Les choses allaient s'enchaîner assez rapidement, maintenant. Le plan était à peu près en place, il ne restait plus qu'à l'exécuter ; la partie la plus difficile. Après tout, le groupe s'était retrouvé soudainement avec un nouveau membre et, surtout, la confiance n'était pas quelque chose qui s’acquérait en un claquement de doigt. La coopération était de mise ce soir, cela était suffisant. La garde dorée Lù avait décidé qu'Amko'Unn resterait avec eux, une idée plutôt judicieuse. Qui sait ce qui pouvait se passer, cette nuit ? Le milicien acquiesça  silencieusement puis laissa chacun se présenter plus proprement, suite à la demande de Qilin.

Le milicien, lui, était évidemment la tête pensante du groupe. Il était surtout le meilleur combattant ici et on pouvait sentir que le reste du groupe ne contestait pas ses décisions. Venait ensuite Gilles, qui se présenta comme un bon combattant, mais un peu rouillé. Seulement ? S'il n'en dit pas plus, il était étrange qu'un type aussi simple que lui puisse diriger une révolte. Ce fut le tour alors d'Ardri. Il n'avait pas encore eu le temps de se présenter proprement. Il n'était pas le meilleur combattant mais savait survivre. Plus magouilleur que réel commerçant, il avait surtout le bras long dans cette ville et connaissait tout un tas de monde. Il parla aussi de Bromard, qui serait de la partie ce soir. Un gars plutôt sanguin mais important ; il avait des liens avec le nord. Vint enfin Lucif, qui se présenta simplement comme étant un demi-dieu.

Le petit tour de table fait, le Commissaire Laurol pris une nouvelle fois la parole.

« Bien. Je vais m'occuper du fauteur de trouble à l'étage. Gilles, tu je pense que rester à l'écart est plus judicieux ce soir. Capitaine Lù, Lucif vous attendra ici. Quant à vous... rendez-vous derrière cette boutique vers minuit. »

Le milicien avait pointé un endroit non loin de la taverne pour la garde dorée Qilin sur la carte. Le groupe avait encore quelques heures devant eux avant la rencontre, alors autant ne pas se regarder dans le blanc des yeux ici, ce n'était pas nécessaire.


La nuit, Rorn


Il n'y avait pas un chat dans les rues, aussi tard dans la nuit. Les gens étaient rentrés chez eux depuis un moment et seul quelques chancelants, sortant des tavernes de la villes, dérangeaient le calme ambiant. Le petit groupe s'était réuni comme convenu derrière l'armurerie. Manquait à l'appel Lucif, bien évidemment,parti rejoindre la garde dorée à un autre endroit de la ville. A la vue d'Amko'Unn, Bromard baragouina quelques mots à Ardri, vraisemblablement mécontent de sa présence. Il allait devoir faire avec.

« Je ne vais pas rester avec vous, mais si les choses dégénèrent, j'interviendrai. »

Aller et venir en groupe ici était bien trop risqué, surtout pour le Commissaire. Il était bien trop suspect. Il donna cependant quelques instructions et conseils avant de disparaître dans la nuit. La priorité était la capture. Et si cela n'était pas possible, faire fuiter le moins d'informations possible. Il était venu ici surtout pour s'assurer que l'invocation de la Garde Dorée n'avait pas fait faux bond.

Il ne restait donc plus qu'Amko'Unn, Bromard et Ardri. Ce dernier décida de briser la glace, quitte à passer la nuit ensemble.

 

« Amko'Unn... T'es donc son invocation. »

Il était vachement grand déjà, c'était suffisant. Un gros singe, c'était marrant. Le petit groupe commença à marcher dans les rues de la ville, ne se dirigeant pas encore vers le lieu supposé de la rencontre.

 

«  On va avoir besoin d'toi. T'as quoi dans le ventre ? T'es sorti d'puis longtemps d'ta prison ? »

Bromard avait toujours cette animosité dans sa façon de parler et d'être, mais on pouvait sentir qu'il faisait quelques efforts.

 

« Faut qu'on trouve un endroit pas trop suspect pour s'poser. T'as une idée, grand singe ? »

Ardri rit légèrement. Il semblait être le plus détendu du groupe, en tout cas. Le calme avant la tempête.


De son côté, Lucif attendait la Garde Dorée Qilin à l'endroit indiqué plus tôt. Lorsqu'elle arriva enfin, il la salua poliment, et lui intima de se mettre en mouvement sans plus attendre. Peut-être serait-elle surprise au départ, car il avait pris la forme de l'homme interpellé plus tôt, Gorlof. Si cela lui avait coûté un peu de sa réserve magique, cela pouvait aider à tromper l'ennemi. L'invocation n'était pas des plus bavarde, mais on lui avait demandé ce soir d'accompagner la Capitaine et de la supporter. Alors il s'exécutait, tout naturellement.

« Je vais te protéger ce soir. Je vais conserver cette forme pour le moment, si tu le veux bien. Cela ne devrait pas poser problème. »

Lucif se fondait particulièrement bien dans la peau de Gorlof. On pouvait sentir qu'il avait l'habitude de ça.

« Que peux-tu me dire sur toi ? J'ai besoin de connaître tes forces et tes faiblesses. Es-tu bonne pour mentir petite humaine ? Et le combat ? »

Ils allaient bientôt arriver sur le lieu de rencontre, alors juste avant d'entrer dans le vif du sujet, il était bon de se préparer un minimum.

Les deux hommes qui accompagnaient le grand singe ne se génèrent pas pour le regarder d'un air surpris pour Ardri, plutôt désabusé pour Bromard. Il soupira même bruyamment en roulant les yeux vers le ciel, croisant ses bras et ayant sans doute l'intention de se murer dans un certain mutisme. Lui qui avait fait un effort des plus sérieux recevait comme réponse rien de moins qu'une fichue blague à peine drôle, selon son point de vue évidemment. On ne l'y reprendrait pas de si-tôt.

Amko renvoya alors la balle à Ardri qui se gratta le menton en levant les yeux, l'air de réfléchir à une idée qui mettait du temps à germer.

 

« L'ennui c'est que ça  à lieu dans une ruelle... »

Il ne pu vraiment finir sa réflexion que le singe enchaîna sur la sienne pour déjà commencer à grimper sur la première bâtisse venu. En soit, aucun des deux hommes n'avaient à redire à cette tactique, elle était plutôt bonne, mais Ardri préférait tout de même prévenir que guérir.

 

« Fais attention aux tuiles, que t'en fasse pas tomber si y en a une fragile, au risque de te faire repérer. »

Comme indiqué, le rendez-vous se ferait à l'écart dans une ruelle, au abord de la taverne, le mieux aurait été de se poster à l'étage, pour avoir l’œil dessus, de loin, tout en étant protéger. L'ennui, c'est qu'ils ne pourraient pas réagir rapidement. Mais pour l'heure, ils devraient se contenter de s'avancer, gardant un œil sur le singe qui évoluait par les toits. Et puis, il eu une illumination soudaine.

 

« Hey ! Attends ! Il faudrait qu'on convienne d'un signal, au cas où tu vois quelque chose avant nous, pour qu'on puisse rappliquer rapidement. Ou inversement. »

Le simulacre de Gorlof hocha sensiblement la tête en écoutant la Capitaine établir ses compétences et capacité. Si il n'avait pas vraiment douté de ses aptitudes au combat, ses facilités à jouer un rôle lui étaient déjà plus inconnue. Cependant, l'entendant répondre à l'affirmative, il jugea rapidement qu'il pouvait s'en contenter et lui faire confiance à ce sujet. Comme tout bon partenaire, elle continua sur cette lancée en lui rendant la pareille.

« Et bien, cela commence à faire un certain temps que je suis sortis du temple, mais mon rôle se cantonne principalement à me mêler aux humains. En cas de problème, je n'aurais donc pas accès à mes pleins pouvoirs. Cependant, je suis un fils de Terra. Tu peux compter sur ma puissance d'attaque ou sur une fuite efficace, mais assez peu sur mes soins, si tu venais à être blessée. »

Les rues étaient plutôt calme et le manteau sombre de la nuit enveloppait Rorn. Leur marche était discrète et il préférait longer les murs pour ne pas être trop facilement en joug si un des problèmes les attendait, bien qu'à l'évidence, c'était eux qui étaient en position de force. Cependant, il lui semblait qu'un dernier détail devait être réglé avant de se jeter dans la gueule du loup.

« Je pense qu'il serait préférable qu'on établisse maintenant le rôle que tu va jouer au côté de Gorlof et la raison pour laquelle tu l'accompagne. Il serait de bon ton de se préparer à l'éventualité de certaines questions. Qu'en penses-tu ?  »

Ardri acquiesça d'un geste moyennement militaire de la main sur son front, à l'attention du grand Singe qui quittait doucement sa vue en prenant le chemin des toits. Le groupe scindé avançait d'un pas rapide, mais assez désinvolte pour passer inaperçu. Au loin, les deux hommes commençaient à apercevoir les lumières de la taverne qu'ils visaient. Pour l'instant, eux comme le Grand Singe n'allaient pas pouvoir faire grand chose si ce n'est attendre que quelque chose se passe, ou au contraire, qu'il ne se passe rien.

Durant leur avancée, ils croisèrent un groupe d'homme un peu éméchés qui n'avançaient pas très droit. Ils avaient cependant au moins le méritent de rentrer chez eux assez tôt pour ne pas trop inquiéter leur femme. On pouvait distinctement attraper au vol leur conversation, évoquant « un couple bizarre qui est parti dans la ruelle à côté, sûr qu'y z'y vont pas pour faire la causette ces deux là ». Ardri se permit un léger rire tout en continuant.

Du côté du Grand Singe, les choses se passaient évidemment dans le calme, il y avait assez peu d'habitant qui traînait dans le coin, si ce n'est quelques nuisibles qui, à son avancée, ne tardaient pas à s'envoler ou à déguerpir. Cependant non loin, il se posta non loin d'une fenêtre de toit jusque là éteinte. L'intérieur fut éclairé lentement, à la lumière d'une lanterne, laquelle révélait à l’intérieur une femme, assez peu vêtue d'ailleurs. Son regard fut attiré en l'air, vers la grosse silhouette que sa lumière éclairait à présent. Ses yeux s'ouvrirent en grand, elle attrapa un linge avant de se précipiter vers la fenêtre, mettant quelques secondes avant de se positionner assez haut, sans doute en prenant appui sur un tabouret, avant de l'ouvrir brusquement.

« Dites donc vous ! Qu'est-ce que vous faites là ?! Votre invocateur vous à pas appris à pas espionner les jeunes femmes ?! »

Jeune, elle ne l'était plus tellement d'ailleurs, à y regarder de plus prêt. Elle agitait maintenant un linge pour essayer de faire partir le Grand Singe, comme si il s'agissait d'une vulgaire mouche.

« Les humains bruyants ne sont pas inintéressants. Ils permettent d'attirer les regards, voir de les détourner d'autre chose. »

Le simili Gorlof laissait échapper cette brève pensée, en réponse à celle de la Capitaine, qu'il ne remettait pourtant pas en question. Il était même plutôt d'accord avec ce genre de raisonnement, Gorlof n'était peut-être que le sommet d'un iceberg bien plus vaste. Ce ne serait pas étonnant. Ce qui le serait, c'est qu'il soit au courant de tout ce qui pourrait se tramer derrière lui. N'est-ce pas pour cela que lui et la Capitaine investiguait aujourd'hui, sans chercher à en savoir plus auprès de Gorlof lui-même ?

Lucif, sous les traits de l'homme, hocha seulement la tête à la tactique énoncée de la Capitaine. C'était à la fois intelligent et un gros risque à prendre, si sa théorie n'était pas bonne. Pourtant, ce n'était pas l'invocation dissimulée qui était le meneur dans cette enquête, bien au contraire, aussi, il resta silencieux jusqu'à ce que le couple arrive non loin de la taverne dont il avait été fait mention. L'heure était à la fois tardive et encore bien jeune pour les badauds bruyants à l’intérieur, qui en sortaient pour prendre l'air avant d'y retourner l'instant suivant. Quelques uns avaient lorgné sur la Garde Dorée avec assez peu de discretion. Le lieu de la rencontre n'était pas loin, il était à quelque pas. Lucif laissa donc échapper un murmure à l'intention de la Capitaine.

« Prête ? »

Il n'en doutait guère à vrai dire, les mots n'étaient là que pour accompagner les pas. Ils arrivèrent à l'orée de la ruelle adjacente, au fond de laquelle n'était visible que les silhouettes de tonneaux et... un homme assis dessus. Lucif-Gorlof lança un œil avertis autour de lui avant de s'engouffrer, prenant la tête puisque, c'était lui qui était attendu. En avançant, le silhouette de l'homme se précisait, une allure fine, des cheveux très clairs, un habit sombre sans prétention. Alors qu'il œuvrait à tailler un morceau de bois, dont la conclusion arrivait visiblement, il tourna son visage vers la venue de Gorlof, puis son regard tomba lourdement sur son accompagnante.

Quelques secondes s'écoulèrent avant que l'homme svelte ne change de posture, posant un pied sur le rebord du tonneau sur lequel il siégeait, continuant son œuvre sans plus regarder les nouveaux venus, mais laissant un léger sourire étirer ses lèvres.

 

« Qui es-tu ? »

Demanda t'il avant de glisser son regard jusqu'à la femme qui, à priori, lui était inconnue. Le simili Gorlof entrouvrit la bouche, mais l'homme en face d'eux lui intima de se taire, d'un geste de la main, la paume ouverte vers lui.

 

« C'est à elle que je demande. »

A la réflexion du singe voyeur, la femme s'offusqua très bruyamment, à la manière de ces dames touchées dans leur égo, d'un étrange grognement aigu. Ce dernier fut rapidement étouffé dans l’œuf quand la lumière de sa chambre s'éteignit, remplaçant la vexation par de la surprise. Mais ça, le grand singe n'était déjà plus vraiment la pour le remarquer. Il pourrait sans doute maintenant remarquer que ses compagnons avait trouvé une place assise sous une rebord de fenêtre de la taverne, sur un banc en pierre. Ardri parti chercher deux choppes pour parfaire le tout et revenir au même endroit. Quand ce fut fait, Bromard attira son intention d'un claquement de doigt, pour interpeller également le singe dont la position leur était maintenant inconnue.

Ardri observa au dessus de l'épaule de Bromard, discrètement, pour voir un homme, ou une femme à vrai dire il ne savait pas vraiment, adosser au mur adjacent la ruelle. D'un vêtement de facture moyenne, la capuche était rabattue et il, ou elle, semblait s'intéresser à ce qui se passait dans la ruelle, sa tête tournant de temps en temps pour y tendre l'oreille. Depuis quand était-il là, personne ne le savait vraiment, mais il fallait peut-être agir ? Bromard entreprit de s'en approché, à peine retenu par Ardri qui préférait rester observer. A l'approche de l'homme un peu bourru, l'individu fut quasiment instantanément alerte et, pris de panique sans doute, se mit à fuir immédiatement. Il était fin et vif, s'était déjà éloigné de plusieurs mètre avant que Bromard ne décide de le suivre, laissant Ardri derrière lui pour assurer les arrières des autres.




L'homme mystérieux toisa de haut en bas le femme qu'il avait interrogé. Sans retenue, avec plutôt même un peu d'insistance. Son visage présentait un fin sourire toujours présent. Il accorda un rapide coup d’œil au simili Gorlof, laissant échapper un petit rire satisfait. Son attention fut cependant retourné auprès de la femme, avant de se replacer un peu mieux sur ses tonneaux, davantage tourné vers elle.

 

« Tu n'es pas d'ici, je me trompe ? »

Il continuait à l'observer un peu, pour parfaire son opinion à ce sujet.

 

« Mais tu sais, pour faire affaire, il faut avoir de quoi offrir et surtout, il me faut savoir ce que tu souhaite recevoir en retour. Qu'est-ce que tu cherche ? Une place ? De la renommée ? Des alliés ? De l'argent peut-être, qui sait ? Mais le plus important, c'est que ce tu va me proposer pour l'obtenir. Est-ce que... »

Son visage tourna lentement, jusqu'à faire face au Gorlof encapuchonné.

 

« Notre ami commun, bien silencieux, t'as ramené ici pour une raison particulière, d'ailleurs ? »

Son regard se déposa sur lui, sans ciller, son sourire disparaissant à mesure que Gorlof se montrait sans réponse. Ce dernier se reprit rapidement, prenant son rôle au sérieux, sans en dire trop, arrangeant le plan initial pour coller aux nouvelles informations.

« Elle m'a semblée intéressante pour nos affaires, ses contacts nous seront sans doute très utiles. »

Ne restait plus qu'à attendre la réponse de cette fameuse femme inconnue aux contacts intéressants. L'homme se tourna à nouveau face à elle, attendant ses réponses à ses premières questions.

La poursuite entreprise par Bromard s'évanouie rapidement à l'horizon, entre l'ombre des bâtisses et les quelques derniers groupes de la soirée. Le regard d'Ardri insistait sur sa dernière position, mais ne vit rien de plus qui lui permettrait de conclure à quoi que ce soit. Il eu un regard vers le singe dont la positionnement lui était inconnu, ainsi qu'une pensée à son égard. Peut-être, à sa place d'invocation rapide et agile, aurait-il fait le choix de suivre l'individu suspect. Mais il était tout autant d'un soutien sans faille ici, pour peu que les choses tournent mal. C'était son lot quotidien : faire des choix. Pour une fois, ce n'était pas vraiment le sien, mais il ne pouvait s'empêcher d'y réfléchir.


L'homme aux cheveux clairs toisait la femme avec un intérêt savamment dissimulé, un léger rictus faisant briller son regard. Une fois, ses yeux passèrent par dessus son épaule, comme attiré par quelque chose, mais bien vite il revint à la conversation.

Se faisant le mime de son interlocutrice, il croisa ses bras avant de se laisser reposer le bas du dos sur les caisses de bois derrière lui. Son rictus d'intérêt se changea en un sourire amusé aux derniers mots de la brune.

 

«  Rien n'est illégal tant que cela ne se sait.  »

Il se permit se trait d'humour, sans savoir si cela allait être bien accueillis ou non, mais à vrai dire, peu lui importait. Il déposa son index sur ses lèvres et leva les yeux au ciel en signe de réflexion, accompagné d'un soupire quasi méditatif.

 

« Si l'odeur des tsuris t'attire et que ceux que j'ai ont l'air d'être un bon investissement entre tes mains... oui, je pense que nous pourrions faire affaire. »

Dit-il d'un air convaincu avant de continuer.

 

« Mais permets moi de m'en assurer. Que dis-tu d'un premier rendez-vous, dont je déciderais de l'emplacement, afin de m'assurer de la qualité de la marchandise que tu peux acheminer ? Un échantillon suffira. »

Il retrouva un peu de sérieux avant de recroiser avec une certaine grâce ses bras autour de lui. Quelques regards lancés à Gorlof, puis enfin il attendait la réponse de son interlocutrice.

Avant de s'évanouir dans l'ombre d'une des trois ruelles, Bromard s'était déjà fait quelque peu distancer par l'individu à l'air chétif, mais surtout rapide et agile. Après avoir bifurqué, il n’aperçut déjà plus que le bout de sa cape voletant derrière lui, indiquant suffisamment le chemin à suivre. Bromard était d'un autre gabarit et l'endurance n'était à priori pas son fort, pourtant, il s'évertuait à continuer sa course.

Se faisant, il suit l'homme qu'il a vu tourner à gauche, mais son souffle se fait déjà bien bruyant. Après avoir tourné encore, suivant son instinct plus qu'autre chose, il se retrouve dans la rue principale où personne ne l'y attends. Il inspire profondément et expulse fort pour reprendre son souffle. Se redressant avant d'engager un demi tour, il aperçoit la silhouette du grand singe rouge venir certainement s'enquérir de la situation. Bromard essaye de le faire fuir d'un grand geste de la main.

« Laisse moi, retrouve le plutôt ! Ça me dit rien qui vaille... »

Il espérait vivement que le singe s’exécute, ainsi, il se remettrait à pister tant bien que mal l'individu de là où il était.

Mais du haut des toits, le grand singe aurait sans doute plus vite fait de le trouver. La visibilité n'était pas terrible dans ses ruelles qui se faisaient de plus en plus étroites. Il y avait des pas qui pouvaient être perçus par son ouïe divine, mais un seul bruit était celui d'une course. Plus il s'en rapprocherait et plus la course ralentirait, jusqu'à s'arrêter quelque part, au fond d'une ruelle où il semblait y avoir un autre individu encapuchonné.

Arrivant sur place, il serait difficile de savoir lequel était celui qu'il poursuivait, mais il entendrait facilement un murmure s'échanger.

« On les observe... »

L'homme à la chevelure claire acquiesce, sans trop de surprise, aux dires de la brune. Oui la ville était en ébullition, mais visiblement, cela ne semblait pas tellement l'inquiété, à en croire son sourire.

L’ersatz de Gorflof écoutait sans mot dire, puis croisa le regard de la Capitaine en attrapant la fiole qu'elle lui tendait. L’œil de leur interlocuteur suivait le mouvement sans intervenir.

 

« Pas d'inquiétude, si je demande à se rencontrer, ce ne sera évidemment pas dans le coin, plutôt plus proche de nos... »

Il se figea et devint tout à coup silencieux, fronçant les sourcils et semblant perdre de vue la Capitaine et Gorlof. Quelques secondes passant et il reprit le fil de la conversation, comme si il avait été la victime d'une absence. Il se redressa prestement et attrapa la fiole directement dans la main de Gorlof.

 

« Bien. On ne peut pas dire que ce soit suffisant, mais je ferais avec. C'était un plaisir, mais je dois vous quitter. »

Dit-il en tant que salutation visiblement, l'accompagnant d'un bref hochement de tête. Il passa entre ses deux interlocuteurs, semblant visiblement vouloir quitter le rendez-vous avant de se retourner en lançant un regard à la brune.

 

« Nous conserveront l'intermédiaire de notre ami pour l'instant. Mais attends-toi à une suite rapidement. »

Il les salua d'un geste de la main, n'attendant pas vraiment leur réponse, avant d'entreprendre de quitter la ruelle d'un pas pressé.