivait à une conclusion plutôt rentable, une silhouette se dessina dans son champ de vision.

Rangeant immédiatement la pierre magique dans son petit sac, il leva les yeux pour tomber sur un visage un peu rond, qui semblait avec peine sortir de l'adolescence. Le fils Lameblanche leva un sourcil interrogateur. L'assurance suggérée par la position de ce jeune inconnu tranchait parfaitement avec sa constitution. Puisqu'il avait déjà été blessé par des hommes et femmes bien plus fins que lui, Valion se garda bien de le juger et de le dénigrer sur ce critère. Au contraire, une lueur intriguée anima ses iris bleutés et il le fixa quelques secondes avant de répondre avec sa bienveillance naturelle :

« En effet. C'est la carte qui m'a dénoncé n'est-ce pas ? »

Ses traits s'étirèrent sous l'amusement, sa bonne humeur facilitant l'échange. Qu'est-ce qui pouvait bien avoir amené le garçon à son encontre ? Était-ce le fait d'avoir choisi de s'isoler dans un lieu aussi bruyant que bondé ? Un bruit auquel il restait le plus souvent insensible, ayant grandi au milieu de filles et évolué avec des soldats. Valion décala ses affaires en invitant l'arrivant à s'installer d'un signe de tête. S'interrogeant sur son âge, côté protecteur et soucieux oblige, il étoffa son propos, ravi de pouvoir partager son prochain voyage avec quelqu'un qui semblait s'y intéresser.

« Je me rends à Sirk. Il y a une famille noble qui semble avoir besoin de chasseurs. »

L'affiche étant placardée un peu partout en ville, il était fort possible que son vis-à-vis l'ait déjà aperçue, s'il s'intéressait aux nombreuses requêtes de la capitale. Ou du moins s'il cherchait à se faire un peu d'argent. L'ancien milicien prit le temps d'observer la silhouette qui lui faisait face. Elle ne semblait pas taillée par le rude quotidien des bas quartiers, à moins qu'il ne soit vraiment trop jeune pour avoir participé au gagne-pain de sa famille. Non, il y avait quelque chose dans son attitude un poil maladroite qui indiquait une maturité supérieure à la fraîche jeunesse. Dans son regard transperçait quelque chose de familier, mais il était incapable de creuser pour déterminer précisément quoi. Il demanda alors, non sans curiosité :

« Vous êtes également en quête d'aventure ? »

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23/03/2018

“La carte était l’indice le plus évident oui !”

Je m’étais assis et avait prononcé cette phrase avec un peu trop d’entrain que prévu, bien trop excité à l’idée d’avoir réussi à rendre l’aventurier assez curieux pour qu’il m’invite à m’asseoir. Tout se passait à merveille : il avait l’air gentil, ou en tout cas loin de m'être hostile, et acceptait de partager ses plans avec moi. Et c’était un chasseur ! Mieux encore qu’un simple aventurier ! Comment rester impassible face à tout ça ? Il le fallait bien pourtant, si je voulais garder un minimum de crédibilité et ne pas passer pour un simple jeune trop inexpérimenté… Lorsqu’il me demanda si j’étais moi aussi en quête d’aventures, je toussotai légèrement pour apporter un peu plus d’impact à ma voix, d’ordinaire un peu trop fluette à mon goût.

“J’ai quelques projets à l’extérieur de la capitale oui… Je peux ?” dis-je en glissant doucement la carte vers moi sans vraiment attendre sa réponse. Je posai mon doigt sur Sirk, qui était malheureusement bien trop éloigné de n’importe quel temple. Mon visage perdit un peu de sa bonne humeur malgré moi. Oubliant que la carte ne m’appartenait pas le moins du monde, je laissai mon doigt glisser de Sirk jusqu’à Trare, village voisin du Temple de la Terre, le plus proche. Puis à partir de là mon doigt continua son chemin vers Al-Hazred, Heilan et Kelder. Une fois fait, je retirai mon doigt de la carte pour qu’il vienne couvrir ma bouche en même temps que le reste de ma main. Tous les temples étaient bordés de leur village respectifs. Si j’en rejoignais un, peut-être allai-je pouvoir prendre part à un convoi de transport pour en atteindre un autre ? Un sourire se dessina a nouveau sur mon visage. J’avais enfin un plan pour partir d’ici ! Me rendant soudainement compte que je venais d’éluder totalement l’aventurier qui m’avait offert un peu de sa sympathie, je m’empressai de le réintégrer dans mon monde.

“Votre route ne passerait pas par Trare par hasard ? On pourrait peut-être faire un bout de chemin ensembles, entre chasseurs.”

Ce n’était pas vraiment la meilleure des informations à partager. Je ne me considérais pas réellement encore comme un vrai chasseur, et mon équipement était assez primaire, mais au moins cela allait peut-être attirer sa curiosité et possiblement jouer en ma faveur. Ou alors bien au contraire cela pouvait instaurer une relation conflictuelle entre concurrents. Il fallait sincèrement que j’apprenne à réfléchir avant de parler, mais l’appel de l’aventure avait tendance à me jouer des tours…

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27/01/2018

L'ancien soldat sourit devant l'excitation de son vis-à-vis. Ce dernier s'empressa de saisir sa carte d'Arcane. Ce manque de principe ne le dérangeait pas tant que ça, surtout à la vue de cette lueur passionnée qui animait les prunelles du jeune homme. À vrai dire, avec les événements inquiétants de la procession et du festival, voir quelqu'un d'aussi enthousiaste lui allégeait l'esprit.

Il ne releva pas le ton grave que se donnait le garçon mais haussa un sourcil à la fois amusé et curieux. Ce comportement lui rappelait certaines recrues à leur arrivée au Poste, à rouler des muscles en espérant se faire une place. Intrigué, Valion suivit des yeux les routes tracées par le doigt de l'aventurier en herbe. Il cherchait donc à rejoindre les Temples ? Cette fois, ces sourcils se froncèrent. Certes il n'était pas en position de lui conseiller quoi que ce soit, mais il n'aimait pas qu'un garçon ayant toute sa vie devant lui aille la risquer pour s'afficher auprès d'un demi-dieu. Bien sûr, ses raisons étaient encore inconnues et il allait se garder de le juger, pour l'instant.

Il releva son regard sur le jeune garçon à son interpellation, et ne put masquer son étonnement face à l'affirmation de son métier. Bon... c'était peut-être possible après tout, s'il venait d'une grande famille de chasseurs. Mais sa constitution et le fait qu'il cherche un enfant divin laissait quand même sous-entendre le contraire. Il répondit avec plus de sérieux et de neutralité que précédemment.

« Oui, je compte passer par Trare. »

Partagé entre l'envie de lui déconseiller pareille entreprise et l'impression de se revoir à sa place, Valion resta silencieux plusieurs secondes, le temps de la décision. Et puisque le frêle chasseur souhaitait l'impliquer dans son aventure, il ne pouvait pas se raisonner en prétextant que ça n'était pas ses affaires.

« Donc vous êtes chasseur ? J'aurais aimé commencé à votre âge. Et quel est-il d'ailleurs, si je puis me permettre ? »

Son visage fermé passerait peut-être pour une preuve de méfiance, là où il souhaitait simplement confronter le garçon à la réalité, et mesurer sa trempe. Il ne pouvait tout bonnement pas le renvoyer bouler, alors même que lui s'engageait dans un voyage aussi incertain que dangereux, avec des moyens minimes. Il sirota sa bière en l'écoutant.

Il y avait autre chose qui le chiffonnait. D'ordinaire, lorsqu'on mettait les pieds dans une taverne, c'était pour y manger et/ou y boire. Or le garçon n'avait ni pinte ni assiette, et n'avait rien commandé une fois à table. Valion le laissa donc finir avant de demander, voyant passer une serveuse les mains remplies de choppes.

« Vous avez mangé ? »

Sans attendre non plus sa réponse, il fit signe à la jeune femme de s'approcher et lui commanda une bière et deux assiettes. Le garçon pourrait toujours corriger sa commande s'il s'était déjà rempli la panse.

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23/03/2018

Le chasseur venait de me confirmer qu’il passerait par Trare, sans pour autant relever ma proposition de partager le chemin. Son attitude envers moi semblait avoir légèrement changé. Son visage était un peu plus sérieux, sans être hostile. Peut-être avait-il finalement considéré mon physique maintenant qu’il s’était imaginé faire de la route avec moi. Il me demanda mon âge et chercha à confirmer mes précédentes paroles. J’eut envie de mentir pour me donner quelques années supplémentaires, mais était-ce bien raisonnable ? Rien chez moi ne permettait de me vieillir plus que je ne l’étais, bien au contraire, et un mensonge n’aiderait pas le chasseur à me prendre au sérieux. De plus il venait de dire qu’il aurait aimé commencer à mon âge, c’était plutôt positif. Alors, sans aggraver ma voix, je répondit :

“J’ai dix-sept ans. Et je suis bien chasseur, depuis peu. Je m’appelle Nathan, au fait.”
Je laissai une petite pause avant de reprendre, fixant mon interlocuteur du regard tout en gardant un sourire compréhensif sur mon visage : “Je sais que je n’en ai pas l’air. Je sais que je ne tiendrai pas longtemps dehors tout seul. Alors en attendant, j’essaie de m’entourer de compagnons et de m’améliorer, jusqu’au jour prochain où j’irai libérer un demi-dieu.”
Le chasseur m’avait vu utiliser sa carte, il avait sûrement dû deviner mes intentions, il était inutile de les cacher. Il me demanda ensuite si j’avais mangé, à quoi je répondis non de la tête avant qu’il ne commande une bière et deux assiettes. Un repas était une bonne occasion de faire connaissance et de le convaincre de me laisser l’accompagner, même si je n’avais pas prévu de dépenser quoi que ce soit ici. Je pouvais encore me le permettre, bien que la taille de ma bourse réduisait à vue d’oeil. En attendant les assiettes, je tentai de dévier la conversation vers le chasseur, ne voulant pas parler de moi plus longtemps de peur de trop révéler mes faiblesses :

“Vous allez à Sirk alors ? J’ai vu l’affiche sur le tableau, ça a l’air plutôt vague comme requête. C’est plutôt la fortune ou bien la renommée promise qui vous attire ?”
C’était une question assez personnelle, mais le meilleur moyen de changer de sujet. A son tour de se dévoiler un peu…

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27/01/2018

Sa bière en main, Valion écouta calmement l'inconnu se présenter en bonne et due forme. Il hocha la tête de temps à autre, appréciant la clairvoyance de ce jeune aventurier autant que sa volonté. Un écho à sa propre aspiration qui prenait de plus en plus d'ampleur dans son esprit.

Ce Nathan n'était pas un inconscient, voilà qui était rassurant, et faisait preuve d'une bonne éducation. Il sourit en buvant une nouvelle gorgée, ressassant les paroles du garçon en l'observant distraitement. Il s'avérat être un compagnon de table qui posait décidément beaucoup de questions. Mais la perspective d'une aventure avait de quoi égailler la curiosité de chacun, aussi Valion n'en fit pas grand cas.

« Ni l'un ni l'autre à vrai dire. Enfin, je ne cracherai certainement pas sur la paie. »

Il retrouva à nouveau un petit sourire. Ne sachant rarement comment procéder sans être honnête, Valion se redressa sur sa chaise et se pencha en avant, le coude posé sur le meuble de bois. Il se montra déjà plus détendu, content de pouvoir échanger sur un tel sujet avec quelqu'un de visiblement passionné.

« J'étais soldat jusqu'à il y a peu. Mais j'ai toujours voulu devenir chasseur. Cette famille des Katar qui cherche à consolider leur village est l'occasion idéale, même si la requête reste vague, je vous rejoins là-dessus. »

Puis il se recula sensiblement en haussant les épaules d'un air amusé.

« Je suppose que je le découvrirais une fois sur place. »

La serveuse apporta sa choppe au seul chasseur vraisemblablement présent. Valion rangea ses affaires en prévision de la suite, à raison puisque la jeune femme ne tarda guère à apporter deux assiettes au contenu encore fumant. De la viande de bibi à la sauce. Un bon repas en perspective.

« Et bien, vous devriez vous remplir la panse. Je ne sais pas quelles sont vos disponibilités, mais j'avais prévu de partir ce soir. Demain, au plus tard. »

Acquiesçant à sa réponse, l'ancien soldat réfléchit en silence sur l'organisation du voyage, avec cette nouvelle donne. Puis, satisfait, il leva sa choppe pour trinquer.

« Je m'appelle Valion. »

Il reporta ensuite son attention sur son assiette puis saisit les couverts à disposition. Jugeant le plat encore trop chaud pour être goûté, il leva le menton vers son futur compagnon de route, avec entrain.

« C'est plutôt vous qui avez des choses à m'apprendre en matière de chasse, finalement. »

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23/03/2018

Mon honnêteté semblait avoir fonctionné. Le chasseur paraissait légèrement plus détendu alors qu’il buvait sa bière en m’écoutant parler, lâchant même quelques sourires de temps en temps. Il me révéla alors avoir été soldat par le passé, avant de se réorienter vers une carrière de chasseur, comme il en rêvait. Cet étrange contrat était alors pour lui une façon de se jeter à l’eau. Je dois avouer avoir été surpris par son discours, j’aurais mis ma main au feu qu’il était déjà expérimenté dans l’art de la chasse, sûrement à cause de l’assurance qu’il dégageait. J’imagine que sa carrière de soldat avait dû laisser des marques similaires. Il n’avait cependant pas l’air bien inquiet par le manque d’informations de la requête des Katar.

Alors qu’il rangea ses affaires, la serveuse vint déposer deux assiettes de viande de bibi sur la table. L’odeur de la viande fumante me ramena quelques temps en arrière, assis confortablement dans la maison familiale du quartier noble à manger en famille. Tout ceci me paraissait déjà si loin, et pourtant je ne pouvais m’empêcher d’y penser à chaque bon repas. En partager un avec quelqu’un d’autre allait me faire le plus grand bien. J’allais prendre mes couverts lorsque l’ancien soldat m’annonça vouloir partir dans la soirée, m’invitant finalement implicitement au voyage en me disant de bien me rassasier. Mon regard se figea le temps d’une seconde de surprise sur le visage de mon interlocuteur avant de s’illuminer d’un sourire traduisant mon excitation.

“Je serai prêt dès ce soir !”

Il me fallait juste aller chercher mon équipement dans ma chambre de taverne, et j’étais prêt pour l’aventure. Trare n’était pas bien loin, mais c’était le début d’un projet plus grand encore qui était entrain de se mettre en marche. Le chasseur leva ensuite son verre en révélant son nom. M’étant déjà présenté, je me contenta de trinquer avec lui en disant, sourire aux lèvres :

“Enchanté !”

Une gorgée plus tard, je m’attaquais à mon plat, découpant un morceau de viande avant de souffler rapidement dessus et de le glisser dans ma bouche. Au même moment, Valion prononça une phrase qui me fit avaler trop vite mon morceau de viande trop chaud. Impossible de savoir s’il s’agissait de la conséquence de la honte de m’être étouffé au premier morceau de viande avalé ou à cause de la température de ce dernier, mais je pus bien sentir mon visage devenir instantanément cramoisi. Une gorgée et quelques toussotements plus tard, je répondis enfin :

“Je… Mon expérience n’est encore que très théorique. Mais je pense avoir dévoré tous les livres parlant de près ou de loin des chasseurs d’Arcane, alors j’imagine que ça peut aussi être utile ! Sûrement pas autant qu’une expérience de soldat cependant…”

Je ne retouchai pas mon assiette, laissant le temps à son contenu de refroidir un peu. Mon visage avait sûrement repris sa couleur initiale désormais.

“Vous gardez un bon souvenir de votre temps en tant que soldat ?” demandai-je alors. Il ne m’avait pas vraiment précisé s’il faisait partie de la milice ou de la Garde Dorée, mais j’aurais plutôt misé sur le premier. Vu la difficulté à rentrer dans la garde princière et le prestige qu’elle apporte, on ne la quittait pas si facilement pour devenir chasseur. J’imagine que par cette question, je voulais savoir si j’avais bien fait de défier la volonté de mon père. Vu mes performances à l’entraînement, si je ne m’étais pas enfui je me serai sûrement retrouvé engagé dans la milice, où l’on ne m’aurait sûrement pas confié grand chose de très glorieux à faire…

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27/01/2018

Plus que le fumet délicat émanant de son assiette, ce fut la joie de son futur compagnon de voyage qui éclaira son visage. Silam aurait eu la même réaction s'il lui avait proposé de se joindre à l'une de ses expéditions. C'était bien sûr hors de question, sa petite cousine étant, pour le coup, bien trop jeune pour partir sur les routes. Et en bon protecteur, il la découragerait clairement de s'engager comme chasseuse avant qu'elle atteigne la trentaine. Au moins.

Les toussotements de Nathan le firent relever la tête, un brin inquiet. Était-ce un morceau de viande qui peinait à descendre le long de sa trachée ou l'un de ses mots ? Il parla de son expérience théorique, tirée notamment des livres, une que Valion partageait. Le garçon ne lui laissa pas l'occasion de rebondir, ce à quoi il sourit, bien qu'il se serait gardé de lui faire remarquer le décalage avec ses précédents propos. Voilà qui confirmait toutefois ses premières impressions. Mais ce n'était pas un mal.

Alors... quel souvenir gardait-il de son quotidien de milicien, et plus récemment de brigadier-chef ? L'ancien soldat retint une grimace, et lâcha un éclat de rire désabusé. Il marmonna dans sa barbe guère assez longue pour couvrir entièrement sa voix.

« Question piège... »

Certes, il ne connaissait pas Nathan ni ses opinions politiques, philosophiques et compagnie. Cependant il ne se méfiait pas de lui. Son manque d'assurance dégageait quelque chose de familier qui, paradoxalement, le mettait à l'aise. Il semblait être un jeune homme raisonnable, et si ses compétences martiales n'étaient peut-être pas les plus intéressantes sur la brochette de voyageurs rassemblés ici, elles n'enlevaient pas l'intérêt et l'importance de son avis.

Puisque l'humeur était à la convivialité d'un repas, Valion se livra, avec quelques réserves naturelles bien sûr.

« Ce n'est pas ce que je m'étais imaginé, et ça n'a jamais été ce que j'espérais. Mais j'ai énormément appris. J'ai pu rencontrer des personnes très différentes et tissé plusieurs relations, avec de précieuses amitiés à la clé. Alors oui, j'en garde un bon souvenir. »

Sa déception sur le long terme ne devait pas entacher les bons moments passés au sein de la Milice. N'ayant, malgré cette note positive, pas envie de s'éterniser sur le sujet non plus, il préféra reprendre la conversation sur un ton plus chaleureux, et sur un terrain qu'ils maîtrisaient tous deux. Mais d'abord, une autre gorgée amère vint nettoyer son gosier. Et il reprit une bouchée pour savourer l'épaisse sauce de son plat avant de poursuivre.

« Donc, vous dites avoir lu pas mal d'ouvrages. J'en déduis que vous connaissez plutôt bien "Créatures fantastiques, l'incroyable bestiaire des terres d'Arcane" de Enardil ? »

Il posa la question sur un ton léger mais réellement curieux. Ce livre avait siégé de nombreuses années sur son chevet quand il était plus jeune. Est-ce que Nathan partageait vraiment les mêmes lectures ? Est-ce qu'il avait raté des parutions intéressantes depuis qu'il était entré au sein du corps militaire ?

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23/03/2018

Valion venait de me faire part de son avis un peu mitigé sur son expérience de soldat. Il était resté assez vague, bien sûr, mais en avait suffisamment dit pour me convaincre que j’avais fait le bon choix. Sa note positive ne l’était pas assez pour que je la retienne vraiment. J’aurais aimé en parler un peu plus en profondeur tout de même, mais l’autre sujet qu’il avait abordé en suivant me fit oublier toute pensée concernant la milice ou la Garde Dorée. Le livre qu’il venait de citer m’était bien évidemment très familier. Entendre son titre dans la bouche de quelqu’un d’autre que moi-même me fit bien plus plaisir que je ne l’aurais imaginé. Enfin quelqu’un qui semblait partager ma passion !

“Si je le connais ? J’en lisais des extraits tous les jours ! C’est ce livre qui m’a fait découvrir une passion pour l’exploration et la chasse !” dis-je avec entrain. Je me rappelais mes innombrables allers-retours à la bibliothèque pour pouvoir dévorer ce livre et d’autres du même genre, le tout en secret bien sûr. Je n’avais pas mis bien longtemps pour le lire en entier… Je suis même presque sûr que j’aurais pu citer des passages au mot près… Ce livre était l’un des premiers du genre qui m’avait autant accroché; grâce à lui j’avais pu en découvrir bien d’autres, tous plus intéressants les uns que les autres.

“Je rêve de pouvoir voir le plus de créatures possibles, toutes celles décrites par Enardil ont l’air si intrigantes ! Dangereuses, aussi… Mais pas autant que les fameuses créatures légendaires répertoriées dans “Légendes et mythes d’Arcane” de Taynor. Le Faiseur de Brumes, le Tréant, Zan… Je suis persuadé qu’ils existent ! Vu la dangerosité du monde, il est impossible que nous en connaissions toutes les créatures qui le peuplent…”

L’évocation de ces quelques livres m’avaient bien délié la langue… Qu’il était grisant d’en parler avec quelqu’un qui y portait un quelque intérêt ! Ça me rappelait un peu quand je lisais des passages à ma plus jeune soeur, qui était sûrement la seule à partager mon enthousiasme… Du moins avant qu’elle ne s’endorme en m’écoutant, l’esprit plein de rêves d’aventures. Ayant suffisamment parlé, je pris ma revanche sur le plat que j’avais en face de moi. Il avait suffisamment refroidi pour que je puisse y goûter sans m’étouffer cette fois. Partir en voyage avec cet aventurier s’annonçait de plus en plus intéressant…

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27/01/2018

La vague d'enthousiasme qui déferla sur ce repas surprit Valion un peu malgré lui. S'il penchait toucher juste et mettre l'aventurier en herbe plus à l'aise, il ne s'était pas attendu à ça. Il restait donc quelques jeunes qui s'intéressaient aux ouvrages fondamentaux sur le monde dans lequel ils vivaient. Il acquiesça mais dédia toute son attention au contenu de son assiette, tentant d'en percer visuellement l'épaisse sauce pour apercevoir le fond. Distraitement, il découpa puis attrapa en morceau de viande en répondant avec grand calme.

« Moi aussi. C'est un bon livre. »

Puis il s'interrompit, sa fourchette toujours en main, observant discrètement le garçon. Nathan était vraiment passionné par tout ça. Oui, lui aussi. Mais à sa différence, l'ancien soldat n'était pas habitué à montrer ses émotions, ni ses passions d'ailleurs. On l'avait souvent traité de rêveur. Alors il avait enterré ce qui gênait les autres sous le pragmatisme et le sérieux, fournissant constamment effort et travail pour qu'on ne puisse plus rien lui reprocher. Et il y était parvenu. Par les Quatre, encore un an ou deux et il serait probablement rentré dans la Garde Dorée.

Il pensait avoir fait les bons choix, ce qu'il fallait. Mais si on lui demandait si c'était à refaire, il ne serait pas certain de sa réponse. À voir cette tête châtain s'extasier de la sorte, sans crainte ni gêne, il avait peut-être raté quelque chose. Ou peut-être qu'il avait grandi plus vite. En tout cas, une chose restait certaine, il n'aurait toléré aucune autre présence que la sienne ce midi. Pas après s'être fait rebuté par sa sœur. Plus de jugement sur ses ambitions ou ses envies de voyage.

« Oui, tu as raison. Mm- ça ne te dérange pas si on se tutoie ? »

Avalant un autre bout de viande tendre et épicé, il s'essuya la bouche d'un revers de manche. Ce point commun révélait le jeune homme sous une nouvelle lueur, encore. Il songea à Ambre également, une créature dont il aimerait particulièrement prouver l'existence à une jeune fille de ses souvenirs. Cela pourrait constituer un début de réponse à la question qu'elle lui avait récemment posé.

Prenant de plus en plus plaisir dans cet échange, Valion sortit un petit carnet de son sac magique et le posa devant l'assiette de Nathan pour l'inciter -s'il le désirait, à regarder.

« Ce n'est pas grand chose. Mais j'ai déjà commencé à consigner les quelques rencontres que j'ai faites. »

Actuellement, il n'y avait trace que de quatre bestioles : Agnosaure, Opale, Jaggar et Émeraude. Valion ambitionnait de le remplir bien plus vite, maintenant qu'il prenait les routes.

« D'ailleurs, en parlant de Zan, j'étais présent au Festival de Terra, à Trare. Je suppose que tu as entendu la rumeur. Zan serait plus qu'une légende. Peux-tu imaginer si on arrivait à prouver son existence ? »

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23/03/2018

La conversation semblait avoir définitivement pris le chemin de la chasse. Valion semblait être d’accord avec mes propos, sans pour autant partager mon enthousiasme avec autant d’expression que moi. Lorsqu’il me proposa de passer au tutoiement, je j’acquiesçai d’un signe de tête et d’un sourire, heureux d’avoir réussi à passer à l’étape suivante avec ce nouveau compagnon de route. Rapidement après, il posa un carnet devant mon assiette, m’invitant clairement à l’ouvrir pour y découvrir ses notes de chasseur. La vue d’un tel ouvrage, sans même savoir précisément ce qu’il y avait dedans, fit ressortir les étoiles de mes yeux. J’avais l’impression de commencer à vivre la vie que je rêvais de vivre il n’y avait encore que quelques semaines. Un authentique chasseur me proposait de jeter un oeil à ses travaux. C’était encore mieux que de lire les livres de Taynor, d’Enardil ou de n’importe quel autre chasseur que je n’avais pas la chance de connaître directement.

Je poussai mon assiette un instant pour ouvrir le fameux carnet. Certains auraient pu dire qu’il n’était pas bien rempli, mais pour moi, c’était de l’or. Valion avait noté sa rencontre avec un Agnosaure, un Jaggar, un Emeraude et un Opale. Pour certains, il y racontait sa rencontre, comment les dits monstres s’étaient comportés, leurs faiblesses, leurs atouts. En y réfléchissant, c’était exactement le genre de travail que je voulais accomplir quand je me sis mis à rêver de chasse. Je n’aspirais pas nécessairement à tuer chaque monstre pour en ramener trophée, gloire et richesse, du moins pas en priorité. Je ne souhaitais que voir de mes yeux le plus de créatures possibles, les observer, les étudier. Il me fallait un carnet comme le sien.

“Merci infiniment de me laisser regarder votre… ton carnet. Je n’ai encore vu aucun de ces monstres de mes propres yeux, mais j’espère bien y remédier rapidement !”
J’en avais vu d’autres ceci dit. Un Sanza roux, par exemple. Ce dernier aurait une place bien réservée dans mon futur carnet. Avec une mention spéciale écrite en bas de page. Quelque chose comme “à tuer sans aucune hésitation”. Encore fallait-il que je puisse en affronter un sans m’évanouir au moindre coup de patte. Valion me sortit de mes pensées en mentionnant sa présence au festival de Terra, et donc la rumeur concernant l’apparition de Zan. J’avais évidemment entendu quelques clients de l’auberge en parler, mais je n’aurais pas pensé une seule seconde qu’il s’agissait de quelque chose de plus concret qu’une lubie de chasseur alcoolisé.

“Alors… On l’a vraiment entendu crier ? Tu l’as vraiment entendu ?” dis-je, les yeux écarquillés, reposant doucement le carnet sur la table entre Valion et moi. “Comment était son cri ? Et qu’est-ce qu’il faisait si loin des montagnes ? Tu as pu l’apercevoir ?”
Je marquai une pause, me rendant compte que je venais d’assaillir le chasseur de questions auxquelles il n’avait peut-être pas de réponses. “Pardon, c’est juste que… C’est si improbable… Toute ma vie j’ai rêvé de ces créatures légendaires que personne n’a jamais pu prouver l’existence. Si ne serait-ce que l’une d’entre elles existait… Disons que je ferais tout pour essayer de la trouver.”

Je repensai à la carte que je venais d’étudier. D’ici quelques jours les meilleurs chasseurs d’Arcane se mettraient sûrement à la recherche de Zan, pour pouvoir revenir fièrement parmi les leurs avec une griffe ou une dent, voire carrément sa tête. Une véritable course contre la montre allait être lancée, et sans invocation pour survivre dans les montagnes, il n’y avait aucune chance que j’y participe.

“La légende dit qu’il ferait une trentaine de mètres de long et d’envergure et qu’il aurait chassé le demi-dieu qui aurait créé les montagnes… Il faudrait être sacrément doué pour l’affronter… Surtout qu’il est aussi dit qu’il peut contrôler les crocs-rouges de la région.” Je mis une petite pause dans mes paroles, puis reculai contre le dos de ma chaise comme pour m’écarter physiquement de la possibilité de voir la créature légendaire un jour. Le regard fixé contre mon assiette à moitié vide, je prononçai d’un air penseur :
“J’imagine que je n’aurai aucune chance, invocation ou non.”

▼ Succès ▼▲ Succès ▲

27/01/2018

L'appétit avec lequel Nathan dévora son carnet des yeux lui fit extrêmement plaisir, même s'il ne le manifesta que par un sourire un peu large. Valion se contenta d'acquiescer quand le garçon lui offrit ses remerciements. Tant de passion en face lui donnait réellement envie de suivre les débuts de cet aventurier. Avec autant d'investissement, cela pouvait s'avérer prometteur.

Son excitation reprit visiblement le dessus dès que l'ancien soldat prononça le nom de Zan. Assailli de questions en tout genre, légitimes et déjà posées dans son esprit, il lâcha un petit éclat de rire sincère.

« Je comprends. Ce serait une sacrée découverte si son existence est avérée. »

Puis, il prit la peine de finir une autre bouchée avant de répondre calmement.

« Impossible de savoir à l'heure actuelle si c'est vraiment Zan mais oui, toutes les théories portent à y croire. En tout cas, le cri que nous avons entendu était hors du commun, et l'ombre qui a survolé Trare immense. »

Le jeune homme rebondit sur les caractéristiques attribuées à Zan. Valion hocha la tête. Encore une fois, ils avaient les mêmes sources. Il haussa un sourcil à sa dernière remarque. Affronter la créature ? C'est vrai qu'il n'y avait pas pensé, mais ce serait en effet un combat titanesque.

« Si tu y vas seul, c'est certain. »

L'homme réfléchissait de façon stratégique, à haute voix. Mais il gardait en tête ce manque de confiance en lui dont Nathan venait de faire preuve.

« Mais dans un groupe, ce n'est pas la force individuelle qui fait la différence. C'est la cohésion de l'équipe. »

Il se cala dans son siège, buvant une gorgée tranquillement.

« Tu m'as l'air d'être quelqu'un d'intelligent Nathan, et de cultivé aussi. Ce sont des atouts valables au même titre que les autres. »

Certes, il n'était pas costaud. Mais cela pouvait toujours être compensé par des camarades et des objets magiques, à défaut d'une puissance semi-divine.

« Est-ce que tu sais te battre ? »

Et il attendait une réponse sincère.

▼ Succès ▼▲ Succès ▲

23/03/2018

Alors c’était vraiment vrai. Zan avait survolé Trare il n’y avait que quelques jours. Zan existait, et se terrait quelque part dans ses montagnes, attendant patiemment d’être enfin découvert par un chasseur ou un aventurier assez brave pour oser essayer. Bien sûr Valion émettait encore quelques réserves, mais ce n’est pas ce que j’avais retenu de son témoignage. Désormais, ce n’était plus qu’une question de temps. S’il avait survolé Trare, certains habitants n’allaient pas se sentir en sécurité tant que son mystère ne serait pas élucidé. Une troupe allait être formée pour partir en chasse, sûrement menée par au moins un chasseur doré. Qui sait si un chasseur n’était pas déjà parti à sa recherche alors que nous parlions ? Une partie de moi aurait voulu tout lâcher pour partir pour les montagnes, mais je savais que cela me mènerait à une mort certaine, et Valion aussi. Il me confirma mes craintes de ne pas pouvoir affronter la bête, même accompagné d’une invocation, mais il ajouta qu’au sein d’un groupe, je pouvais avoir des atouts utiles. Mon intelligence et mes connaissances, avait-il supposé.

Je me sentais flatté par cette analyse, même s’il ne me connaissait pas vraiment, mais je n’arrivais pas à me convaincre de la véracité de son discours. Bien sûr qu’une bonne connaissance des créatures et du terrain étaient utiles, mais était-ce vraiment suffisant ? Pouvais-je vraiment me contenter de me reposer sur le reste du groupe pour me défendre ? Des gens qui ne me connaîtraient sûrement pas, qui auraient sûrement mieux à faire que de protéger un gamin comme moi ? Puis arriva une question à laquelle j’allais avoir du mal à répondre. Valion me demanda si je savais me battre, et je pouvais lire dans son regard qu’il n’accepterait pas de mensonges ou de formulations brumeuses. C’était une question directe, et il voulait une réponse précise.

“Pas vraiment. Pas suffisamment.” Dis-je de ma voix peu assurée en plongeant mon regard vers mes pieds. Je ne pouvais pas m’arrêter là cependant. Je n’avais pas passé le plus clair de ma vie à essayer de m’entraîner avec un instructeur pour répondre non à une telle question. Mon regard et mon ton restèrent les mêmes, mais je continuai :

“Je sais manier un arc et toucher mes cibles, sans être un as du tir pour autant. Je sais analyser un ennemi, sa position, et adapter la mienne en fonction. Je sais bien éviter les coups, voire les parer. Mais dès que j’ai une épée dans la main, je n’arrive pas à m’en servir correctement. Je sens son poids, son encombrement, elle me fait perdre mon équilibre, et je me fais désarmer rapidement, si je ne la lâche pas tout simplement de moi-même après quelques moulinets. Et puis… J’ai peur de perdre tous mes moyens quand je suis en pleine action.”

Voilà, j’avais donné une réponse satisfaisante. Je savais que je n’était pas sans espoir, je savais que j’arrivais à toucher mes cibles, à parer quelques coups, à éviter les autres. Je savais que ces années d’entraînement, avec mon instructeur ou avec ma soeur, n’avaient pas été complètement inutiles. Je savais qu’il y avait des jours où mon instructeur voyait un certain progrès, lent, mais présent. Mais ce n’était jamais vraiment suffisent. Pas pour mon père, et donc très certainement pas pour aller affronter les dangers de la montagnes au sein d’un groupe aux intentions sérieuses. J’allais sûrement devoir passer mon tour pour cette fois. De toute façon, le temps d’aller à Trare et de prendre un transport jusqu’à un temple, puis de revenir, le groupe d’expédition allait sûrement être formé. Et puis fallait-il aussi que je sorte en vie d’un temple…

“Et toi alors ?” dis-je en relevant la tête vers mon compagnon de repas. “Tu comptes aller jeter un oeil aux montagnes ? En revenant de Sirk peut-être ? Si ça se trouve je suis entrain de partager un repas et bientôt un peu de chemin avec une future célébrité !”

J’avais fait en sorte de retrouver un peu mon sourire et mon ton joyeux du mieux que je le pouvais, histoire de ne pas trop me morfondre sur mes capacités.

▼ Succès ▼▲ Succès ▲

27/01/2018

Le garçon soupesa la question, et Valion lui laissa tout le temps nécessaire pour y répondre. C'était un test. Lui devait savoir quelles étaient ses capacités exactes en vue de leur voyage. Mais c'en était également un pour Nathan. S'il y avait plus de courage que de peur dans son cœur, il répondrait honnêtement. Et ce fut le cas. Mais à sa surprise, le jeune homme poursuivit. Lorsque ce dernier finit d'énumérer ses compétences, sans manquer de les entacher au passage, Valion prit la parole. Y joignant le geste, il compta sur ses doigts, bien en évidence devant son interlocuteur.

« Tirer à l'arc, analyser un ennemi, s'adapter, éviter, parer. Ce sont de bonnes bases Nathan. Celles d'un soldat. Peut-être qu'il te manque un peu de pratique, mais si tu travailles dur, tu progresseras j'en suis sûr. Tu as bien la volonté d'être chasseur, alors mets autant d'enthousiasme dans ton apprentissage et tu verras.»

Ah, instructeur un jour...

« Et bien, si une épée te semble trop lourde, tu devrais t'entraîner avec une autre arme. L'important, c'est que tu sois à l'aise avec, pas que sa taille soit impressionnante !»

Nathan aurait très bien pu être une jeune recrue. Et même s'il ne connaissait pas son parcours et encore moins sa vie, Valion avait envie d'encourager cette flamme qui l'animait. Elle le méritait. Enfin, tant qu'il restait prudent, cela allait de soi. Mais son futur compagnon de voyage avait déjà fait preuve de bon sens dans la conversation, alors il ne s'inquiétait guère. Quoique l'idée d'aller chercher un demi-dieu avait été évoquée. Peut-être que l'ex milicien lui toucherait un mot à ce sujet. C'était une autre paire de manches que d'aller risquer sa vie dans un Temple. Enfin, il était plutôt mal placé pour juger.

L'ancien soldat lâcha un éclat de rire aux dernières paroles de Nathan. Bon guerrier ou non, il se révélait être de bonne compagnie.

« Ha ! J'aimerais en avoir l'opportunité. Mais je ne suis pas certain qu'il y ait autant de monde qui se presse dans les montagnes, ça reste très dangereux. Et il y encore beaucoup d'incertitudes. Peut-être qu'ils vont escorter des chercheurs d'abord ?»

Il lâcha un râle et but une gorgée. Il n'en avait pas grande idée en vrai.

« En tout cas, ça risque d'être chapeauté par des nobles avides de gloire tout ça.»

Il reprit une gorgée et s'attela à finir son assiette, tout en lançant avec bienveillance, et un certain enthousiasme contagieux.

« Allez prends des forces ! On va en avoir besoin pour la route. Et si tu veux autre chose, n'hésite pas, c'est moi qui offre.»

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23/03/2018

Les mots de Valion résonnaient dans mon esprit. Les bases d’un soldat… Vraiment ? Il semblait sincère. Venant de la bouche d’un ancien militaire, j’aurais dû me sentir flatté, honoré même. Pourtant je n’arrivais pas à y croire totalement. Un soldat est censé savoir se défendre, et en étais-je vraiment capable ? Les compétences que je venais d’énumérer me paraissaient davantage être celles d’un fuyard, ou pire, d’un roublard. A l’exception du tir à l’arc peut-être, bien qu’il s’agisse tout de même d’une arme permettant de rester loin du conflit. Savoir qu’il pensait vraiment ce qu’il disait me procurait un réel plaisir, mais je n’arrivais pas vraiment à le montrer, enseveli sous une couche de doutes sur moi-même bien plus épaisse. Je ne répondis que d’un faible sourire, à moitié convaincu, en guise de remerciement pour sa gentillesse.

Sa remarque sur mes problèmes de maniement à l’épée me laissa tout aussi perplexe. Là aussi je pouvais sentir la sincérité dans ses paroles, voire même une certaine évidence, mais je ne comprenais pas vraiment où il voulait en venir. Quel arme pourrais-je bien utiliser à la place d’une épée ? C’était l’arme la plus basique que je connaisse, si j’avais du mal avec celle-là, comment pouvais-je prétendre être meilleur avec une autre ? Une masse, une hache ou une lance me procurerait les mêmes problèmes de poids ou de maniabilité… Et puis changer d’arme signifiait certainement recommencer mon entraînement aux touts débuts…

“Je ne sais pas… L’épée m’a toujours paru être l’arme de contact la plus simple à manier… Tout le monde semble savoir s’en servir, pourquoi aurais-je plus de chance avec autre chose ?”

Valion répondit ensuite vaguement à ma question sur sa possible participation à l’expédition dans les montagnes à la recherche du dragon légendaire. Il ne semblait pas vraiment en savoir plus que quiconque, à part que des nobles essaierait probablement de s’approprier la chose. Je ne connaissais que trop bien ces derniers pour être d’accord avec lui…

“Ça c’est sûr… Le noble qui organisera ou participera à une telle découverte verra son nom de famille doubler de valeur, ils ne risquent pas de passer à côté d’une telle occasion !”

Ma propre remarque me fit rêver un instant… Je n’y avais jamais vraiment pensé auparavant, mais faire partie des aventuriers qui découvriraient Zan me permettrait très certainement de regagner les faveurs de mon père… Est-ce que ça me permettrait de revenir au domicile familial ? De me faire pardonner ma fuite et mes rebellions ? Est-ce que j’avais seulement envie d’y retourner, après tout ? Pas pour mon père, non… Mais pour ma soeur…

La voix enjouée de Valion me sortit immédiatement de mes pensées, et me fit me rendre compte que je n’avais pas touché à mon assiette depuis plusieurs minutes, trop occupé à penser et à parler avec mon compagnon. Je réglai ce problème immédiatement, plongeant mes couverts dans mon repas à moitié terminé. Un morceau de viande toujours dans la bouche, j’ajoutai d’un ton aussi enthousiaste que celui de l’aventurier :

“J’ai hâte de partir ! Sortir de la capitale me fera le plus grand bien !”

Une chose était sûre, avec de telles manières, mes origines nobles n’étaient pas si évidentes à déceler…

▼ Succès ▼▲ Succès ▲

27/01/2018

L'ancien soldat haussa un sourcil intrigué. Nathan prêtait clairement plus d'attention à ses lectures qu'aux entraînements qu'il avait pu avoir. À moins qu'il n'ait eu un mauvais instructeur. Bien que l'épée soit une arme standard, l'une des plus simples à manier restait la masse. Elle demandait certes un peu plus de force mais surtout bien moins de technique dans ses modèles les plus basiques.

« À toi de voir. Une dague ferait peut-être mieux l'affaire. Voire deux si tu n'aimes pas trop les boucliers comme moi. »

La clé, c'était d'essayer. La réplique suivante lui tira un petit sourire. Le jeune homme semblait encore plus idéaliste que lui. Son enthousiasme était à l'épreuve de ses doutes, et c'était plutôt plaisant à voir, et à entendre. Valion ne regrettait nullement son choix de compagnon pour le voyage à venir.

Son appétit subitement retrouvé, il entreprit de finir son assiette. L'ex brigadier-chef l'imita. Repas et boisson terminés, Valion donna rendez-vous à l'apprenti chasseur aux portes de Lüh, trois heures plus tard. Il comptait partir dans la soirée mais l'enthousiasme du garçon l'avait gagné. Cela lui donnait toujours le temps de rassembler ses affaires, de passer encore un moment avec sa famille et de préparer sa jument. Nathan n'ayant pas de monture, il s'était proposé de le prendre avec lui sur Safran. Puisqu'ils voyageaient tous deux léger, l'équidé les supporterait facilement.

Tout semblait s'accorder à merveille pour ce grand départ en somme.

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